02/05/2024 francesoir.fr  5 min #247861

Face à la colère du personnel éducatif, le gouvernement annule la réduction des heures supplémentaires pour l'année 2024

France-Soir

Manifestation des services civils dans le cadre d'un appel national des syndicats pour de meilleurs salaires, à Paris le 19 mars 2024.

AFP

A peine deux jours après avoir annoncé la réduction des heures supplémentaires dans les collèges et les lycées en raison de coupes budgétaires, le gouvernement a fait volte-face mercredi 01 mai 2024, sur fond de manifestations syndicales à travers la France. La décision, communiquée lundi aux rectorats, a suscité une vague de colère et d'indignation dans les établissements scolaires. Les syndicats, qui évoquent une "panique" dans le personnel, ont même évoqué le risque de grève à partir de ce jeudi.

Les rectorats ont adressé lundi un mail à toutes les directions des établissements scolaires pour leur annoncer la mise en application de nouvelles consignes, qui découlent de mesures économiques. "En application du décret (…) du 21 février portant annulation de crédits, une mesure de réduction des dotations des heures supplémentaires effectives (HSE) et des indemnités pour mission particulière (IMP) a été notifiée", leur apprend-on. En vertu de ces directives, les accès au logiciel qui permet de déclencher le paiement des HSE et des IMP ont été suspendus.

"Panique" dans le personnel éducatif

Les heures supplémentaires et les indemnités pour mission particulière assurées par les enseignants couvrent un ensemble de dispositifs comme les stages de remise à niveau pendant les vacances, les actions de soutien et de préparation aux examens ou encore les remplacements de courte durée. Chaque établissement se voit doter d'une enveloppe d'heures chaque année, qu'il doit partager selon ses projets et ses objectifs. L'année dernière, 333 millions d'euros ont été dépensés pour rémunérer les HSE, en hausse de 7 millions d'euros par rapport à 2022, et 161 millions ont été utilisés pour les IMP, également en hausse depuis 2018 en raison de "l'élargissement des missions confiées aux enseignants", selon la Cour des comptes.

Les rectorats ont bien précisé que le paiement des HSE déjà assurées n'était pas remis en cause. Toutefois, ces coupes budgétaires par lesquelles le gouvernement, Matignon et Bercy en tête, justifie cette réduction, étaient prévues pour toute l'année civile 2024. Il est question de réduire les dépenses des administrations publiques de 10 milliards et l'Education nationale doit économiser environ 692 millions d'euros.

Cette réduction des heures sup' était de ce fait prévue, à cheval sur le troisième trimestre de l'année en cours et le premier trimestre de la prochaine année scolaire, dont la rentrée est prévue pour septembre. Cela signifiait que le dispositif "devoirs faits", les révisions et cours de soutien en prévision du brevet et du bac ainsi que certaines missions particulières prévues pour cette fin d'année scolaire étaient menacées.

"En conséquence", les dotations pour 2023-2024 feront l'objet "d'un ajustement" à venir, qui sera "notifié" aux établissements, précisait encore le mail des rectorats.

Mais cette correspondance a provoqué la colère du personnel de l'éducation, qui a très vite exprimé son rejet d'une décision jugée "brutale". Les syndicats décrivaient un état de "panique" dans les collèges et les lycées. "C'est scandaleux. Cette enveloppe est utilisée et réfléchie sur l'année, on n'improvise pas semaine après semaine !", a dénoncé Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du SNPDEN, syndicat des chefs d'établissements.

Le gouvernement rétropédale

"Il n'y a pas de dialogue. On nous envoie un mail, on nous dit qu'on ferme l'application destinée au paiement des heures supplémentaires, et on nous explique qu'on verra plus tard combien d'heures ont été ponctionnées. Il y a une vraie rupture de confiance et une remise en cause de notre autonomie. Jamais on n'a interrompu un budget en disant : 'On n'a plus de thunes, laissez tomber !'", a-t-il ajouté.

Le ton est vite monté, la veille de la fête du Travail, célébrée hier 01 mai par des manifestations des principaux syndicats du pays. Sophie Vénétitay, SG du SNES-FSU, principale organisation syndicale du secondaire, évoquait même une grève dès ce jeudi. "Face à la brutalité de cette décision et au sentiment de mépris qu'elle engendre, des collègues réfléchissent à se mettre en grève", a-t-elle averti.

Mercredi, la ministre de l'Education nationale Nicole Belloubet a annoncé l'abandon de ses mesures, dans un  communiqué de presse. "Conformément à la priorité donnée à l'Éducation nationale par le Gouvernement, le Premier ministre et la ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse ont souhaité que les établissements scolaires continuent à disposer des moyens de mener à bien leurs missions", lit-on.

"En conséquence, la ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse a donné instruction pour que, dès demain (ce jeudi, NDLR), les académies recouvrent les moyens budgétaires initialement notifiés afin de poursuivre l'attribution d'heures supplémentaires dans les établissements", poursuit-on rue de Grenelle.

Si l'annonce ministérielle est une "heureuse surprise" un 1er mai, les syndicats ne cachent pas leur "incrédulité" devant de telles décisions et plaident pour la "vigilance". C'est une volte-face destinée à s'éviter une fin d'année incandescente", juge Mme. Vénétitay. Rendez-vous à la rentrée ?

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