10/03/2025 francesoir.fr  5min #271241

 Canada : Mark Carney élu Premier ministre

Le Canada tourne la page du Young Global Leader Justin Trudeau et change de Premier ministre

France-Soir

Justin Trudeau

Clap de fin pour Justin Trudeau. Ottawa est sur le point de changer de Premier ministre, dix ans après l'arrivée au pouvoir du Young Global Leader. C'est un certain Mark Carney, ancien directeur de la banque centrale du Canada, un novice en politique mais un expérimenté dans l'économie et la finance, qui doit à présent contrer la guerre commerciale lancée par le président américain Donald Trump et qui a précipité la chute du "golden boy" canadien.

Début janvier, Justin Trudeau annonçait sa démission. Confronté à une hausse historique de son impopularité, celui que les Canadiens avaient élu en 2015 avec une majorité écrasante désapprouvent désormais sa gestion, conséquence de ces deux dernières années, marquées par une inflation galopante ainsi qu'une crise du logement qui ne se résolvait pas.

Un novice pour remplacer un YGL

Le désormais ex-Premier ministre avait aussi perdu plusieurs bastions comme Montréal lors des derniers scrutins, aggravant son cas au sein même du parti libéral. Certains membres l'appelaient ouvertement à démissionner.

Ce Young Global Leader (YGL) protégé de Klaus Schwab était encore confronté à une autre crise à la fin de 2024, qu'il espérait sans doute surmonter simplement avec un autre remaniement, le 15e depuis 2015 et l'un des plus conséquents avec un tiers du gouvernement concerné. Cette crise débutait avec la démission surprise de la numéro 2, à savoir Chrystia Freeland, vice-Première ministre et ministre des Finances, qui a exprimé son désaccord avec les choix politiques de Trudeau, en ce qui concerne notamment la réponse que peut apporter Ottawa à une possible guerre douanière et commerciale avec Donald Trump.

Le président américain avait promis avant son investiture d'imposer des droits de douane de 25 % au Canada et au Mexique, qualifiant le Canada comme étant le 51e État américain dont Trudeau serait le "gouverneur". Des déclarations qui ont aggravé les tensions mais qui ont surtout précipité la chute du PM canadien. Son remaniement ne revitalise pas son cabinet, encore moins sa popularité.

Il annonçait ainsi sa démission le 06 janvier 2025. "J'ai l'intention de démissionner de mon poste de chef du parti et de Premier ministre une fois que le parti aura choisi son prochain chef", a-t-il déclaré dans la capitale Ottawa devant la presse.

C'est dimanche 09 mars que ce parti au pouvoir a choisi le remplaçant de Justin Trudeau. Mark Carney était déjà le favori, loin devant Chrystia Freeland. Cet ancien banquier central, non seulement au Canada mais également en Irlande et au Royaume-Uni, est un économiste expérimenté mais un politicien novice.

Il a tout de même réussi à prendre de l'avance par rapport à ses adversaires en termes de soutien au sein du pays et de fonds levés. "Nous sommes confrontés à la crise la plus grave de notre vie. Tout, dans ma vie, m'a préparé à ce moment", a-t-il déclaré lors d'un meeting vendredi. C'est par son "expérience économique et son sérieux", ainsi que par sa connaissance des "systèmes financiers internationaux ou encore des forces et faiblesses de l'économie canadienne" qu'il s'est démarqué, estiment des observateurs, qui le jugent "habitué à gérer des crises", dont celle qui se prépare entre Washington et Ottawa.

10 ans de scandales et de WEFisme

Une fois le gouvernement formé, le nouveau PM devra faire sa passation avec Justin Trudeau. Depuis son arrivée au poste de Premier ministre en 2015, ce dernier est passé du statut de "Golden Boy" de la politique canadienne à celui d'un dirigeant controversé. Après une victoire éclatante contre les conservateurs, il s'est rapidement attiré les critiques pour des scandales liés à des conflits d'intérêts et des violations de l'éthique, notamment l'affaire SNC-Lavalin et les vacances offertes par le prince Karim Aga Khan IV.

Bien qu'il ait initialement bénéficié d'une popularité grâce à des politiques sociales inclusives et une baisse du chômage, ses décisions environnementales favorisant les industries pétrolières et l'autorisation du glyphosate ont terni son image. À cela s'ajoutent des tensions diplomatiques avec des puissances comme la Chine et les États-Unis, ainsi que des échecs dans la négociation d'accords internationaux.

Son deuxième mandat, débuté en 2019, n'a fait qu'amplifier les polémiques. Outre l'ingérence dans l'affaire SNC-Lavalin, Trudeau a été accusé de favoritisme envers We Charity, une organisation ayant rémunéré sa famille. Ces scandales, combinés à une gestion sanitaire controversée lors de la pandémie et des dépenses exorbitantes auprès de McKinsey & Company, ont contribué à une chute vertigineuse de sa popularité. Par ailleurs, sa proximité avec le Forum Économique Mondial (WEF), où il est perçu comme un acteur clé du programme des Young Global Leaders, alimente les critiques sur son affiliation aux élites mondiales et son éloignement des préoccupations du "petit gars" canadien.

Depuis plusieurs mois, Justin Trudeau fait face à une crise de confiance majeure. Les Canadiens lui reprochent l'inflation galopante, une taxe carbone impopulaire et une crise du logement non résolue malgré ses promesses. Accusé par ses opposants d'être davantage préoccupé par ses liens avec Davos que par les réalités quotidiennes de ses concitoyens, il incarne pour beaucoup un dirigeant déconnecté. Alors que son parti est en chute libre dans les sondages, Justin Trudeau semble désormais bien loin du jeune leader charismatique qui promettait un Canada ouvert et dynamique.

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