12/03/2025 francesoir.fr  9min #271494

 Roumanie : le candidat Calin Georgescu interpellé par la police (Vidéo)

Dictat européen ou crise démocratique ? La grève parlementaire de l’aur après l’exclusion de Georgescu secoue la Roumanie

France-Soir

Dictat européenne ou crise démocratique ? La grève parlementaire de l'AUR après l'exclusion de Georgescu secoue la Roumanie

Le 12 mars 2025, George Simion, président de l'Alliance pour l'Union des Roumains (AUR), un parti souverainiste, a annoncé que tous les députés et sénateurs du parti entameraient une « grève parlementaire ». Cette décision intervient en soutien à Călin Georgescu, un politicien indépendant, qualifié sans preuve de prorusse par les médias mainstream, dont la candidature à l'élection présidentielle de 2024 a été invalidée par la Cour constitutionnelle roumaine. Georgescu, qui avait remporté le premier tour de l'élection avec 22 % des voix en novembre 2024, fait face, même s'il est toujours présumé innocent, à des accusations pénales pour financement illégal de campagne, diffusion de fausses informations et actes anticonstitutionnels, selon les procureurs roumains en février 2025. La Cour a annulé le scrutin après des révélations sur une ingérence étrangère, notamment via 800 comptes TikTok liés à la Russie soutenant Georgescu. Ce qui arrive à Georgescu est pour le moins étonnant, car Laura Kövesi, qui fait l'objet de plusieurs plaintes en Roumanie et en Belgique, est elle toujours en poste au parquet européen  sans que le Parlement Roumain n'ait été informé qu'elle soit l'objet d'une plainte pénale en Belgique.

L'AUR, deuxième force politique au Parlement roumain depuis 2024, s'oppose farouchement à cette décision, affirmant qu'elle constitue une « atteinte à la démocratie ». La grève parlementaire signifie que les élus de l'AUR cesseront de participer aux séances plénières et aux commissions parlementaires, une mesure symbolique mais potentiellement disruptive pour le fonctionnement législatif du pays.

Pourquoi cette Grève ?

L'AUR justifie cette grève comme une démonstration de solidarité avec Georgescu, qu'elle considère comme une victime d'un « abus institutionnel » orchestré par l'État roumain, perçu comme aligné sur les intérêts de l'Union européenne (UE) et de l'OTAN. Selon un communiqué de presse publié par l'AUR, le parti affirme que « l'état profond tente par tous les moyens de s'emparer du pouvoir total » et dénonce « la dictature établie par certaines institutions étatiques ». Le parti qualifie la décision de la Cour constitutionnelle d'« abusif », affirmant qu'elle a porté « un nouveau coup à la véritable opposition en Roumanie et aux candidats patriotes ». L'AUR critique également « les gangsters politiques qui contrôlent l'État roumain », notamment les partis au pouvoir comme le Parti Social-Démocrate (PSD) et le Parti National Libéral (PNL), qu'elle accuse de maintenir un « establishment corrompu » depuis 35 ans. Pour Simion et ses partisans, cette grève marque « le début d'une mobilisation sans précédent » pour défendre « l'avenir de la nation et de l'État roumain », assurant que les « patriotes roumains ne resteront pas sans représentation politique ».

Le parti critique également le soutien militaire de la Roumanie à l'Ukraine dans le cadre du conflit russo-ukrainien, adoptant une position prorusse qui contraste avec la ligne officielle de Bucarest. Pour l'AUR, cette grève est un moyen de protester contre ce qu'ils qualifient de « dictature » et de défendre la « souveraineté nationale » face aux pressions internationales.

Conséquences pour la Roumanie

Bien que l'AUR ne soit pas majoritaire au Parlement, cette grève pourrait ralentir certaines activités législatives, notamment si des votes critiques nécessitent une présence minimale ou un consensus. En Roumanie, le Parlement compte un total de 466 membres (329 députés et 137 sénateurs). L'AUR, en tant que deuxième force politique, dispose de 63 parlementaires (environ 18 % du total), ce qui en fait un acteur significatif en forte progression par rapport à 2020. Cependant, son impact pourrait être plus symbolique que pratique, car l'AUR, bien qu'influente, ne dispose pas d'un pouvoir décisionnel dominant. Politiquement, cette action risque d'accentuer les divisions déjà profondes en Roumanie, un pays membre de l'UE et de l'OTAN confronté à une montée du souverainisme et à des tensions géopolitiques liées à la guerre en Ukraine.

Sur le plan social, la grève pourrait mobiliser les bases souverainistes de l'AUR, alimentant des manifestations déjà en cours depuis l'annulation de l'élection. Des milliers de Roumains ont protesté à Bucarest et dans d'autres villes, exigeant l'invalidation de la décision de la Cour constitutionnelle. Cette polarisation pourrait également fragiliser la stabilité politique du pays, déjà mise à l'épreuve par des crises économiques et une méfiance croissante envers les institutions. L'AUR, dans son communiqué, insiste sur le fait que cette grève n'est « pas la fin de notre lutte, mais le début d'une mobilisation sans précédent contre la dictature instaurée le 6 décembre », faisant référence à l'annulation de l'élection présidentielle.

Les actions de l'AUR au Parlement

Avant d'annoncer cette grève, l'AUR jouait un rôle très actif d'opposition au Parlement roumain. Depuis son entrée en force en 2020, avec 9 % des voix aux élections législatives, et sa croissance pour devenir la deuxième force en 2024, le parti a utilisé sa présence parlementaire pour promouvoir un agenda souverainiste. Ses actions incluent le dépôt de propositions de lois visant à renforcer les droits des Roumains et des minorités roumaines dans les pays voisins, ainsi que des mesures pour limiter l'influence de l'UE et de l'OTAN sur la politique roumaine. L'AUR a également organisé des débats et des motions critiquant le soutien militaire à l'Ukraine, accusant le gouvernement de compromettre la neutralité et la sécurité nationale. Ses interventions fréquentes en plénière et dans les commissions, souvent marquées par des discours incendiaires, ont polarisé l'hémicycle, attirant à la fois des soutiens fervents et de vives critiques de la part des partis traditionnels.

Réactions en Roumanie

Certains sympathisants, comme ceux exprimant leur soutien sur X (Twitter), ont salué la décision comme un acte de courage, affirmant que Georgescu représente « le véritable président de la Roumanie ». Des commentaires sur les réseaux sociaux montrent un soutien fervent, notamment de figures comme @SatoshiBroker et @AB, qui louent  George Simion et l'AUR pour leur opposition à « la dictature ». Le langage du communiqué de l'AUR, décrivant une lutte contre « les gangsters politiques » et « le Deep State », résonne fortement parmi ces bases, renforçant leur conviction qu'il s'agit d'une bataille pour la « souveraineté nationale ».

D'autres utilisateurs, tels que @DolhascuM30861 et @Adrian, ont dénoncé la grève comme « inutile » et « irresponsable », arguant que les parlementaires élus devraient travailler pour le peuple roumain plutôt que de boycotter leurs fonctions. Certains, sans preuve à l'appui et répétant les messages des médias dominants, accusent l'AUR de promouvoir des agendas prorusses.

Les partis au pouvoir, comme le Parti Social-Démocrate (PSD) et le Parti National Libéral (PNL), ont critiqué l'AUR, qualifiant cette grève de « manœuvre populiste » et de « menace pour la démocratie », sans avoir réellement commenté la décision antidémocratique d'empêcher la candidature de Georgescu. Le gouvernement pourrait chercher à minimiser l'impact en accélérant les processus législatifs ou en marginalisant davantage l'AUR sur la scène politique, tout en rejetant les accusations d'un « establishment corrompu » portées par l'AUR dans son communiqué.

Précédents de grèves parlementaires en Roumanie et à l'étranger

En Roumanie, les grèves parlementaires sont rares, mais des boycotts ou des absences massives ont eu lieu par le passé, souvent dans des contextes de crise politique. Par exemple, en 2012, des députés de l'opposition ont boycotté des séances pour protester contre des réformes constitutionnelles controversées. Cependant, une grève formelle et prolongée comme celle annoncée par l'AUR est inédite, reflétant une escalade dans les tactiques protestataires.

Cependant, des grèves ou boycotts parlementaires ont été observés dans plusieurs démocraties, souvent comme outil de protestation. En 2019, des députés britanniques ont boycotté des séances pour s'opposer au Brexit, et en 2013, des parlementaires turcs de l'opposition ont quitté l'Assemblée nationale pour protester contre des lois restrictives. En Russie, des boycotts ont été utilisés par des partis d'opposition sous Poutine, mais avec peu d'impact face à la domination du Kremlin. Ces exemples montrent que de telles actions peuvent attirer l'attention, mais leur efficacité dépend du contexte politique et de la structure parlementaire.

Réactions internationales à la réjection de la candidature de Călin Georgescu

La décision de la Cour constitutionnelle roumaine d'invalider l'élection et de rejeter la candidature de Georgescu a suscité des réactions mitigées à l'international :

  • Les institutions européennes, comme la Commission et le Parlement, ont salué la décision comme une défense de l'État de droit, mais ont appelé à une transparence accrue dans le processus électoral roumain. Des responsables ont exprimé des inquiétudes sur l'influence russe en Europe de l'Est, voyant dans l'annulation une réponse nécessaire à une menace hybride.
  • Washington et les alliés de l'OTAN ont soutenu la Roumanie, soulignant l'importance de contrer les ingérences russes, notamment via les réseaux sociaux. Cependant, certains conservateurs aux États-Unis, proches de l'administration Trump, ont critiqué la décision, voyant en Georgescu un allié potentiel contre les « élites globalistes».
  • Moscou a dénoncé l'annulation comme une « violation des droits démocratiques », accusant l'Occident de manipuler la politique roumaine. Cette position a renforcé les soupçons d'un soutien actif de la Russie à Georgescu, notamment via des campagnes de désinformation sur TikTok.
  • Des pays comme la Pologne et les pays baltes ont soutenu la Roumanie, partageant des préoccupations similaires sur l'influence russe, tandis que des partis d'extrême droite en Hongrie et en Slovaquie (comme Fidesz et Smer) ont exprimé leur sympathie pour l'AUR et Georgescu, critiquant l'UE comme « anti-démocratique».
  • En France, aucune réaction du président Macron.

La grève parlementaire de l'AUR illustre une crise politique profonde en Roumanie, exacerbée par des tensions géopolitiques et une montée du nationalisme. Bien que symbolique, cette action pourrait aggraver les divisions internes et compliquer la coopération législative. À l'international, la décision sur Georgescu est perçue comme une victoire pour l'État de droit par les alliés occidentaux, mais elle alimente les tensions avec la Russie et les partis populistes en Europe. L'avenir politique de la Roumanie dépendra de sa capacité à naviguer entre ces fractures internes et externes, dans un contexte où la démocratie elle-même est mise à l'épreuve, comme le souligne l'AUR en dénonçant une « dictature » imposée par des institutions corrompues.

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