Par Kumaran Ira
14 mars 2012
Le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) français promeut des plans pour une intervention militaire en Syrie par les puissances impérialistes au motif fallacieux de la nécessité de « protéger » les civils.
Dans un communiqué du 24 février, le NPA déclare : « La barbarie du régime syrien de Bachar al-Assad ne connaît aucune limite. Il est prêt à massacrer le peuple syrien, à écraser sous les bombes la ville de Homs et tous les ilôts de résistance pour garder son pouvoir. »
Déplorant que « Les femmes, les enfants, les médecins sont torturés, assassinés » - bien qu'il ne présente aucune preuve concrète pour étayer cette affirmation incendiaire - il conclut : « Bachar al-Assad, toi et ta clique de tueurs, dégagez. »
De telles positions désignent le NPA comme des flatteurs petit-bourgeois de l'impérialisme. Le parti reste silencieux sur l'identité de ceux qui combattent le régime d'Assad - des groupes armés menés par les Frères musulmans, des agents de la CIA, des éléments d'al Qaïda et des déserteurs de l'armée syrienne - pour dissimuler la question politique centrale : la poussée impérialiste pour la reconquête de la Syrie, ce que le NPA soutient.
Ce n'est pas une lutte de la classe ouvrière syrienne, l'unique force capable de renverser Assad sur une base progressiste, mais une lutte contre elle.
Des sections de la classe dirigeante appellent à agir selon des plans de guerre contre la Syrie, tel le sénateur américain, John McCain réclamant lundi des frappes aérienne contre la Syrie. Vendredi, le président français, Nicolas Sarkozy, a proposé la création d'une zone humanitaire en Syrie. Ceci fait écho aux appels lancés par le Conseil de sécurité de l'ONU pour un accès humanitaire « immédiat » - c'est-à-dire pour que les Etats-Unis et leurs alliés s'emparent de sections du territoire syrien afin d'approvisionner les rebelles pro-américains à l'intérieur du pays.
Les puissances étrangères sont en train de former l'opposition syrienne en Turquie voisine en livrant des armes par les frontières turco-syriennes, et les alliés des Etats-Unis, le Qatar et l'Arabie saoudite ont proposé un soutien financier aux « rebelles » syriens afin qu'ils achètent des armes. De plus, les services de renseignement militaire étrangers, dont des agents du MI6 britannique et du renseignement français, se trouvent déjà sur le sol syrien.
Il y a une semaine, à Homs, un général de l'Armée syrienne libre (ASL) a dit à Reuters : « L'aide de la France et des Etats-Unis nous est parvenue. » Il a ajouté, « Nous avons maintenant des armes et des missiles anti-aériens, et, grâce à Dieu, tout cela nous permettra de vaincre Bachar al-Assad. »
Le communiqué du NPA vise à dissimuler ces réalités élémentaires et, en attisant une indignation mal informée contre Assad, à désorienter et réduire l'opposition populaire à une nouvelle guerre. Il jour un rôle clé en manipulant l'opinion publique pour légitimer une intervention militaire sous couvert d'« aide humanitaire. » Cette ligne pro-impérialiste fait suite à son soutien l'année dernière à la guerre menée par les Etats-Unis et l'OTAN contre la Libye et qui a fait 80.000 victimes selon les forces soutenues par les Etats-Unis elles-mêmes.
En cela, le NPA ne fait que répéter la propagande réactionnaire assourdissante des médias bourgeois. Un sondage réalisé en février par l'Ifop a révélé que près de 50 pour cent de la population française est toujours opposée à une intervention militaire en Syrie. Toutefois, en mars dernier avant l'intervention de l'OTAN en Libye, seuls 36 pour cent étaient favorables à une intervention en Syrie. Ce changement ne reflète pas un enthousiasme populaire pour la guerre, il est plutôt la conséquence de ce que Jérôme Fourquet, directeur du département opinions de l'Ifop, a appelé de la « déformation et de [la] propagande manichéenne quotidienne, qui ont mécaniquement renforcé le camp interventionniste. »
Le soutien du NPA à la guerre impérialiste découle d'un changement fondamental, sur plusieurs décennies, de l'orientation politique des couches petites-bourgeoises aisées. Elles ont renoncé à leurs prétentions anti-impérialistes d'antan et dans le contexte des luttes révolutionnaires montantes de la classe ouvrière internationalement, elles adoptent à présent la politique d'austérité sociale et de guerre impérialiste de l'élite dirigeante
Avant les prochaines élections présidentielles et législatives françaises, le NPA est en quête d'alliances avec le Parti socialiste (PS), parti bourgeois de « gauche » et tout spécialement avec les partenaires de la coalition gouvernementale du PS - tels le Parti communiste et son candidat présidentiel, l'ancien ministre PS, Jean-Luc Mélenchon. (Voir aussi : « Elections françaises de 2012: le NPA prépare son adhésion à un gouvernement pro-austérité »)
Le candidat présidentiel du PS, François Hollande, a promis de maintenir la France dans le commandement intégré de l'OTAN. Il s'en est pris dernièrement à la Russie et à la Chine pour avoir bloqué le vote sur la Syrie au Conseil de sécurité de l'ONU, La « gauche » bourgeoise française et ses auxiliaires signalent ainsi leur volonté d'adhérer, en tant que partenaires subalternes, à la poussée des Etats-Unis de détruire les régimes bourgeois syrien et iranien et de mettre l'ensemble du Moyen-Orient sous hégémonie américaine.
Les affiliés internationaux du NPA du Secrétariat unifié pabliste sont eux-mêmes profondément impliqués dans le fonctionnement des forces d'« opposition » syriennes pro-impérialistes. Ainsi en octobre dernier, Gilbert Achar, avait assisté à une conférence organisée en Suède par le Conseil national syrien (CNS) et fortement encouragé le CNS à émettre des exigences pour que les puissances occidentales interviennent en Syrie. (Voir aussi : « France: La « gauche » petite-bourgeoise complote une intervention militaire en Syrie »)
Achcar avait dit au CNS que, dans des conditions appropriées, ce dernier pourrait faire le nécessaire pour une intervention étrangère en Syrie : « La réticence que nous pouvons voir aujourd'hui de la part des Etats occidentaux et régionaux quant à une intervention directe pourrait changer demain si les demandes d'intervention faites au nom de l'opposition syrienne venaient à se multiplier. »
La capacité d'Achcar à circuler sans encombre de réunions avec des agents droitiers pro-impérialistes tels le CNS à des réunions avec la direction du NPA reflète la profonde intégration politique de la « gauche » petite bourgeoise dans le camp de l'impérialisme. Ce n'est pas un hasard si le communiqué du NPA du 24 février appelle à ce que ces couches - les partis bourgeois de « gauche », la bureaucratie syndicale et les ONG françaises - soutiennent l'« opposition » pro-impérialiste syrienne.
Le NPA écrit, « Il est de la plus grande urgence que les organisations de gauche, le mouvement syndical et associatif prennent des initiatives pour venir en aide à la population syrienne, en aide à tous et toutes celles qui résistent dans des conditions effroyables, pour stopper l'impitoyable répression du pouvoir syrien. »
Bien qu'il n'ose le reconnaître, la proposition du NPA d'aider « tous ceux » qui s'opposent à Assad, l'aligne contre la classe ouvrière aux côtés des pivots de la contre révolution mondiale : les monarchies du Golfe persique, les bourgeoisies européennes et le Pentagone.
(Article original paru le 8 mars 2012)