{"157965":{"id":"157965","parent":"0","time":"1560874268","url":"http:\/\/newsnet.fr\/157965","source":"http:\/\/www.cadtm.org\/Notes-d-introduction-sur-l-ecofeminisme","category":"documentaires","title":"Notes d'introduction sur l'\u00e9cof\u00e9minisme","catalog-images":"1\/newsnet_157965_264868.jpg","image":"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_157965_264868.jpg","hub":"newsnet","url-explicit":"http:\/\/newsnet.fr\/art\/notes-d-introduction-sur-l-ecofeminisme","admin":"newsnet","views":"468","priority":"3","length":"32639","lang":"fr","content":"\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAnthropologue, ing\u00e9nieure, enseignante et activiste \u00e9cof\u00e9ministe espagnole, Yayo Herrero est l'une des chercheuses les plus influentes du milieu \u00e9cof\u00e9ministe et \u00e9cosocialiste au niveau europ\u00e9en.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'\u00e9cof\u00e9minisme est un courant de pens\u00e9e et un mouvement social qui explore les convergences et synergies possibles entre \u00e9cologisme et f\u00e9minisme. \u00c0 partir de ce dialogue, il vise \u00e0 partager et \u00e0 mettre en valeur la richesse conceptuelle et politique des deux mouvements afin que l'analyse des probl\u00e8mes auxquels chacun est confront\u00e9 s\u00e9par\u00e9ment gagne en profondeur, en complexit\u00e9 et en clart\u00e9 (Puleo, 2011). C'est une philosophie et une pratique qui d\u00e9fend le fait que le mod\u00e8le \u00e9conomique et culturel occidental s'est d\u00e9velopp\u00e9 en se fondant sur les bases mat\u00e9rielles et relationnelles qui soutiennent la vie et qui \u00ab s'est constitu\u00e9, s'est maintenu \u00e0 travers la colonisation des femmes, des peuples \u00ab \u00e9trangers \u00bb et de leurs terres, et de la nature \u00bb (Shiva et Mies, 1997 : 128).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe terme ecof\u00e9minisme appara\u00eet pour la premi\u00e8re fois en 1974 avec la publication du livre \u00ab Le f\u00e9minisme ou la mort \u00bb de Fran\u00e7oise D'Eaubonne. Elle soulignait qu'il existait une relation profonde entre la surpopulation, la destruction de la nature et la domination masculine et que pour sortir de la spirale suicidaire de production et de consommation d'objets superflus et \u00e9ph\u00e9m\u00e8res, de destruction de l'environnement et d'ali\u00e9nation du temps, il fallait remettre en question la relation entre les sexes. (Cavana, Puleo et Segura, 2004). Pour D'Eaubonne, le contr\u00f4le de son corps est le d\u00e9but d'une voie non consum\u00e9riste, \u00e9cologiste et f\u00e9ministe.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe premier \u00e9cof\u00e9minisme n'a pas suscit\u00e9 beaucoup d'int\u00e9r\u00eat en France, mais a trouv\u00e9 un certain \u00e9cho en Am\u00e9rique du Nord et en Australie, par exemple dans le travail de Ynestra King, qui propose une analyse int\u00e9ressante des diff\u00e9rents rapports de domination interconnect\u00e9s et de la position historique des femmes par rapport \u00e0 cette domination.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn outre, au cours des ann\u00e9es 70, des manifestations publiques de femmes de d\u00e9fense de la vie ont eu lieu dans plusieurs pays de la p\u00e9riph\u00e9rie. Le plus embl\u00e9matique a \u00e9t\u00e9 le mouvement Chipko en Inde. Dans le monde anglo-saxon \u00e9galement, de nombreux activismes f\u00e9ministes pacifistes se sont d\u00e9velopp\u00e9s, motiv\u00e9s par le lien entre les femmes et la d\u00e9fense de la vie. Par exemple, les manifestantes du Greenham Common ont exerc\u00e9 une grande pression autour des bases anglaises de missiles et de centres de recherche militaires, organisant des actes non violents, tels que le tissage de filets permettant de fermer les entr\u00e9es d'approvisionnement.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECes mouvements abordaient le probl\u00e8me des relations entre les humains et la nature par des visions tr\u00e8s diff\u00e9rentes, \u00e0 l'origine de plusieurs courants qui nous obligent \u00e0 parler d'\u00e9cof\u00e9minismes. En simplifiant la vari\u00e9t\u00e9 des propositions \u00e9cof\u00e9ministes, nous pourrions parler de deux courants : les \u00e9cof\u00e9minismes essentialistes et les \u00e9cof\u00e9minismes constructivistes (Cavana, Puleo et Segura, 2004).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes \u00e9cof\u00e9minismes essentialistes, \u00e9galement appel\u00e9s classiques, soutiennent que les femmes, en raison de leur capacit\u00e9 \u00e0 donner la vie, sont plus proches de la nature et ont tendance \u00e0 la pr\u00e9server. Ce courant a une approche gyn\u00e9cocentr\u00e9e et essentialiste qui a \u00e9t\u00e9 fortement rejet\u00e9 par le f\u00e9minisme de l'\u00e9galit\u00e9, qui niait ce lien naturel pour avoir servi \u00e0 l\u00e9gitimer la subordination des femmes aux hommes. Les \u00e9cof\u00e9ministes classiques accordent une plus grande valeur aux femmes et au f\u00e9minin et revendiquent une \u00ab f\u00e9minit\u00e9 sauvage \u00bb. Elles consid\u00e8rent les hommes comme une culture, au sens rousseauiste du terme, soit de la culture en tant que d\u00e9gradation du bon sauvage. Cet \u00e9cof\u00e9minisme pr\u00e9sente un fort int\u00e9r\u00eat pour la spiritualit\u00e9 et le mysticisme et d\u00e9fend l'id\u00e9e de la r\u00e9cup\u00e9ration du matriarcat primitif.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe premier \u00e9cof\u00e9minisme remet en question les hi\u00e9rarchies \u00e9tablies par la pens\u00e9e occidentale dichotomique, revalorisant des sujets jusque-l\u00e0 m\u00e9pris\u00e9s : la femme et la nature. Les premi\u00e8res \u00e9cof\u00e9ministes ont d\u00e9nonc\u00e9 les effets de la technoscience sur la sant\u00e9 des femmes et se sont confront\u00e9es au militarisme, \u00e0 la nucl\u00e9arisation et \u00e0 la d\u00e9gradation de l'environnement, en les interpr\u00e9tant comme des manifestations d'une culture sexiste. Petra Kelly est l'une des figures de ce mouvement.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECe premier \u00e9cof\u00e9minisme, critique de la masculinit\u00e9 h\u00e9g\u00e9monique, a \u00e9t\u00e9 suivi d'autres courants principalement du Sud. Certains d'entre eux consid\u00e9raient les femmes comme des d\u00e9tentrices du respect d\u00fb \u00e0 la vie. Ils accusent le \u00ab mauvais d\u00e9veloppement \u00bb occidental de provoquer la pauvret\u00e9 des femmes et des populations autochtones, premi\u00e8res victimes de la destruction de la nature. On trouve dans ce large courant Vandana Shiva, Mar\u00eda Mies ou Ivonne Guevara.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECritique envers l'essentialisme de l'\u00e9cof\u00e9minisme classique, \u00e9merge l'\u00e9cof\u00e9minisme constructiviste. Selon cette approche, la relation \u00e9troite entre les femmes et la nature est fond\u00e9e sur une construction sociale. C'est l'attribution des r\u00f4les et fonctions \u00e0 l'origine de la division sexuelle du travail, de la r\u00e9partition du pouvoir et de la propri\u00e9t\u00e9 dans les soci\u00e9t\u00e9s patriarcales, qui \u00e9veille cette conscience \u00e9cologique particuli\u00e8re des femmes. Cet \u00e9cof\u00e9minisme d\u00e9nonce la subordination de l'\u00e9cologie et des relations entre les individus \u00e0 l'\u00e9conomie et \u00e0 son obsession pour la croissance.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans cette perspective, Bina Agarwal (Agarwal, 1996) souligne que le r\u00f4le des femmes dans la d\u00e9fense de la nature est important car ce sont elles qui se soucient de l'approvisionnement en mat\u00e9riaux et en \u00e9nergie, non pas parce qu'elles aiment particuli\u00e8rement cette t\u00e2che ou en raison de pr\u00e9dispositions g\u00e9n\u00e9tiques, mais parce que ce sont elles qui sont oblig\u00e9es de garantir les conditions mat\u00e9rielles de subsistance.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESans soustraire la valeur de nombreuses contributions, analyses et luttes sociales issues d'\u00e9cof\u00e9minismes essentialistes, la pr\u00e9sente introduction est bas\u00e9e sur un \u00e9cof\u00e9minisme constructiviste. Cet \u00e9cof\u00e9minisme est redevable de tous les champs de pens\u00e9e dans lesquels le f\u00e9minisme a d\u00e9construit de nombreux dogmes dominants, montrant qu'il existe des moyens de comprendre l'histoire, l'\u00e9conomie, l'am\u00e9nagement du territoire, les sciences politiques ou la vie quotidienne qui permettent de construire d'autres formes de relations et d'organisation \u00e9mancipatrices pour tous.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMalgr\u00e9 les diff\u00e9rences d'approche, tous les \u00e9cof\u00e9minismes partagent la vision que la subordination des femmes aux hommes et l'exploitation de la Nature sont les deux faces d'une seule et m\u00eame pi\u00e8ce et r\u00e9pondent \u00e0 une logique commune : la logique de la domination et de la soumission de la vie \u00e0 la logique de l'accumulation.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EUn \u00e9cof\u00e9minisme critique et constructiviste\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'\u00e9cof\u00e9minisme r\u00e9vise les concepts cl\u00e9s de notre culture : \u00e9conomie, progr\u00e8s, science... Il consid\u00e8re que ces notions h\u00e9g\u00e9moniques ont montr\u00e9 leur incapacit\u00e9 \u00e0 mener les peuples vers une vie d\u00e9cente. C'est pourquoi il est n\u00e9cessaire de diriger nos regards vers un nouveau paradigme qui devrait \u00eatre inspir\u00e9 par les formes de relation pratiqu\u00e9es par les femmes. Du point de vue philosophique et anthropologique, l'\u00e9cof\u00e9minisme nous permet de nous reconna\u00eetre, de mieux nous situer et de mieux nous comprendre en tant qu'esp\u00e8ce, de mieux comprendre les causes et les r\u00e9percussions de la stricte division que la soci\u00e9t\u00e9 occidentale a \u00e9tablie entre Nature et Culture ou entre raison et corps ; cela nous permet de comprendre les risques que l'\u00eatre humain assume lorsqu'il interpr\u00e8te la r\u00e9alit\u00e9 selon une perspective r\u00e9ductionniste qui ne comprend pas l'ensemble, qui simplifie la complexit\u00e9 et rend invisible l'importance mat\u00e9rielle et symbolique des liens et des relations entre \u00eatres humains.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl d\u00e9veloppe une vision critique du mod\u00e8le social, \u00e9conomique et culturel actuel et propose une vision diff\u00e9rente de la r\u00e9alit\u00e9 quotidienne et de la politique, en donnant de la valeur aux \u00e9l\u00e9ments, pratiques et sujets que la pens\u00e9e h\u00e9g\u00e9monique a qualifi\u00e9s d'inf\u00e9rieurs et qui ont \u00e9t\u00e9 rendus invisibles.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl est possible que tous les \u00e9cof\u00e9minismes soient d'accord avec l'id\u00e9e de King que la contestation du patriarcat actuel est un acte de loyaut\u00e9 envers les g\u00e9n\u00e9rations futures, la vie et la plan\u00e8te elle-m\u00eame. (Agra, 1997) L'\u00e9cof\u00e9minisme a \u00e9t\u00e9 per\u00e7u par le mouvement f\u00e9ministe comme un risque possible, compte tenu de l'utilisation historique que le patriarcat a faite des liens entre les femmes et la nature (Cavana, Puleo et Segura, 2004). Cette relation impos\u00e9e a \u00e9t\u00e9 utilis\u00e9e comme argument pour maintenir la division sexuelle du travail. Dans le m\u00eame ordre d'id\u00e9es, Celia Amor\u00f3s met en garde contre ce qu'elle appelle la pratique d'une \u00ab moralit\u00e9 des griefs \u00bb (Amor\u00f3s, 1985) \u00e0 l'\u00e9gard des femmes. Pour Amor\u00f3s, cette morale des griefs se produit lorsque ce qui est demand\u00e9 et exig\u00e9 n'est pas le changement de statut des femmes, mais simplement le respect et la consid\u00e9ration pour les t\u00e2ches qu'elles accomplissent. Pour un \u00e9cof\u00e9minisme constructiviste, il ne s'agirait pas d'exalter les st\u00e9r\u00e9otypes f\u00e9minins, d'enfermer les femmes dans un espace de reproduction, m\u00eame visible, leur interdisant l'acc\u00e8s \u00e0 l'espace public. Il ne s'agit pas non plus de les rendre exclusivement responsables de l'\u00e9norme travail de protection de la plan\u00e8te et de la vie. Il s'agit de rendre la soumission visible, en soulignant les responsabilit\u00e9s et la coresponsabilit\u00e9 des hommes et des femmes dans le travail de survie.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESi le f\u00e9minisme a d\u00e9nonc\u00e9 le fait que la naturalisation des femmes a servi \u00e0 l\u00e9gitimer le patriarcat, l'\u00e9cof\u00e9minisme sugg\u00e8re que l'alternative n'est pas de d\u00e9naturaliser les femmes, mais de \u00ab renaturer \u00bb les hommes, en ajustant l'organisation politique, relationnelle, domestique et \u00e9conomique. aux conditions mat\u00e9rielles qui rendent l'existence possible. Une \u00ab renaturalisation \u00bb qui exige un changement de culture rendant l'\u00e9cod\u00e9pendance visible pour les femmes et les hommes (Herrero et al., 2006)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EQuelques bases conceptuelles\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECette section n'a pas pour but d'\u00e9puiser toute la gamme des questions relevant de l'\u00e9cof\u00e9minisme, telles que la d\u00e9construction et la reconstruction de vues \u00e9mancipatrices, la prise de conscience critique de la technologie et de la science, la critique du mythe du progr\u00e8s ind\u00e9fini, la bio\u00e9thique, le culte du travail, de la production ou de la conception de la richesse h\u00e9g\u00e9monique. Dans cette avanc\u00e9e, seuls ceux faisant partie du dialogue \u00e9tabli entre l'\u00e9conomie \u00e9cologique et l'\u00e9conomie f\u00e9ministe seront abord\u00e9s.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'\u00e9cof\u00e9minisme d\u00e9nonce le fait que les cycles de la vie humaine et les limites \u00e9cologiques \u00e9chappent aux pr\u00e9occupations de l'\u00e9conomie conventionnelle. Cette d\u00e9nonciation bouleverse les bases fondamentales du paradigme \u00e9conomique capitaliste. Il contribue \u00e0 d\u00e9manteler l'artifice th\u00e9orique qui s\u00e9pare l'humanit\u00e9 de la nature ; \u00e9tablit l'importance mat\u00e9rielle des liens et des relations ; il met l'accent sur l'immanence et la vuln\u00e9rabilit\u00e9 des corps et de la vie humaine ; et il accorde un r\u00f4le essentiel \u00e0 la production et \u00e0 la reproduction en tant qu'\u00e9l\u00e9ments indissociables du processus \u00e9conomique.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EUne \u00e9conomie qui pousse \u00e0 l'\u00e9cod\u00e9pendance et \u00e0 l'interd\u00e9pendance\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa vie des personnes a deux d\u00e9pendances in\u00e9vitables : celle que chaque personne a de la nature et celle qu'elle a des autres.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ENous, les \u00eatres humains obtenons ce dont nous avons besoin pour vivre de la nature : nourriture, eau, abri, \u00e9nergie, min\u00e9raux... Par cons\u00e9quent, nous nous disons \u00eatres \u00e9co-d\u00e9pendants : nous sommes la nature. Cependant, malgr\u00e9 la d\u00e9pendance \u00e9vidente que les gens ont de la Nature, l'\u00eatre humain dans les soci\u00e9t\u00e9s occidentales a \u00e9lev\u00e9 un mur symbolique entre lui et le reste du monde vivant, cr\u00e9ant un v\u00e9ritable ab\u00eeme ontologique entre la vie humaine et la plan\u00e8te sur laquelle elle se d\u00e9veloppe.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'id\u00e9e de progr\u00e8s est souvent li\u00e9e au d\u00e9passement de ce qui est per\u00e7u comme une limite. La domination sur la nature se traduit par l'obsession d'\u00e9liminer les obstacles qui emp\u00eachent la r\u00e9alisation de tout d\u00e9sir. Toute limite emp\u00eachant de progresser dans ce domaine est pr\u00e9sent\u00e9e comme un d\u00e9fi \u00e0 surmonter. La modification des limites de la nature a \u00e9t\u00e9 v\u00e9cue comme un signe de progr\u00e8s. La destruction, l'\u00e9puisement ou la d\u00e9t\u00e9rioration de ce dont nous avons besoin pour vivre est un des aspects cach\u00e9s de la suppression des limites.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMais aussi, chaque \u00eatre humain est profond\u00e9ment d\u00e9pendant des autres \u00eatres humains. Tout au long de la vie, mais surtout \u00e0 certains moments du cycle vital, les gens ne pourraient pas survivre si ce n'\u00e9tait parce que d'autres consacrent temps et \u00e9nergie \u00e0 prendre soin de leur corps. Cette seconde d\u00e9pendance, l'interd\u00e9pendance, est souvent plus cach\u00e9e que la pr\u00e9c\u00e9dente.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans les soci\u00e9t\u00e9s patriarcales, ceux qui se sont principalement occup\u00e9s du travail d'attention et de la satisfaction des besoins des corps vuln\u00e9rables, sont principalement des femmes, car c'est le r\u00f4le que la division sexuelle du travail leur impose. Ce travail est effectu\u00e9 dans l'espace priv\u00e9 et invisible des foyers, organis\u00e9 selon les r\u00e8gles de l'institution familiale. Si le corps et sa vuln\u00e9rabilit\u00e9 ne sont pas politis\u00e9s, nous ne pouvons pas voir la centralit\u00e9 du travail de ceux qui sont en charge de l'entretien et du soin des corps vuln\u00e9rables ou de la n\u00e9cessit\u00e9 pour la soci\u00e9t\u00e9 dans son ensemble, et bien s\u00fbr des hommes, d'en assumer la responsabilit\u00e9. Dans les soci\u00e9t\u00e9s occidentales, il est de plus en plus difficile de reproduire et de maintenir la vie humaine, car le bien-\u00eatre des personnes incarn\u00e9es dans leur corps n'est pas une priorit\u00e9 (Carrasco 2009). Assumer la finitude du corps, sa vuln\u00e9rabilit\u00e9 et ses besoins est essentiel pour comprendre l'essence interd\u00e9pendante de notre esp\u00e8ce, pour placer la r\u00e9ciprocit\u00e9, la coop\u00e9ration, les liens et les relations en tant que conditions sine qua non de l'humanit\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'ignorance de ces d\u00e9pendances mat\u00e9rielles (\u00e9co et interd\u00e9pendance) se traduit par la notion de production et de travail que g\u00e8re l'\u00e9conomie conventionnelle et qui a contribu\u00e9 \u00e0 nourrir le mythe de la croissance et le fantasme de l'individualit\u00e9. L'\u00e9cof\u00e9minisme, en les analysant ensemble, aide \u00e0 comprendre que la crise \u00e9cologique est aussi une crise de relations sociales.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EUne production qui ne prend pas en compte le soutien de la vie\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa r\u00e9duction de la valeur aux formes exclusivement mon\u00e9taires conditionne le champ des \u00e9tudes \u00e9conomiques. Cette r\u00e9duction \u00e9limine le champ d'\u00e9tude de l'\u00e9conomie de la complexit\u00e9 de la r\u00e9g\u00e9n\u00e9ration naturelle et de tout travail humain ne faisant pas partie de la sph\u00e8re commerciale. Faute d'\u00eatre comptabilis\u00e9s \u00e0 l'aune de l'argent, ils deviennent invisibles. La production devient exclusivement l'activit\u00e9 dans laquelle il y a augmentation du surplus social mesur\u00e9 exclusivement en termes mon\u00e9taires.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ERaisonner exclusivement dans l'univers abstrait des valeurs mon\u00e9taires a coup\u00e9 le cordon ombilical qui unit la nature et la reproduction quotidienne de la vie \u00e0 l'\u00e9conomie. Nous en sommes arriv\u00e9s \u00e0 l'absurdit\u00e9 d'utiliser un ensemble d'indicateurs qui, non seulement ne comptent pas comme richesse les biens et services essentiels \u00e0 la vie, mais qui encore consid\u00e8rent \u00e9galement la destruction elle-m\u00eame comme une richesse.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDu point de vue \u00e9cof\u00e9ministe, la production doit \u00eatre une cat\u00e9gorie li\u00e9e au maintien de la vie et au bien-\u00eatre des personnes (P\u00e9rez Orozco 2007), c'est-\u00e0-dire que ce qui est produit doit \u00eatre quelque chose qui r\u00e9pond aux besoins humains selon des crit\u00e8res d'\u00e9quit\u00e9. Aujourd'hui, la production d'artefacts ou de services socialement ind\u00e9sirables du point de vue des besoins et de la d\u00e9gradation de l'environnement est consid\u00e9r\u00e9e comme une production. De m\u00eame, on consid\u00e8re comme production ce qui n'est qu'une simple extraction et transformation de mat\u00e9riaux finis pr\u00e9existants. La distinction entre les productions socialement n\u00e9cessaires et socialement ind\u00e9sirables est essentielle et les indicateurs mon\u00e9taires \u00e0 utiliser (tels que le produit int\u00e9rieur brut) ne permettent pas de les diff\u00e9rencier.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn rendant visible la d\u00e9pendance de l'\u00e9conomie vis-\u00e0-vis de la nature et des œuvres li\u00e9es au soin de la vie humaine, les fronti\u00e8res entre production et reproduction s'effondrent, minant ainsi le patriarcat capitaliste.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003EUne vision \u00e9cof\u00e9ministe sur la notion de travail\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa notion de travail invent\u00e9e dans les soci\u00e9t\u00e9s industrielles est r\u00e9duite au travail accompli au sein de la sph\u00e8re commerciale en \u00e9change d'un salaire. Toutes les fonctions exerc\u00e9es dans l'espace de production domestique sans \u00eatre r\u00e9mun\u00e9r\u00e9es, bien que garantissant la reproduction sociale et les soins des corps sans \u00eatre nomm\u00e9es et bien qu'\u00e9videmment essentielles et exploitables, sont \u00e0 la fois garants de la survie et g\u00e9n\u00e9rateurs d'une \u00ab marchandise \u00bb tr\u00e8s sp\u00e9ciale : la main d'œuvre (Carrasco 2009).\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa nouvelle \u00e9conomie a transform\u00e9 le travail et la terre en marchandises. Ceux-ci ont commenc\u00e9 \u00e0 \u00eatre trait\u00e9s comme s'ils avaient \u00e9t\u00e9 produits pour \u00eatre vendus. Mais ni la terre ni le travail ne sont des marchandises car, ou ils n'ont pas \u00e9t\u00e9 produits -comme dans le cas de la terre- ou ils n'ont pas \u00e9t\u00e9 produits pour \u00eatre vendus -comme c'est le cas avec les gens. Polanyi a averti que cette fiction \u00e9tait aussi efficace pour l'accumulation et l'obtention d'avantages que pour le maintien de la vie humaine. Vous pouvez comprendre la port\u00e9e de cette grande transformation si vous vous rappelez que le travail n'est rien de plus qu'un synonyme d'humain et que la terre n'est qu'un synonyme de nature. (Polanyi, 1992)\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa nouvelle notion de travail a exig\u00e9 que le corps s'adapte \u00e0 la r\u00e9gularit\u00e9 et \u00e0 l'automatisme exig\u00e9s par la discipline du travail capitaliste (Federici 2010). Le corps devient une machine de travail, renfor\u00e7ant les notions pr\u00e9c\u00e9dentes \u00e9tablies par la modernit\u00e9. La r\u00e9g\u00e9n\u00e9ration et la reproduction de ces corps ne rel\u00e8vent pas de la responsabilit\u00e9 de l'\u00e9conomie qui les ignore, les rel\u00e9guant \u00e0 l'espace domestique. L\u00e0-bas, hors du regard du public, les femmes sont oblig\u00e9es d'assumer ces fonctions d\u00e9valoris\u00e9es, bien qu'elles soient aussi essentielles pour la survie dans la dignit\u00e9 que pour la reproduction de la production capitaliste elle-m\u00eame (Carrasco 2009). De ce point de vue, nous pouvons d\u00e9fendre le fait que les femmes jouent un r\u00f4le de m\u00e9diateur vis-\u00e0-vis de la nature au profit des hommes.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EMies propose de reformuler le concept de travail en le d\u00e9finissant comme des t\u00e2ches d\u00e9di\u00e9es \u00e0 la production de la vie. Cristina Carrasco (Carrasco, 2001) approfondit cette proposition lorsqu'elle souligne la n\u00e9cessit\u00e9 de r\u00e9organiser toutes les t\u00e2ches et de responsabiliser les hommes et la soci\u00e9t\u00e9 dans son ensemble pour le travail accompli par les femmes au cours de l'histoire. C'est un travail r\u00e9p\u00e9titif et cyclique qui prend beaucoup de temps, ce qui permet aux hommes - et \u00e0 certaines femmes - d'exercer des activit\u00e9s moins essentielles et souvent n\u00e9fastes pour eux-m\u00eames et pour la nature. De cette mani\u00e8re, on voit bien la rupture de la dichotomie qui s\u00e9pare le travail r\u00e9duit en emploi du reste des travaux soutenant la vie au quotidien.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDe ce point de vue, le travail ne peut \u00eatre productif que dans le sens de la production d'un exc\u00e9dent \u00e9conomique, alors qu'il peut obtenir, extraire, exploiter et s'approprier le travail n\u00e9cessaire \u00e0 la vie ou \u00e0 la subsistance. La production de la vie est une condition pr\u00e9alable \u00e0 la production commerciale. Le travail des femmes est essentiel pour produire leurs propres conditions de production. Par cons\u00e9quent, le capitalisme ne peut \u00eatre maintenu sans le patriarcat.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELa valorisation du prendre soin am\u00e8ne l'\u00e9conomie f\u00e9ministe \u00e0 inventer l'id\u00e9e de soutien \u00e0 la vie humaine (Carrasco, 2001) selon un concept qui repr\u00e9sente un processus historique complexe, dynamique et multidimensionnel de satisfaction des besoins qui doivent \u00eatre reconstruits en permanence, ce qui n\u00e9cessite des ressources mat\u00e9rielles mais \u00e9galement des contextes et des relations de soins, fournis en grande partie par du travail non r\u00e9mun\u00e9r\u00e9 accompli dans les foyers. \u00c0 notre avis, ce concept est li\u00e9 \u00e0 l'id\u00e9e plus large de durabilit\u00e9 \u00e9cologique et sociale. Selon Bosch, Carrasco et Grau (2005 : 322), nous comprenons la durabilit\u00e9 :\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\"En tant que processus qui fait non seulement r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 la possibilit\u00e9 r\u00e9elle que la vie continue -sur le plan humain, social et \u00e9cologique-, mais \u00e0 ce que ce processus signifie \u00e9galement la mise en place de conditions de vie, de niveaux de vie ou de qualit\u00e9 de vie acceptables pour toute la population Une durabilit\u00e9 qui suppose donc une relation harmonieuse entre l'humanit\u00e9 et la nature, et entre humaine et humain, il sera donc impossible de parler de durabilit\u00e9 si elle n'est pas accompagn\u00e9e d'\u00e9quit\u00e9 \u00bb.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003ERecomposer un espace de vie s\u00fbr pour l'humanit\u00e9 depuis l'\u00e9cof\u00e9minisme\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELes dimensions \u00e9cologique et f\u00e9ministe sont essentielles pour transformer la conception et la gestion du territoire et pour r\u00e9organiser les temps des gens... Sans elles, il est impossible d'inicier un mod\u00e8le compatible avec la biosph\u00e8re et de tenter de r\u00e9pondre \u00e0 toutes les formes d'in\u00e9galit\u00e9. Vous trouverez ci-dessous une br\u00e8ve description de certaines lignes directrices essentielles pour guider, d'un point de vue \u00e9cof\u00e9ministe, la transition vers un mod\u00e8le \u00e9conomique, culturel et politique permettant la durabilit\u00e9 de la vie humaine.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe point de d\u00e9part est la r\u00e9duction in\u00e9vitable de l'extraction et de la pression sur les cycles naturels. Sur une plan\u00e8te aux limites d\u00e9j\u00e0 d\u00e9pass\u00e9es, la diminution de la sph\u00e8re mat\u00e9rielle de l'\u00e9conomie mondiale n'est plus une option mais un fait. Cette adaptation peut se produire \u00e0 travers la lutte pour l'utilisation de ressources en diminution ou \u00e0 travers un processus de r\u00e9ajustement d\u00e9cid\u00e9 et anticip\u00e9 par des crit\u00e8res d'\u00e9quit\u00e9.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ESi l'on veut aborder une r\u00e9duction de la pression sur la biosph\u00e8re dans une perspective qui donne la priorit\u00e9 au bien-\u00eatre de la population, cela nous oblige \u00e0 proposer un changement de cap radical. Nous oblige \u00e0 promouvoir mat\u00e9riellement une culture de suffisance et d'autonomie, de parier sur la d\u00e9localisation de l'\u00e9conomie et la mise en place de circuits de commercialisation courts, de restaurer une bonne partie de la vie rurale, de r\u00e9duire les transports et la vitesse, d'entreprendre une distribution radicale de la richesse et de placer la reproduction quotidienne de la vie et du bien-\u00eatre au centre des int\u00e9r\u00eats. L'\u00e9conomie conventionnelle valorise exclusivement l'\u00e9conomie mon\u00e9taire et formalise l'abstraction de l'Homo economicus en tant que sujet \u00e9conomique (My economy). \u00c0 l'inverse de cette conception, l'\u00e9cof\u00e9minisme est bas\u00e9 sur \u00ab We economy \u00bb, une \u00e9conomie ax\u00e9e sur la satisfaction des besoins collectifs. Il s'agit de rechercher de nouvelles formes de socialisation, d'organisation sociale et \u00e9conomique permettant de se d\u00e9barrasser d'un mod\u00e8le de d\u00e9veloppement qui privil\u00e9gie les avantages mon\u00e9taires par rapport au maintien de la vie.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EQuitter la logique androcentrique et biocide nous oblige \u00e0 r\u00e9pondre aux questions in\u00e9vitables : Quelles sont les n\u00e9cessit\u00e9s auxquelles il convient de r\u00e9pondre pour tout le monde ? Quelles sont les productions n\u00e9cessaires et possibles pour qu'elles soient satisfaites ? Quels sont les emplois socialement n\u00e9cessaires pour cela ?\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ER\u00e9pondre \u00e0 ces questions implique un changement radical de l'\u00e9conomie, de la politique et de la culture. Il s'agit donc d'aborder un processus de r\u00e9organisation du mod\u00e8le productif et de toutes les \u00e9poques et de tous les travaux du peuple. Aborder cette transition selon des crit\u00e8res d'\u00e9quit\u00e9 implique de traiter de la redistribution et de la r\u00e9partition de la richesse, ainsi que de la reconceptualiser. Sur une plan\u00e8te physiquement limit\u00e9e, dans laquelle une croissance \u00e9conomique illimit\u00e9e n'est pas possible, la justice est directement li\u00e9e \u00e0 sa distribution et \u00e0 sa r\u00e9partition. L'acc\u00e8s \u00e0 des niveaux de vie d\u00e9cents d'une bonne partie de la population se fait, \u00e0 la fois par une r\u00e9duction drastique de la consommation de ceux qui exercent une plus grande pression mat\u00e9rielle sur les territoires par leurs modes de vie.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EL'\u00e9cof\u00e9minisme impr\u00e8gne peu \u00e0 peu l'analyse d'autres mouvements sociaux et politiques. Nous pensons que cette vision est essentielle pour mener une analyse mat\u00e9rielle compl\u00e8te du m\u00e9tabolisme social et \u00e9tablir des diagnostics plus pr\u00e9cis de la crise civilisationnelle. Ce regard est essentiel pour aider \u00e0 concevoir les transitions n\u00e9cessaires vers une soci\u00e9t\u00e9 plus juste, compatible avec les limites de la nature.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cb\u003ER\u00e9f\u00e9rences\u003C\/b\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cul\u003E\u003Cli\u003EAgarwal, B. (1996) : \"El debate sobre las relaciones entre g\u00e9nero y ecolog\u00eda\". 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