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Le gar\u00e7on fait le terrassement pour installer une pergola qui servira de \u003Ci\u003E\u00ab lieu de convivialit\u00e9 \u00bb\u003C\/i\u003E, pr\u00e9cise Jean-Luc. \u003Ci\u003E\u00ab Arnaud est autonome, il m\u00e8ne son chantier comme le ferait un artisan. L'ann\u00e9e derni\u00e8re, il a fait un banc forg\u00e9 latt\u00e9 de bois, c'\u00e9tait superbe, les gens pensaient que c'\u00e9tait un artisan qui l'avait fabriqu\u00e9. \u00c7a redore son blason ! \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EArnaud est l'un des trente adolescents qui fr\u00e9quentent les Ateliers de Bentenac, un centre m\u00e9dico-social d'accueil de jour situ\u00e9 \u00e0 Mauguio, pr\u00e8s de Montpellier. En rupture dans leur scolarit\u00e9, leur prise en charge habituelle ou leur entourage, ils peuvent venir ici au maximum 90 jours dans l'ann\u00e9e, et sont rarement plus d'une douzaine en m\u00eame temps.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EJean-Luc Charrignon a travaill\u00e9 vingt-quatre ans dans l'industrie. \u00c0 Bentenac, ses journ\u00e9es sont partag\u00e9es entre les projets des jeunes, le matin, et son activit\u00e9 d'artisan coutelier et ferronnier, l'apr\u00e8s-midi. Pour son premier ouvrage en m\u00e9tal, Dorian a choisi un motif de dauphin et Jean-Luc lui a montr\u00e9 comment souder. Mais il a du mal \u00e0 rester concentr\u00e9. \u003Ci\u003E\u00ab Je vais pas lui faire croire qu'il a tout fait tout seul, alors que non\u003C\/i\u003E, avertit Jean-Luc. \u003Ci\u003EMais le but, c'est qu'il en tire quelque chose. \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ELa rencontre dans la pratique\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans l'atelier d'\u00e9b\u00e9nisterie, Fran\u00e7ois fignole l'un des nombreux bijoux en bois qu'il a confectionn\u00e9s en vue du march\u00e9 de No\u00ebl. Autour de lui, un m\u00e9lange d'objets r\u00e9alis\u00e9s sur commande par Yoann Fenouillet, l'\u00e9b\u00e9niste, et de cr\u00e9ations des jeunes : petits meubles, instruments de musique, jeux, enceintes pour \u00e9couter de la musique... Sur une \u00e9tag\u00e8re, une collection de robots de bois. \u003Ci\u003E\u00ab Je leur fais faire au d\u00e9but pour voir comment ils se d\u00e9brouillent avec les outils \u00bb\u003C\/i\u003E, explique Yoann. Avant de choisir leur projet, les jeunes peuvent feuilleter un album des objets r\u00e9alis\u00e9s les ann\u00e9es pr\u00e9c\u00e9dentes.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ci\u003E\u00ab Ils ne veulent surtout pas copier, mais \u00e7a les inspire\u003C\/i\u003E, pr\u00e9cise Yoann. \u003Ci\u003EJe n'impose pas d'objet ni de technique : j'essaie de les faire r\u00e9fl\u00e9chir. Ils dessinent des croquis. On fait beaucoup d'alliages avec le m\u00e9tal. Ceux qui repartent avec la table du salon ou le meuble t\u00e9l\u00e9 command\u00e9 par leurs parents sont tellement fiers ! \u00bb\u003C\/i\u003E Les salaires et autres charges fixes des ateliers sont pay\u00e9s \u00e0 moiti\u00e9 par l'Agence r\u00e9gionale de sant\u00e9 et la S\u00e9cu, et \u00e0 moiti\u00e9 par les productions des artisans.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ci\u003E\u00ab L'id\u00e9e, c'est que les jeunes soient accompagn\u00e9s par des adultes qui sont pris dans cette r\u00e9alit\u00e9 de production \u00bb\u003C\/i\u003E, explique Fr\u00e9d\u00e9ric Vassard, responsable du service d'accueil et des ateliers. \u003Ci\u003E\u00ab On n'est pas issus du m\u00e9dico-social, on est brut de d\u00e9coffrage \u00bb\u003C\/i\u003E, traduit Jean-Luc, qui ajoute qu'il ne regrette rien de ce statut original, \u003Ci\u003E\u00ab sauf la paye ! \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cspan class=\"philum ic-img2\"\u003E\u003C\/span\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003E\u00ab Les espaces sont fabriqu\u00e9s par des jeunes et des \u00e9ducateurs \u00bb\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDehors, le psychologue du service s'affaire, une scie \u00e0 la main. Deux jeunes et une \u00e9ducatrice travaillent avec le tracteur. Il faut s'occuper des animaux, moutons et volailles, dont les produits participent \u00e0 la composition des repas. Les jeunes les plus autonomes vont parfois aider les mara\u00eechers. Et puis, il y a l'am\u00e9nagement et l'entretien du site : \u003Ci\u003E\u00ab \u00c0 part la maison, tous les espaces ont \u00e9t\u00e9 fabriqu\u00e9s par des jeunes et des \u00e9ducateurs\u003C\/i\u003E, indique Fr\u00e9d\u00e9ric. \u003Ci\u003E\u00c7a prend du temps, mais c'est une appropriation de l'outil de travail. \u00bb\u003C\/i\u003E La maison ? C'est le noyau de l'association Etap (Espace transitionnel pour l'acc\u00e8s des jeunes \u00e0 une place sociale et professionnelle), qui comprend quatre activit\u00e9s : l'accueil de jour, l'artisanat, le mara\u00eechage, et un lieu de vie et d'accueil o\u00f9 sont plac\u00e9s des enfants dans le cadre de la protection de l'enfance.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EPour Am\u00e9lie Simac et Alexa Dourrieu, permanentes au lieu de vie et d'accueil, la journ\u00e9e a d\u00e9marr\u00e9 sur les chapeaux de roue. En plus de la routine du matin - petit-d\u00e9jeuner pour tout le monde, transport des enfants vers leurs \u00e9tablissements scolaires - il faut g\u00e9rer l'impr\u00e9vu : un incident impliquant l'un des jeunes de la maison. Am\u00e9lie ramasse un bout de tartine au pied de la chaise haute de sa fille et se d\u00e9p\u00eache de partir, apr\u00e8s avoir pr\u00e9venu sa coll\u00e8gue : \u003Ci\u003E\u00ab \u00c7a sent le pipi de chat dans l'autre pi\u00e8ce, je crois que la chatte a confondu le tapis avec sa liti\u00e8re. \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EIl est juste 10 h, et Raffaela, la ma\u00eetresse de maison, commence \u00e0 pr\u00e9parer le repas de midi. Le b\u00e2timent est divis\u00e9 entre les salles communes, et des espaces r\u00e9serv\u00e9s au lieu de vie et d'accueil, afin de pr\u00e9server l'intimit\u00e9 des enfants qui y vivent. Certaines pi\u00e8ces sont coquettes et confortables, d'autres m\u00e9riteraient un coup de neuf - comme dans n'importe quelle maison r\u00e9nov\u00e9e par ses habitants, au gr\u00e9 du temps et des moyens dont ils disposent. \u003Ci\u003E\u00ab Les choses ne sont pas parfaites\u003C\/i\u003E, commente Alexa. \u003Ci\u003EOn a un extincteur, des sorties de secours, mais sinon, c'est comme une vraie maison. On tient beaucoup \u00e0 \u00e7a. \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003E\u00ab Ne pas devenir un lieu sp\u00e9cialis\u00e9 \u00bb\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ECinq adultes se relaient aupr\u00e8s de cinq enfants et adolescents, en situation de handicap ou pas. \u003Ci\u003E\u00ab Leur seul point commun, c'est qu'ils sont plac\u00e9s\u003C\/i\u003E, pr\u00e9cise Alexa. \u003Ci\u003EC'est pour nous hyper important d'avoir un public h\u00e9t\u00e9rog\u00e8ne, afin de ne pas devenir un lieu sp\u00e9cialis\u00e9. \u00bb\u003C\/i\u003E Les jours de semaine, les enfants sont au lyc\u00e9e, en Itep (Institut th\u00e9rapeutique \u00e9ducatif et p\u00e9dagogique), \u00e0 l'\u00e9cole... \u003Ci\u003E\u00ab Nous, on est l\u00e0 sur des temps familiaux\u003C\/i\u003E, explique Alexa. \u003Ci\u003EIls rentrent, ils go\u00fbtent, on leur pr\u00e9pare \u00e0 manger le soir... \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EEn leur absence, les \u00e9ducatrices ne ch\u00f4ment pas entre les r\u00e9unions, les relations avec les professionnels qui interviennent dans le suivi des jeunes, l'organisation des vacances, mais aussi le m\u00e9nage, les lessives, l'entretien de la maison... Les cinq adultes passent ensemble la journ\u00e9e du lundi, \u003Ci\u003E\u00ab pour faire les r\u00e9unions et rendre concr\u00e8te l'\u00e9quipe aux yeux des jeunes\u003C\/i\u003E, poursuit Alexa. \u003Ci\u003ESinon, on travaille deux par deux. \u00bb\u003C\/i\u003E Les permanences \u00e0 la maison durent quatre \u00e0 cinq jours. Chaque adulte a six jours de pause toutes les cinq semaines.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EBentenac n'a pas toujours \u00e9t\u00e9 organis\u00e9 ainsi. En 1983, Jean-Fran\u00e7ois et Gis\u00e8le Costes, \u00e9ducateurs sp\u00e9cialis\u00e9s, ach\u00e8tent la petite maison pour y vivre et y accueillir des enfants atteints de troubles du comportement, sous l'agr\u00e9ment d\u00e9partemental d'assistants maternels. Ce n'est que vingt ans plus tard que la maison deviendra Lieu de vie et d'accueil. Le mara\u00eechage, l'artisanat, l'accueil de jour, se construiront au fur et \u00e0 mesure.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003EFonctionnement horizontal et salaires \u00e9gaux\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELe d\u00e9part du couple fondateur a provoqu\u00e9 plusieurs ann\u00e9es d'instabilit\u00e9. Deux \u00e9ducatrices ont pris le relais, avec comme objectif de trouver un nouveau couple qui ferait de Bentenac \u00e0 la fois son \u00ab chez lui \u00bb, et son m\u00e9tier. Mais aucun n'est rest\u00e9. Ces \u00e9checs ont abouti \u00e0 la construction d'un fonctionnement horizontal, avec cinq permanents \u00e9gaux en salaires et en responsabilit\u00e9s. Alexa a d\u00e9couvert Bentenac au cours de ses \u00e9tudes. Elle y a effectu\u00e9 un stage d'un an, avant de rejoindre l'\u00e9quipe de permanents. \u003Ci\u003E\u00ab Le projet de lieu de vie, c'est de la politique au sens premier du terme : organiser la cit\u00e9, permettre \u00e0 chacun de s'exprimer au dedans, et ensuite d'exister au-dehors\u003C\/i\u003E, estime-t-elle. \u003Ci\u003EPour moi, c'est plus qu'un travail. C'est un engagement. \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EDans certains lieux de vie et d'accueil, les permanents ont leur domicile sur place. Ce n'est pas le cas \u00e0 Bentenac, dont les adultes ont souvent l'impression de mener une \u003Ci\u003E\u00ab double-vie \u00bb\u003C\/i\u003E, comme dit Am\u00e9lie. \u003Ci\u003E\u00ab On se pose plein de questions : dans quel jardin je vais faire le potager ? Est-ce que je peux avoir un animal ? Et comment vivre en couple ? \u00bb\u003C\/i\u003E Lorsque Am\u00e9lie est de permanence, sa fille dort aussi sur place. \u003Ci\u003E\u00ab Nous ne sommes pas entre les murs d'une institution\u003C\/i\u003E, souligne Alexa. \u003Ci\u003ENos conjoints ou conjointes, nos amis, peuvent venir. \u00bb \u00ab Il faut qu'on ait plaisir \u00e0 vivre ici, que tout ne se joue pas autour des enfants qui nous sont confi\u00e9s \u00bb\u003C\/i\u003E, ajoute Am\u00e9lie.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003E\u00ab Partager quelque chose de v\u00e9ritable, sans mise en sc\u00e8ne p\u00e9dagogique \u00bb\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EAu quotidien, les \u00e9ducatrices partagent des \u00e9changes et coups de main avec leurs coll\u00e8gues de l'accueil de jour [\u003Ca href=\"#nb1\" id=\"nh1\"\u003E1\u003C\/a\u003E]. Il y a aussi Maurice, le voisin, qui \u00e9tait l\u00e0 bien avant la naissance du lieu, et dont l'immense potager donne directement sur la terrasse de la maison... \u003Ci\u003E\u00ab C'est le papi de Bentenac\u003C\/i\u003E, dit Alexa. \u003Ci\u003EIl passe No\u00ebl avec nous, et il a plein d'histoires \u00e0 raconter ! \u00bb\u003C\/i\u003E Pour la jeune \u00e9ducatrice, conna\u00eetre la m\u00e9moire du lieu o\u00f9 elle travaille est fondamental.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u00c0 l'heure du caf\u00e9, apr\u00e8s un repas agit\u00e9, les adultes et quelques ados partagent un moment de calme. Les \u00e9ducatrices de l'accueil de jour s'organisent : Sophie va cuire de la confiture avec deux enfants. Adeline va faire les joints du carrelage d'une nouvelle pi\u00e8ce de stockage avec trois jeunes. \u003Ci\u003E\u00ab La p\u00e2tisserie, la ma\u00e7onnerie... Tout cela fait un m\u00e9dia entre les jeunes et nous\u003C\/i\u003E, commente Adeline Lannoy en pr\u00e9parant le mortier. \u003Ci\u003EOn est pris par ce qu'il y a \u00e0 faire, plut\u00f4t que de chercher \u00e0 les occuper ou \u00e0 leur parler de je ne sais quoi. \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003EC'est l'un des grands principes mis en application par l'Etap, que Fr\u00e9deric r\u00e9sume ainsi : \u003Ci\u003E\u00ab Il y a, sur le site, une vie et un d\u00e9sir qui pr\u00e9c\u00e8dent l'arriv\u00e9e des jeunes. Les \u00e9ducateurs ont des choses \u00e0 faire, que le jeune aille bien ou pas. C'est diff\u00e9rent de la vie institutionnelle classique, qui tourne autour des besoins des jeunes. L\u00e0, les enfants arrivent dans un contexte o\u00f9 tout n'est pas \u00e0 leur mesure, et en m\u00eame temps, on leur redonne la possibilit\u00e9 d'\u00eatre actifs, d'avoir des envies. Ils partagent quelque chose de v\u00e9ritable avec les adultes, sans mise en sc\u00e8ne p\u00e9dagogique : ils font quelque chose d'utile, et qui va rester. \u00bb\u003C\/i\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003ELisa Giachino (L'\u00e2ge de faire)\u003Cbr \/\u003E\nPhotos : \u00a9Les Ateliers de Bentenac\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cimg style=\"max-width:100%\" src=\"http:\/\/newsnet.fr\/img\/newsnet_168807_c124a1.jpg\" \/\u003E Cet article est tir\u00e9 du num\u00e9ro d'octobre 2019 du magazine \u003Ca href=\"https:\/\/lagedefaire-lejournal.fr\/travail-social-cest-pas-triste\"\u003EL'\u00e2ge de faire\u003C\/a\u003E, partenaire de \u003Ci\u003EBasta !\u003C\/i\u003E. Son dossier est consacr\u00e9 au travail social.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Cbig\u003ENotes\u003C\/big\u003E\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E[\u003Ca href=\"#nh1\" id=\"nb1\"\u003E1\u003C\/a\u003E] Le service comprenant quatre \u00e9ducatrices et un \u00e9ducateur, nous utilisons ici le f\u00e9minin.\u003C\/p\u003E\u003Cp\u003E\u003Ca href=\"http:\/\/www.bastamag.net\/Dans-un-centre-d-accueil-pour-jeunes-en-difficultes-Ils-font-quelque-chose-d\"\u003Ebastamag.net\u003C\/a\u003E\u003C\/p\u003E","_links":[]}}