L'estimatif donné mi-janvier par les «gilets jaunes» de la répression qu'ils ont subie - entre 2000 et 3000 blessés, 6000 interpellations sans compter les peines d'emprisonnement - souligne le déchainement de l'arbitraire et des violences policière. L'état d'urgence mis en place par le PS et continué sous Macron a servi à ériger un État policier qui tente de saborder les droits démocratiques afin de réprimer l'opposition des travailleurs.
Mercredi 13 février, une marche a rassemblé 350 personnes à Argenteuil près de Paris en hommage à Sébastien Maillet qui a eu la main arrachée près de l'Assemblée nationale lors de l'acte 13 des gilets jaunes samedi dernier. Le père et la sœur de Sébastien n'ont «pas souhaité évoquer son état de santé, son état d'esprit, ni les circonstances de sa blessure», selon sa sœur Sandra qui a ajouté, «Je suis en colère contre ce qui se passe, je voudrais que toute cette violence s'arrête, qu'il n'y ait plus de telles armes utilisées. Malheureusement, il y aura d'autres yeux, d'autres mains ».
Jérôme Rodriguez l'un des proches d'Eric Drouet qui a perdu son œil durant l'acte 11 était aussi présent lors de cette manifestation.
Les réseaux sociaux ont permis de relayer les blessures subies par les «gilets jaunes» pendant les manifestations ou les blocages de certains lieux: «Bilan de la répression policière depuis 2 mois contre les GiletsJaunes : 6000 interpellations, 2000 blessés, des yeux crevés, des mains arrachées, des mâchoires explosées, des jeunes gens défigurés, des Français gazés et matraqués».
Ces chiffres ont été reconnus par le collectif «Désarmons-les!», qui évoque 82 blessés graves et entre 2000 et 3000 personnes blessés en «n'incluant que les blessures dues aux forces de l'ordre». A titre de comparaison, le Service de santé des armées établit à 620 le nombre de militaires blessés sur la période 2007-2016.
Ceci souligne le rôle politiquement criminel joué par l'Etat face à l'opposition des travailleurs au diktat des banques et des riches. Macron n'imposer sa politique qu'à travers un appareil policier qui se permet de mutiler les «gilets jaunes», de les placer de façon injustifiée en garde à vue. La justice quant à elle ne protège pas leurs droits mais impose des peines d'emprisonnement remarquable à des personnes qui essaient de se défendre face aux violences policières.
Dernièrement un boulanger a été placé en garde à vue et va devoir s'expliquer devant un magistrat pour avoir refusé de servir un policier. Durant l'acte 12, deux policiers ont souhaité prendre un café à la boulangerie de la Maison Landemaine, mais le boulanger leur a dit qu'il leur refuserait l'accès s'ils étaient armés. Interrogé par le fonctionnaire de police pour savoir s'il voyait ou non une arme, le boulanger a répondu: «Je ne sais pas, je vous préviens juste».
«Donc c'est bon, on peut passer», a insisté le policier. « Si vous n'avez pas d'arme, oui », a répété le boulanger. « Je crois que je vais aller ailleurs, et à un autre moment de la journée, je vais aussi regarder ailleurs », a réagi le policier, avant de partir.
Le boulanger a été placé en garde à vue mardi matin, à 9h40 pour «refus de vente et outrage sur personne dépositaire de l'ordre public». Sa garde à vue avait été prolongée dans la soirée. Il lui est reproché d'avoir voulu assurer la sécurité de l'établissement compte tenu à des tensions qui avaient lieu dans la manifestation parisienne lorsqu'il a eu l'altercation avec le policier.
Autre fait marquant aura été le verdict rendu mercredi de trois ans d'emprisonnement dont un avec sursis avec le maintien en détention de Christophe Dettinger, ancien champion de boxe, pour être intervenu pour protéger une manifestante que la police frappait au sol. Dettinger utilisa ses poings contre des policiers lourdement armés et casqués qui chargeaient les manifestants et leur tiraient des lacrymogènes.
Après que des vidéos aient circulé de Dettinger frappant les CRS, le gouvernement avait lancé une chasse à l'homme et perquisitionné chez Dettinger. Ce dernier s'est rendu à la police et a été maintenu en cellule jusqu'à son procès qui s'est tenu mercredi.
Dettinger affirme être «venu pacifiquement» manifester, en famille, comme lors des précédentes mobilisations, mais il a reconnu ne pas avoir pu se contrôler après avoir «vu des gendarmes matraquer un jeune homme et une femme au sol.... Une fois de plus, on était parqués, nassés, gazés pour rien». La vue d'une manifestante se faisant matraquer par un gendarme aurait déclenché sa colère: «Quand je vois une injustice, j'y vais, je suis comme ça. Dans le métro, ça aurait été pareil.»
La justice a prononcé cette peine malgré le large soutien dont jouit Dettinger auprès des travailleurs et des jeunes, notamment parmi les «gilets jaunes». Les principales victimes dans cette affaire ne sont pas les CRS frappés par Dettinger, mais Dettinger et les milliers de travailleurs et de jeunes que les forces de l'ordre attaquent et interpellent sans relâche.
Ces violences et l'arbitraire des policiers auraient été impossibles sans la politique autoritaire du gouvernement Macron et avant lui du PS. Le PS a imposé l'état d'urgence sous couvert le lutte antiterroriste, alors que l'État mobilisait et instrumentalisait ces mêmes réseaux islamistes pour mener sa guerre en Syrie. Quelques semaines après l'imposition de l'état d'urgence, la police l'employait pour mener des perquisitions et imposer des assignations à résidence contre des manifestantss contre la loi El Khomri.
Menant une partie du programme de l'extrême droite, Hollande avait tenté d'inscrire dans la constitution l'état d'urgence et la déchéance de la nationalité pour fasciser la société avant de reculer face à l'opposition.
Afin d'accélérer les attaques contre les droits démocratiques et les acquis sociaux dans un contexte de montée de la lutte des classes à l'échelle internationale, Macron avait applaudi durant sa tournée d'été en Vendée le rôle militariste et répressif de Clemenceau au début du 20e siècle. En tant que ministre de l'Intérieur, les travailleurs surnommaient Clemenceau «le briseur de grèves».
Le WSWS avait expliqué: «La répression des mutineries anti-guerre qui ont secoué l'armée française pendant la révolution russe de 1917, qu'évoquait Macron, a largement contribué à faire monter dans la bourgeoisie l'étoile politique du militaire qui a dirigé cette répression, le général Philippe Pétain, le futur maréchal et dictateur fasciste.»
En novembre Macron avait salué le dictateur collaborationniste Philippe Pétain. Le chef du régime Vichy a participé à l'extermination des juifs, violemment réprimé la gauche via la dissolution des partis se réclamant du communisme ainsi que des syndicats, et criminalisé de la lutte des classes.
Le salue à Pétain de la part de Macron réagit en tentant de cultiver les néo-fascistes afin de créer un ersatz de base populaire pour sa politique réactionnaire de militarisme et d'austérité sociale. Ceci a été aussi le signal lancé aux forces de l'ordre de la couverture du gouvernement aux répressions et interpellations de masse.
Anthony Torres
La source originale de cet article est wsws.org
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