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Plus de 640 000 munitions fabriquées en Suisse ont été livrées à l'Ukraine via la Pologne, en violation de l'interdiction faite par ce pays de réexporter ce type de matériel vers des zones de conflit, conformément à sa neutralité, a révélé la chaîne de télévision SRF.
L'autorité suisse de contrôle des armements a sanctionné une entreprise polonaise, «UMO SP», qui a enfreint un accord établi avec le fabricant «Swiss P Defence». C'est la première fois qu'une entreprise étrangère d'armement est inscrite sur une «liste noire» suisse pour violation de contrat, suite aux investigations menées par SRF Investigativ.
À la suite d'une requête de ce média, le secrétariat d'État suisse à l'économie (Seco), qui supervise les exportations de matériel militaire, a annoncé : «Nous confirmons que les exportations vers la société polonaise en question sont suspendues jusqu'à nouvel avis.»
Pourquoi le droit suisse est-il bafoué du fait que l'Ukraine a reçu des armes suisses ?
Le 10 juillet 2023, Swiss P Defence a expédié 145 000 cartouches de munitions de sniper de calibre 0.338 et 500 000 cartouches de calibre 0.308 à la société polonaise UMO SP. Quatre jours plus tard, UMO SP a réexpédié ces munitions de Pologne en Ukraine. Or, ce réexport viole l'embargo sur les armements et, de manière générale, le principe suisse de ne pas soutenir les livraisons d'armes à des États en guerre.
Le rapport d'inspection a révélé que les contrôleurs avaient identifié les deux envois de munitions à UMO SP précédemment approuvés par le Seco. Ils se sont également interrogés sur la connaissance par l'entreprise suisse Swiss P Defence de la revente en Ukraine. Car «si l'entreprise suisse avait eu connaissance d'une revente/réexportation en Ukraine, cela constituerait une violation» de la loi suisse, selon le rapport d'inspection. «L'examen n'a révélé aucun indice que Swiss P Defence avait exporté les munitions en sachant qu'elles seraient ensuite réexportées en Ukraine», ont assuré les contrôleurs du Seco après avoir étudié les documents.
En juin 2024, la Commission de sécurité du Conseil national suisse s'est déclarée favorable à la levée de l'interdiction de réexporter des armes de fabrication suisse vers des pays tiers impliqués dans des conflits armés, sous certaines conditions. Cette question sera examinée par les deux chambres du Parlement, le Conseil national et le Conseil des cantons. Neanmoins, un référendum national est également possible, étant donné que la plus grande force politique de Suisse, le Parti populaire suisse, représentée par deux ministres dans le gouvernement de coalition quadripartite, est en faveur de l'adhésion stricte de la Suisse à la neutralité.