Par Luis Basurto
Les États-Unis, avec leur instrument de domination et d'agression militaire nommé Organisation du traité de l'Atlantique nord OTAN, avec aussi l'Europe occidentale vassalisée - la Communauté économique européenne CEE, devenue Union européenne UE (Traité de Maastricht en 1992) - conçurent et bâtirent activement dès 1989, coûte que coûte, une stratégie conquérante rapide. Stratégie déjà préalablement théorisée et annoncée depuis des décennies par de géopoliticiens étasuniens, et synthétisée par exemple en 1989 par le Polonais devenu Étatsunien Zbigniew Brzesiñski (1).
Une stratégie géopolitique agressive, très agressive, avec les alliances géopolitiques d'après-guerre et avec l'OTAN, devenant ouvertement provocateurs et conquérants. Contre la République fédérative socialiste RFS de Yougoslavie d'abord. Aussi contre l'Union des républiques socialistes soviétiques URSS, finalement disloquée en 1991, puis contre la Fédération de Russie depuis 1991. Tout cela visait d'ailleurs autant le Pacte de Varsovie que le Conseil d'assistance économique mutuelle CAEM (2), tout le Bloc de l'Est, les pays socialistes, les démocraties populaires européennes nées dès 1945, après la victoire de l'URSS contre l'Allemagne nazi.
Il faut rappeler ce fait historique majeur et bien insister pour que l'Europe UE, vassalisée de nos jours aux États-Unis, cesse son révisionnisme voire négationnisme historique, qui tente depuis de décennies d'occulter ou minimiser le fait que la défaite définitive de l'Allemagne nazie en Russie puis dans toute l'URSS, c'est bien l'exploit des Russes soviétiques, victoire ayant libéré l'URSS, puis l'Europe de l'est, centrale, du sud, les Balkans, et l'Allemagne elle-même, ayant gagné la bataille de Berlin, et poussé Hitler au suicide et le régime nazi à la capitulation. Les vingt-sept millions de morts soviétiques, russes et d'autres soviétiques, furent le prix payé par les Soviétiques pour gagner la Deuxième guerre mondiale.
La stratégie géopolitique agressive USA-OTAN dès 1989 était une stratégie destructrice, de dépeçage, tendant au démembrement du Pacte de Varsovie, et de l'URSS, voire de la Fédération de Russie ensuite. Sans oublier cependant les tentatives centrifuges « spontanées », avec les petits territoires baltes, l'Ukraine, la Biélorussie et la propre RSS de Russie (celle de Boris Eltsine), la Tchétchénie de la Terreur islamiste, la Transcaucasie velléitaire et les pays soviétiques de l'Asie centrale.
Une véritable stratégie destructrice, de vautours, des charognards, qui pousse au crime, à l'automutilation, au suicide des États, aux guerres civiles. Les vautours et charognards se précipitant ensuite pour bien manger et digérer les restes. Et nous constaterons que cette stratégie de vautours et charognards est ancienne, que l'Occident capitaliste et impérialiste a de la suite diabolique dans les idées.
Déjà lors de la fin de la Première guerre mondiale, les puissances victorieuses, suite à l'écroulement de quatre empires, organisèrent (3) soit le démembrement des uns soit d'importantes pertes territoriales des autres, à savoir : l'empire allemand, l'empire russe, l'empire austro-hongrois et l'empire ottoman.
Les ottomans et austro-hongrois furent morcelés, leurs territoires devenant un confetti des nouveaux pays. Les russes n'évitèrent pas le pire, ils furent amputés des territoires baltes, de la Finlande, et de larges territoires russes, biélorusses et ukrainiens au profit de la Pologne, tous, sauf la Finlande, réintégrés après 1945. L'Allemagne de la république de Weimar perdit 1/7 du territoire du l'Allemagne wilhelmienne (1871-1918), au profit surtout de la recréation de la Pologne, dans l'ancienne Prusse, dont le « corridor de Dantzig », qui fut l'un des motifs de le Deuxième guerre mondiale.
Vers la fin du XXe siècle, l'objectif fut faire éclater ces espaces post-communistes en Europe, ces pays-cibles, pour mieux les mater premièrement, pour les neutraliser, en les affaiblissant et in fine bien morcelés pour les dominer, économiquement et militairement. Les Yougoslaves, les Soviétiques et les Russes d'aujourd'hui, ne sont pas devenus les cibles des pays-cibles parce qu'étant tout simplement communistes. Alors, communistes autrefois et non communistes depuis 1991, les Yougoslaves furent attaqués par les perfides desseins de l'Allemagne réunifiée en 1989 afin de faire disparaître leur pays, pour mieux les digérer bien morcelés.
Les Russes de même, n'étant plus communistes mais étant à présent quand même harcelés et attaqués par des méthodes de guerre hybride tout simplement parce qu'ils ont le tort d'être toujours Russes, ayant un pays trop grand, avec ses 17 125 191 km² et ses plus de 146 millions d'habitants, en pleine renaissance depuis les années 2000. Cela gêne donc trop l'impérialisme états-unien, et ses alliés, un empire vacillant qui depuis 1989 théorisait la fin de l'Histoire avec Y.F. Fukuyama (4) et sa théorie de la victoire universelle et éternelle des États-Unis.
La Russie est encore trop grande, et trop puissante à nouveau, elle reconstruit encore sa puissance, pour être tolérée par les prétentions impérialistes de Washington. Celui-ci étant maintenant clairement une puissance en déclin, à bout de souffle, et prête à tout genre de soubresauts pour enrayer sa décadence. La guerre est toujours un bon moyen, et ce qui est clair c'est que la guerre est bien la politique étrangère des États-Unis.
L'Europe de l'UE, de l'UE-OTAN, celle de l'énorme Mur de l'OTAN de nos jours, devenue plus otanienne que les USA, peine à se rendre compte de comment cet affrontement avec la Russie de nos jours la rend plus vulnérable dans le monde et plus dépendante de Washington. Déjà poussée à prendre ses distances avec la puissante Chine, premier PIB du monde en parité de pouvoir d'achat PPA. Une EU désindustrialisée, sauf la RFA, tributaire du commerce avec l'Asie de l'Est, avec la Chine, et avec la Russie, sans les matières premières dont elle a besoin, pétrole, gaz, charbon, blé, intrants agricoles, terres rares, produits industriels finis, composants électroniques, médicaments, simples masques chirurgicaux, etc. C'est parfait pour Washington, une Europe alliée mais faible, cessant d'être une concurrence ou une menace de concurrence. D'une pierre deux coups ! Les plans étasuniens ne sont pas avares en objectifs, un génial coup de billard à trois bandes. Fini donc le gaz russe, et son Nord Stream 2, mais aussi tout un tas d'autres choses !
La disparition de l'URSS généra en 1991 un grand vide et généra aussi la « question russe », qui n'est toujours pas résolue en ce 2022. Les tentatives de l'Occident sous emprise étasunienne de la résoudre par l'encerclement, par la menace et par la force, par encore plus de recul des Russes, nous mène directement à la guerre. La Russie se défend. L'Ukraine n'est qu'un de ces scénarios. Les apprentis-sorcier occidentaux agissent. La planète entière pourrait exploser.
Luis Basurto
24 février 2022
Notes
(1) Zbigniew Brzeziński, Grand Failure : The Birth and Death of Communism in the Twentieth Century, New York, Charles Scribner's Sons, 1989
(2) fr.wikipedia.org
(3) fr.wikipedia.org
(4) Yoshihiro Francis Fukuyama, The end of History? Article, in revue The National Interest, été 1989 ; et in revue française Commentaire no 47, automne 1989 ; The End of History and the Last Man. Free Press, 1992
La source originale de cet article est Mondialisation.ca
Copyright © Luis Basurto, Mondialisation.ca, 2022