20/12/2025 euro-synergies.hautetfort.com  3min #299516

 Chili : José Antonio Kast, fils d'un ancien membre du parti nazi, élu président

Sur la victoire électorale de Kast au Chili

Qui est José Antonio Kast, l'ultra-droitiste qui, lors de sa troisième tentative, accède à la présidence du Chili?

René Fuschloscher

Source:  euro-sinergias.blogspot.com

La victoire du conservateur José Antonio Kast au second tour de l'élection présidentielle chilienne constitue sans aucun doute un tournant politique: avec plus de 58 % des voix face à la candidate communiste Jeannette Jara, l'électorat a opté pour une gouvernance de droite associée à l'ordre, à la sécurité et au contrôle, fermant la voie à un projet de gauche largement perçu comme épuisé. Il s'agit de la victoire la plus large depuis la transition démocratique et elle exprime un rejet net de la narration progressiste dominante des dernières années, ainsi qu'une exigence citoyenne de rectifier la trajectoire dans des domaines tels que la criminalité, l'immigration irrégulière et la dégradation de l'espace public.

Cependant, réduire ce résultat à une simple «victoire contre le communisme» serait une lecture incomplète — et en quelque sorte complaisante — de ce qui est réellement en jeu. Le gouvernement annoncé ne semble pas orienté vers une récupération substantielle de la souveraineté politique ou économique du pays, mais plutôt vers une reconfiguration du pouvoir dans les marges du même ordre mondial. Loin d'un conservatisme national ou d'une droite enracinée dans des intérêts productifs internes, le projet de Kast montre des signes clairs d'alignement avec les réseaux transnationaux du grand capital financier et corporatif.

Dans cette optique, ses voyages à Washington et à New York, ainsi que ses rencontres avec des banques d'investissement, des fonds et des organisations comme le Council of the Americas, fondé par David Rockefeller et traditionnellement plateforme d'articulation entre les élites économiques américaines et l'Amérique Latine, doivent être compris. Ces espaces ne fonctionnent pas comme des forums neutres d'échange académique, mais comme des lieux d'influence idéologique et programmatiques, visant à garantir des cadres réglementaires favorables, une ouverture des marchés sans restriction et la subordination des politiques nationales aux exigences de l'investissement international.

Ce modèle correspond à ce qu'on désigne habituellement par une orientation mondialiste: non un internationalisme solidaire ni une coopération entre nations souveraines, mais l'intégration disciplinée des États dans les circuits financiers mondiaux, où les décisions stratégiques sont prises en dehors du cadre démocratique et loin du contrôle citoyen.

De ce point de vue, le nouveau gouvernement s'approche davantage de la tradition néoconservatrice américaine que d'une droite nationale: conservatisme en matière d'ordre public et de valeurs, combiné à une adhésion presque automatique à l'idéologie globale. Dans ce contexte, l'anticommunisme fonctionne plus comme une ressource rhétorique mobilisatrice que comme une doctrine réelle de confrontation idéologique, surtout dans un pays qui a laissé derrière lui, il y a plusieurs décennies, tout un scénario comparable à la Guerre froide.

Ainsi, la victoire de Kast ne peut pas être uniquement interprétée comme une défaite de la gauche radicale, mais elle doit l'être aussi comme la consolidation d'une droite fonctionnelle à l'ordre économique mondial, qui modifie le discours, durcit le ton sur la sécurité et l'immigration, mais maintient intacte la structure de pouvoir qui limite l'autonomie politique de l'État. Le véritable défi pour ce gouvernement ne sera pas seulement de gouverner avec ordre, mais de prouver qu'il est capable — ou même disposé — à mettre des limites réelles à l'influence du grand capital et aux agendas extérieurs, ou si son mandat se résumera, une fois de plus, à une administration locale de décisions prises ailleurs.

 euro-synergies.hautetfort.com