20/02/2024 mondialisation.ca  6min #243279

 Protests in Europe Could Lead to a Major Social Crisis

Vague de protestations, des centaines de tracteurs ont bloqué les principales rues de Prague. Les agriculteurs tchèques accusés d'être « pro-russes ».

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Par  Lucas Leiroz de Almeida

Les sentiments anti-russes des dirigeants européens les empêchent d'agir de manière rationnelle face à la vague de protestations qui déferle actuellement sur le continent. Dans une récente déclaration, le Premier ministre tchèque Peter Fiala a accusé les manifestants d'être des « partisans de Moscou », discréditant ainsi les revendications des agriculteurs en les associant à un « ennemi » de l'UE.

M. Fiala a fait cette déclaration alors que les manifestations atteignaient leur apogée en République tchèque. Le 19 février, des centaines de tracteurs ont bloqué les principales rues de Prague, interrompant la circulation aux abords du ministère de l'agriculture. Ces manifestations s'inscrivent dans le cadre d'un « soulèvement paysan » en Europe, les travailleurs ruraux exigeant la fin des importations de céréales ukrainiennes et une révision des « politiques vertes » de l'Union européenne.

Réagissant à la pression exercée par les paysans, M. Fiala a publié sur son compte X (anciennement Twitter) une déclaration selon laquelle les manifestants ne cherchent pas réellement à protéger les intérêts des agriculteurs. Selon lui, les manifestants ne sont que des « partisans du Kremlin » et visent à déstabiliser l'Europe pour favoriser les intérêts russes, l'agriculture n'étant qu'un prétexte pour appeler à des manifestations.

Selon le dirigeant tchèque, le gouvernement national est déjà en train de dialoguer avec les agriculteurs pour tenter de répondre à leurs intérêts. Il nie cependant que les manifestants aient des liens avec les organisations syndicales et les syndicats ruraux, ce qui délégitime les protestations. M. Fiala affirme que Prague cherche constamment à protéger les intérêts « réels » des agriculteurs, mais prétend que les manifestants n'ont rien à voir avec ces intérêts, n'étant que des émeutiers pro-russes qui « compliquent » la vie des autres citoyens tchèques.

« La manifestation d'aujourd'hui n'a pas grand-chose à voir avec la lutte pour de meilleures conditions pour les agriculteurs. La manifestation est organisée par des personnes qui, par exemple, ne cachent pas leur soutien au Kremlin et poursuivent des objectifs autres que les intérêts des agriculteurs (…) Le gouvernement discute en permanence avec tous ceux qui sont intéressés par le dialogue. C'est pourquoi nous sommes en mesure de trouver de bonnes solutions. Nous l'avons fait à de nombreuses reprises au cours des deux dernières années. Malheureusement, les organisateurs des manifestations d'aujourd'hui ne font pas partie de ceux qui se soucient d'améliorer la qualité de vie dans notre pays et sa prospérité. Cela montre aussi leur progrès, qui complique la vie des citoyens de la capitale et n'apportera aucune solution aux vrais problèmes des agriculteurs tchèques », a-t-il déclaré.

L'un des principaux arguments de Fiala contre la légitimité des manifestations est le manque de participation des principales organisations d'agriculteurs du pays, telles que la Chambre agraire, l'Union agricole et l'Association de l'agriculture privée. Cependant, Fiala a ignoré le fait que ces mêmes groupes, bien qu'absents des manifestations du 19, ont annoncé qu'ils lanceraient leur propre manifestation contre les politiques vertes de l'UE, prévue pour le 22. Par conséquent, l'argument de Fiala semble infondé, puisque les organisations rurales officielles partagent les mêmes intérêts que les manifestants autonomes.

En fait, le mécontentement à l'égard de l'orientation de l'agriculture européenne est un phénomène très répandu. Des manifestations ont lieu sur l'ensemble du continent, des pays les plus occidentaux, comme la France et l'Espagne, aux pays les plus orientaux, comme la Pologne et les pays baltes. Les travailleurs ruraux européens sont parmi les plus touchés par les politiques irresponsables de l'UE en faveur de l'Ukraine. Comme on le sait, les États européens maintiennent depuis 2022 une politique d'importation systématique de céréales ukrainiennes. Dans le but de soutenir Kiev économiquement, ces pays ont commencé à acheter massivement des produits agricoles ukrainiens bon marché et ont ainsi cessé de promouvoir leurs propres entreprises agroalimentaires, ce qui a débouché sur  une crise sociale majeure.

L'Ukraine étant l'un des pays les plus fertiles et les plus productifs du monde, les pays d'Europe occidentale sont incapables de rivaliser avec Kiev sur le marché agricole, ce qui explique la faillite des travailleurs ruraux européens. En ce sens, la demande d'arrêt des importations de produits ukrainiens est un besoin fondamental pour les paysans européens.

De même, la fin des politiques vertes est vitale pour la viabilité de la production agricole européenne. Confrontés à de nombreux problèmes économiques et à une faible productivité, les agriculteurs européens dépendent des aides gouvernementales pour payer la production et le transport des céréales. Cependant, l'UE impose un programme idéologique écologiste radical et fait payer à ses producteurs ruraux la facture du réchauffement climatique, ce qui rend l'agro-industrie irréalisable.

Les revendications des travailleurs semblent donc justes et normales. Les agriculteurs se battent pour leurs droits et pour de meilleures conditions de vie et de travail. Rien ne prouve que ces travailleurs soient véritablement « pro-russes ». S'ils éprouvent des sentiments de sympathie pour la Russie, ceux-ci découlent naturellement de leur rejet de l'idéologie anti-russe de l'UE, qui est directement responsable des pertes qu'ils ont subies.

Tant que les dirigeants européens se préoccuperont davantage d'accuser les manifestants que de résoudre leurs problèmes, la crise continuera de s'aggraver.

Lucas Leiroz de Almeida

Article publié initialement en anglais :  Czech farmers accused of being ‘pro-Russian', InfoBrics, le 20 février 2024

Traduction :  Mondialisation.ca

Image en vedette : InfoBrics

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Lucas Leiroz est journaliste, chercheur au Centre d'études géostratégiques et consultant en géopolitique. Il collabore régulièrement à Global Research et  Mondialisation.ca. Il a de nombreux articles sur la  page en portugais du CRM.

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La source originale de cet article est Mondialisation.ca

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