11/08/2015 tlaxcala-int.org  6min #100707

 Ali Saad Dawabsha, 18 mois, brûlé vif dans sa maison incendiée par des colons juifs

L'attaque de terroristes juifs à Douma resserre l'étau sur l'Autorité Palestinienne

 Amira Hass

Dans les heures qui ont suivi l'assassinat de Douma et pendant les funérailles d'Ali Dawabsheh, âgé de 18 mois, les habitants choqués du village étaient divisés en deux camps : ceux dégoûtés par l'apparition des membres des forces de sécurité palestiniennes, armés et en uniforme, et ceux qui éprouvaient de la pitié pour eux. Avec leurs véhicules rutilants, ils n'ont pas pu passer dans la rue Allon et entrer dans le village (situé dans la zone B, sous le contrôle total de la sécurité israélienne) sans se coordonner avec l'armée israélienne.

Les forces de sécurité palestiniennes se sont déployées autour de la mosquée pendant les prières, auxquelles a assisté le Premier ministre palestinien, Rami Hamdallah, avant que le petit corps brûlé soit enterré. Selon son oncle Nasser, le feu avait consumé les mains et les pieds d'Ali. La présence extraordinaire des forces de sécurité palestiniennes, quelques heures seulement après l'incendie mortel, a fait apparaître que, seulement 10 heures plus tôt, leur protection était totalement absente. Leur brève apparition a mis en évidence l'aisance dont ont fait preuve les tueurs, qui ne se sont pas contentés d'attaquer une maison en bordure du village, mais se sont permis d'entrer dans le quartier.

La présence de troupes armées et astiquées de l'Autorité Palestinienne n'a fait que montrer la faiblesse pathologique de celle-ci.

Des membres des Forces nationales de sécurité loyales à Mahmoud Abbas à l'entraînement à Jénine en mars 2012. AP

Selon le droit international, l'armée israélienne est responsable de la sécurité des Palestiniens dans tous les territoires occupés ; selon les accords d'Oslo, elle est responsable de leur sécurité au moins dans les zones B et C. Mais leur mission explicite, et donc leur praxis, est de protéger la sécurité des colons et de leurs activités économiques. Selon les accords signés par l'AP, son dispositif est interdit de conduire des opérations dans les zones B et C afin de protéger son propre peuple. Si des civils se permettaient de porter des armes d'auto-défense contre des agresseurs israéliens et de les utiliser, l'armée israélienne et le service de sécurité Shin Bet les arrêteraient.

A propos du petit groupe de jeunes qui se sont présentés à l'enterrement avec les drapeaux verts du Hamas, quelqu'un a remarqué cyniquement : "Demain, ils se retrouveront dans les prisons de l'Autorité." Un autre a déclaré: "Au cours de la première Intifada, pas un seul colon n'a osé entrer dans le village. Depuis que notre AP s'est installée, nous avons été exposés à des attaques sans protection. " Selon une troisième personne les forces de sécurité " sont venues pour protéger le Premier ministre Hamdallah, pas nous. "Et il a ajouté: "Ils reçoivent leurs ordres d'Israël."

Ce sont les raisons pour lesquelles les opposants à l'AP ont été dégoûtés par le personnel de sécurité de l'AP et ceux qui ne sont pas contre l'AP ont eu pitié d'eux, supposant qu'ils se sentaient embarrassés par leur propre impuissance. Après tout, une douzaine de résidents de ce village travaille dans les forces de sécurité palestiniennes. Mais ils n'ont pas le droit de défendre leurs propres maisons.

Douma est situé non loin des violents avant-postes de la colonie " Vallée de Shiloh " qui, dans les 15 dernières années - et même avant - a transformé la vie dans des villages comme Mughayer, Jalud, Kusra et Krayut en cauchemar. Avec les fusils de l'IDF à leur secours, ils expulsent les gens de leurs terres. Les habitants du lieu disent qu'il y a trois ans, des assaillants non identifiés ont mis le feu à des voitures à Douma et laissé un message en hébreu.

"Mais nous sommes un village tranquille, nous ne créons pas de problème", disent quelques résidents. Beaucoup travaillent dans les colonies - Sa'ad Dawabsheh, le père d'Ali, lui aussi gravement brûlé dans l'incendie criminel [le matin du 8 août, le père de l'enfant a lui aussi succombé à ses blessures, NdT], a travaillé à Nofim. D'autres travaillent dans la colonie de Shiloh. Gagner sa vie est comme la sécurité personnelle : l'AP ne peut pas la garantir.

Tout en dissimulant l'incapacité de l'AP à protéger son peuple contre les attaques israéliennes de toutes sortes - les attaques de l'armée et des colons et les dommages aux cultures - les quelques militants du Fatah ont fait des déclarations grandiloquentes devant la maison de la famille Dawabsheh et le long du parcours des funérailles.

"En fin de compte, nous sommes tous muqawama [la résistance]", a dit l'un. D'autres ont parlé de la nécessité de rondes de surveillance dans le quartier pendant la nuit, dont le Fatah parle au moins depuis trois ou quatre ans.

"Il a été brûlé vif"

Les positions de commandement dans les forces de sécurité sont pleines de membres du Fatah. L'incendie criminel à la maison de Dawabsheh a exposé le Fatah, le parti qui gouverne de fait, dans toute sa faiblesse. L'armée israélienne et le Shin Bet font des éloges aux forces de sécurité de l'AP pour leur aide dans la prévention des attaques terroristes contre les Israéliens, mais l'AP n'est pas autorisée à prévenir les attaques terroristes contre son propre peuple. Et les forces se cachent dans leurs maisons et leurs bureaux lorsque l'armée israélienne envahit la zone A, où l'AP a l'autorité de police.

Ainsi, même si l'AP avait pu prouver que les membres du Hamas récemment arrêtés entendaient mener des attaques armées contre des Israéliens, et que celles-ci étaient contraires aux intérêts du public palestinien, cel aurait été à partir d'une position défensive. L'AP est fidèle aux indications des Accords d'Oslo (dont la validité aurait dû expirer en 1999) et aux limitations économiques, sécuritaires et territoriales prévues par ceux-ci, tout en croyant que l'expansion continue des colonies est une grave violation de ces mêmes accords.

Chaque attaque terroriste juive (y compris celles contre les paysans et contre les produits de leur travail) resserre l'étau de colère et d'embarras autour du cou de l'AP. Il est impossible de prédire quand et comment, mais à un certain point cette colère et cet embarras auront des conséquences dans la politique intérieure palestinienne.

Le régime israélien, en jouant les bien-pensants, se montre soudainement choqué pr un assassinat qu'il a encouragé, pour ne pas avoir empêché les attaques terroristes précédentes et ne pas avoir puni les agresseurs. Cela indique à quel point Israël veut garder l'AP telle qu'elle est.

 tlaxcala-int.org