06/06/2017 mondialisation.ca  6min #129745

 Attentat de Londres : ce que l'on sait

La version officielle de l'attaque terroriste de Londres s'effondre

Par  Robert Stevens

Dans les 24 heures après l'attentat terroriste du samedi au London Bridge, le récit officiel présenté par la Première ministre britannique Theresa May a commencé à s'effondrer.

Parlant à Downing Street dimanche matin, May a déclaré : « En termes de planification et d'exécution », l'attaque à Londres et l'attaque du 22 mai à Manchester « ne sont pas liées ».

Cependant, après que la police a mené une descente dans la maison de l'un des assaillants, un voisin a dit à la BBC qu'il avait informé les autorités des opinions extrémistes islamistes de l'homme, mais que rien n'a été fait. « J'ai fait mon devoir », a-t-il dit. « Je sais que beaucoup de gens l'ont fait, mais les autorités n'ont pas fait le leur. »

L'attaque terroriste de Londres suit le même scénario que l'attentat de Manchester ainsi que d'innombrables autres incidents terroristes de grande envergure dans toute l'Europe, où les attaques ont été menées par des personnes connues de la police. Dans de nombreux cas, des avertissements avaient été faits concernant les auteurs.

Il y a tout juste deux semaines, le kamikaze Salman Abedi a tué 22 personnes, y compris des enfants, qui participaient à un concert d'Ariana Grande à Manchester. Comme cela a rapidement émergé Abedi et sa famille étaient bien connus du MI5 et du gouvernement, qui les avait utilisés, ainsi que de nombreux autres islamistes, dans ses opérations de changement de régime en Libye et en Syrie.

Au cours du week-end, le New York Times a rapporté qu'Abedi était allé en Libye pour rencontrer des membres de l'unité de l'État islamique responsable de l'attentat terroriste de novembre 2015 à Paris. La raison pour laquelle on l'a autorisé à retourner au Royaume-Uni après reste inexpliquée.

May a profité des attaques terroristes dans un effort désespéré pour inverser sa chute vertigineuse dans les sondages juste avant les élections législatives du 8 juin. Avec les derniers sondages qui montrent que les Tories n'ont qu'un point d'avance, il y a une spéculation généralisée sur le retour des conservateurs avec une majorité réduite, un parlement sans majorité ou même une victoire du Parti travailliste. Dans une situation où sa politique sociale est vilipendée par des millions de gens, le gouvernement est impatient de faire de l'élection un verdict sur la prétendue « mollesse » du dirigeant travailliste Jeremy Corbyn sur le terrorisme et son manque de fiabilité en matière de sécurité nationale.

May a utilisé sa déclaration du dimanche pour faire diverses promesses de ce qu'un gouvernement conservateur ferait, malgré un accord avec le Parti travailliste de suspendre les campagnes politiques. Tout en insistant sur le fait que la prévention des attaques terroristes signifiait « prendre des mesures militaires pour détruire l'ÉI en Irak et en Syrie », elle a souligné que le terrorisme islamiste « ne peut être vaincu par l'intervention militaire seule » ou par « le maintien d'une opération de contre-terrorisme défensive permanente, pour habiles que soient ses dirigeants et praticiens. »

Les « dirigeants et praticiens » auxquels elle se réfère, MI5 et MI6, sont profondément impliqués dans les relations les plus étroites avec les groupes islamistes, qu'ils utilisent même maintenant en tant que forces par procuration dans les opérations de changement de régime en Libye et en Syrie. Les services de renseignement britanniques permettent aux membres de ces groupes la liberté requise de se déplacer pour mener des attaques terroristes au Royaume-Uni.

La Grande-Bretagne a également des relations étroites avec les despotes du Moyen-Orient qui ont depuis longtemps soutenu et financé des groupes terroristes. Il y a seulement quelques jours, il a émergé que le gouvernement de May bloque la publication d'une enquête sur le financement étranger des groupes jihadistes, enquête autorisée il y a 18 mois par son prédécesseur, David Cameron, en raison de l'information « très sensible » qu'elle contient sur l'Arabie saoudite, qui reçoit 83 pour cent des exportations d'armes britanniques. En avril, May a rendu visité à Riyad pour obtenir d'autres marchés.

Le discours de May s'est concentré sur son insistance à ce que l'agression contre les droits démocratiques qui a accompagné la « guerre contre le terrorisme » soit maintenant renforcée. Elle a décrit des projets pour approfondir la surveillance de l'activité en ligne de la population britannique et censurer l'Internet, en le qualifiant d'« espace sûr » pour les terroristes. Mais, a-t-elle poursuivi : « Nous ne devons pas oublier les espaces sûrs qui continuent d'exister dans le monde réel. » Ce qui était nécessaire, c'était « de l'éliminer dans tout le secteur public et dans toute la société. »

C'est une menace d'approfondir les mesures répressives associées à la Stratégie de prévention, qui comprends le suivi des élèves et des étudiants et une instruction selon laquelle tous ceux qui occupent des postes d'autorité doivent agir comme des informateurs de l'État.

May a conclu avec l'affirmation que la vaste gamme de pouvoirs répressifs accordés aux services de sécurité de l'État et à la police ne suffisent pas encore. Une « stratégie antiterroriste » serait promulguée pour s'assurer que les services de police et de sécurité ont tous les pouvoirs dont ils ont besoin.

Dans sa réponse hier soir, Corbyn a clairement indiqué que la classe ouvrière ne pouvait pas compter sur le Parti travailliste pour fournir une alternative au programme de May d'augmentation de la répression d'État et de guerre. Il n'a pas tenté d'avertir la classe ouvrière des dangers posés. Au lieu de cela, il a encore accepté le récit officiel de May presque dans son intégralité et a concentré ses critiques sur le fait que le gouvernement n'a pas assez fait pour réussir la guerre contre le terrorisme.

Comme il l'a fait déjà en abandonnant son opposition à l'OTAN et en acceptant le programme d'armes nucléaires Trident, Corbyn a cherché à rassurer l'État de son soutien loyal. « Vous ne pouvez pas protéger le public à bas coût », a-t-il déclaré, en insistant sur le fait que « La police et les services de sécurité doivent obtenir les ressources dont ils ont besoin, et non la réduction de 20 000 postes de la police » comme cela s'est passé sous les conservateurs.

Abandonnant son opposition antérieure à la politique de tirer pour tuer (politique de la police révélée pour la première fois après l'assassinat par balle de Jean Charles de Menezes, après les attentats de Londres du 7 juillet 2005) Corbyn a déclaré que la police devrait être libre de prendre « toute action nécessaire et efficace [..]. Cela comprend une autorisation complète pour que la police utilise toute la force nécessaire pour protéger et sauver la vie comme ils l'ont fait la nuit dernière, comme ils l'ont fait à Westminster en mars. »

Robert Stevens et Chris Marsden

Article paru en anglais, WSWS, le 5 juin 2017

La source originale de cet article est  wsws.org

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