07/06/2017 tlaxcala-int.org  5min #129781

 Michel Collon : « François Houtart était mon Prix Nobel de la Paix à moi »

François Houtart nous a quittés

Various Authors - مؤلفين مختلفين - Auteurs divers- AAVV

François Houtart nous a quittés. Le Centre tricontinental, qu'il a fondé en 1976 et dirigé jusqu'en 2004, est en deuil. Douloureusement en deuil. Du tiers-mondisme à l'altermondialisme, de la théologie de la libération à l'écologie de la création, François Houtart aura été et restera à jamais une figure des luttes pour l'émancipation des peuples. Une référence, une voix et un cœur pour des centaines de milliers de personnes à travers le monde, en particulier en Asie, en Afrique et en Amérique latine, des chefs d'État au plus humble des paysans sans terre.

François Houtart au Forum social mondial, Tunis, 2015.
Né à Bruxelles le 7 mars 1925, il est mort à Quito le 6 juin 2017

Mieux que la liste sans fin de ses travaux, de ses écrits, de ses interventions, cours et conférences, de ses voyages, de ses titres, prix et reconnaissances, ce sont les qualités de François qui le définissent le mieux. Et d'abord, son obstination, son énergie et sa disponibilité.

Son obstination à prendre systématiquement le parti des dominés, des aliénés, des marginalisés, en mettant inlassablement au jour - scientifiquement et politiquement - les mécanismes de la domination, en les dénonçant et en promouvant des alternatives d'organisation sociale égalitaire et respectueuse de l'environnement.

Son énergie de tous les instants, son infatigable entrain. C'est peu dire qu'il ne ménageait pas ses efforts, qu'il ne comptait pas ses heures. Jamais il ne s'est arrêté d'agir, jusqu'à quelques heures avant de s'éteindre, épuisé... pour la première fois.

Sa disponibilité à toute épreuve, son accessibilité permanente. Jamais dérangé, toujours prêt à accueillir, à écouter, à parler, à s'engager dans une nouvelle démarche, dans un nouveau combat pour plus de justice.

François était aussi la conscience - sociologique - de la prégnance des rapports sociaux, des déterminismes sociaux, qui le rendait lucide et humble sur sa propre trajectoire. « Né dans une famille pauvre d'une région reculée d'Inde, du Mali ou du Nicaragua, je n'aurais pas disposé des ressources sociales, culturelles, symboliques qui m'ont ouvert le chemin », osa-t-il au milieu de ses proches lors d'un anniversaire il y a quelques années. Encore fallait-il choisir, comme il l'a fait mieux que quiconque, le chemin de la dénonciation des injustices, de la libération des opprimés.

Bernard Duterme, directeur du CETRI - Centre tricontinental

Cher François.

Je te croyais indestructible, inaltérable. Je te voyais déjà centenaire, je l'espérais, j'en étais sûr. Il m'a fallu quelques heures et plusieurs messages de confirmation pour parvenir à y croire. ¡ Qué pena ! Ainsi, l'immense lumière d'espérance que tu jetais sur le monde s'est éteinte. Tu as été pour moi l'être humain le plus humain que j'aie connu. On ne m'ôtera pas de l'idée que tu as dû mourir d'épuisement : à force de dépenser toute ton énergie à te battre pour soulager les misères du monde, pour protéger les damnés de la terre de la cruauté et de l'égoïsme de leurs semblables. Toujours à l'écoute, toujours en action, toujours solidaire des dominés, dans tous les coins de la terre ! Ton engagement aura été, depuis un demi-siècle, l'exemple que, bien sûr, je ne suis jamais parvenu à imiter, mais qui m'a toujours inspiré et donné du courage. Je te remercie pour cela et je te promets d'essayer encore de suivre le chemin que tu as tracé, du mieux que je pourrai, pendant le temps qui me reste avant de te rejoindre.

Guy Bajoit, président du CETRI - Centre tricontinental

Dans le cadre de ces séances des ʺMardis de la Philosophieʺ, l'Association Culturelle Café Philo Haïti (ACCPH), recevait le mardi 17 janvier 2017 le philosophe François HOUTART autour du thème: Le socialisme est-il encore possible?

Témoignage

J'ai rencontré François Houtart en 2006 alors que je jouais au football à l'Académie de football de Koumassi à Abidjan . Un jour nous nous sommes rendus dans un cyber-café, moi je cherchais des amis, après avoir envoyé plusieurs demandes à différentes adresses, quelques réponses me sont parvenues, notamment celle de François H.
Après il y a eu plusieurs échanges lors desquels chacun parlait de sa vie, de ses rêves, lui luttant pour les sans-voix, dénonçant l'injustice des multinationales,moi voulant devenir un pro du foot. Durant trois ans j'ai bénéficié de son soutien, jusqu'en 2009, quand il essaya de me faire passer un test dans un club en Belgique avec le soutien d'un de ses amis, mais le visa m'a été refusé.
Puis en 2011, année où la violence dans mon pays a atteint un niveau critique, j'ai mis en place avec son soutien et ses conseils une ONG (COMITÉ DES JEUNES POUR LA NON-VIOLENCE ET LA TOLÉRANCE). Nous avons mené plusieurs activités avec son appui ; puis en 2015, il a rendu possible ma participation au Forum Social Mondial à Tunis, où j'ai pu, grâce à lui, me faire de nouveaux amis.

Je l'ai toujours appelé Papa, car c'est cet amour qu'il m'a donné, dans nos échanges, il a toujours su que j'ai grandi auprès de ma mère, bref il savait tout de ma vie.
Je te porterai à jamais dans mon cœur, PAPA. Adieu

Dicko Nouhoun, Agboville, Côte d'Ivoire

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