23/02/2018 mondialisation.ca  5 min #138294

Arrestation de Ahed Tamimi, jeune activiste palestinienne

Torture et humiliations : le calvaire des Palestiniennes détenues dans les prisons israéliennes

BETHLÉEM, Cisjordanie - « Je me souviens qu'il a rapproché sa chaise, qu'il a écarté les jambes et qu'il s'est assis très près de moi. C'était quelque chose d'horrible pour moi. J'avais l'impression qu'il essayait de s'en prendre à mon corps », a déclaré Khawla al-Azraq en se remémorant les tactiques d'intimidation physique et les méthodes de harcèlement sexuel employées par des interrogateurs israéliens alors qu'elle n'était qu'une adolescente.

Quelques décennies plus tard, Khawla al-Azraq, aujourd'hui âgée de 54 ans, frémit encore au souvenir des interrogateurs israéliens qui frottaient leurs mains contre ses jambes pour l'intimider sexuellement.

« Ils s'asseyaient de manière à être très proches de nous, à toucher notre corps. Je me souviens que c'était terrible pour moi à cet âge », a-t-elle raconté.

Bien avant d'être emprisonnée, Ahed Tamimi n'a pas vécu libre un seul jour de sa jeune vie. Les violences des troupes d'occupation contre les civils sont quotidiennes, et les raids nocturne et dévastateurs de l'armée d'occupation - sans parler des vols commis par les soldats israéliens - contre la maison de ses parents ou d'autres membres de la famille ont toujours fait partie de la vie courante pour elle. Elle avait neuf ans quand les colons juifs protégés par l'armée ont commencé à s'emparer progressivement des terres du village où elle a vécu. Tous les vendredi la famille Tamimi a participé à des marches pour protéger leur terre et réclamer le respect de leurs droits. Et Ahed a vu ses proches, celles et ceux qu'elle chérit, se faire arrêter, emprisonner, torturer et tuer, toujours plus nombreux

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Les anciennes prisonnières ont exprimé leur empathie pour Ahed Tamimi, qui, le 31 janvier, a passé son dix-septième anniversaire en détention dans une prison israélienne. « Je me suis reconnue dans le cas d'Ahed Tamimi », a confié Shireen Issawi, dont la famille est depuis longtemps  la cible des forces israéliennes. « C'était mon enfance. »

« En tant que mère, je sais parfaitement à quel point c'est difficile pour des jeunes filles comme Ahed, a déclaré al-Azraq. Je sais que ce sera dur pour elles et que cela les affectera toute leur vie. »

La vie après la prison

Les effets de l'emprisonnement persistent longtemps après la libération de ces femmes. Plusieurs décennies plus tard, al-Azraq a affirmé qu'elle perdait son souffle dans les espaces clos et qu'elle souffrait de claustrophobie, même sous la douche.

Issawi a indiqué qu'elle souffrait toujours de maux de dos et de bras après avoir été menottée à une chaise de fer durant une période d'interrogatoire d'un mois. Au-delà de ses problèmes de santé, depuis sa libération, elle ne peut reprendre son travail d'avocate en raison d'efforts déployés pour la radier en raison de sa condamnation antérieure.

Sahar Francis estime que le principal problème pour les anciennes prisonnières concerne le manque de soutien psychologique. « Cela est lié à notre perception des prisonniers en tant que héros. Nous les mettons dans un espace où nous, la société, ne leur permettons pas de se sentir faibles et de ressentir qu'ils ont besoin de ce soutien. »

Khawla al-Azraq a expliqué que certaines femmes qu'elle connaît, qui avaient été violées lors de leur détention par Israël au début des années 1970, avaient encore du mal à parler de leur expérience. « Parfois, elles ont honte, même si nous savons qu'ils sont nos ennemis et qu'ils font cela pour nous briser », a-t-elle déclaré, d'une voix tremblante.

Al-Azraq a exprimé sa fierté quant au nombre limité mais persistant de femmes palestiniennes qui, malgré les risques, ont endossé un rôle actif dans le conflit israélo-palestinien. « Elles pensent qu'elles ont le même rôle que les hommes et qu'elles peuvent faire les choses de la même manière ou mieux que les hommes. Elles combattent l'occupation et c'est leur droit. »

Cet article de Chloé Benoist a été  publié par Middle East Eye en Français le 6 février 2018
Traduit de l'anglais ( original) par  VECTranslation.

La source originale de cet article est  Middle East Eye
Copyright ©  Chloé Benoist,  Middle East Eye, 2018

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