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« Jack London a été longtemps sous-estimé et négligé par la critique »

Professeur émérite de littérature américaine au Centenary College of Louisiana et directeur du Jack London Museum Research Center de Shreveport, Earle Labor, auteur d'une dizaine d'ouvrages sur Jack London, évoque la modernité de l'écrivain californien.

Propos recueillis par  Jérôme Skalski

Publié le 13 Octobre, 2016 |  Humanite

Comment est née la vocation littéraire de Jack London ?

Earle Labor: Jack est tombé amoureux de la littérature très précocement. « À l'âge de sept ans, je lisais les récits de voyages de Paul Du Chaillu et du capitaine James Cook », nous explique-t-il. À l'âge de dix-sept ans, il gagne un concours d'écrivains amateurs organisé par le San Francisco Call avec son Histoire du passage d'un typhon sur les rivages du Japon, basée sur son expérience à bord du Sophia Sutherland, une goélette de chasse aux phoques sur laquelle il venait de servir comme matelot.

Ce ne sera pas avant son retour du Klondike, en 1898, qu'il connaîtra ses premiers succès d'écrivain. Les publications de ses nouvelles, À l'homme sur la piste et d'Une Odyssée du Nord, en 1899, furent l'occasion de sa percée. La publication de l'Appel sauvage, chez Macmillan, en 1903, lui conféra une renommée internationale, confirmée par le Loup des mers, en 1904, et par Croc-Blanc, en 1906, ses romans les plus vendus.

Quelle place donner à Jack London dans l'histoire de la littérature américaine ?

Earle Labor: J'ai à de nombreuses reprises salué en Jack London le plus grand auteur d'Amérique de renommée mondiale parce que son œuvre a été traduite en presque cent langues et n'a jamais cessé d'être imprimée. Ses œuvres ont influencé des écrivains aussi divers que George Orwell, Anatole France, Ernest Hemingway ou Susan Sontag.

Par contraste, il a été longtemps sous-estimé et négligé par les autorités académiques et par la critique autorisée aux États-Unis. Jusqu'à il y a cinquante ans, la plupart des membres des élites lettrées le considéraient comme un auteur populaire écrivant des histoire de chiens pour enfants, confinant ses œuvres au rayon des rebuts ou des sections jeunesse des bibliothèques, ignorant l'extraordinaire éventail de ses sujets, ainsi que la solidité de ses thèmes dans la durée.

À partir des années 1960, cependant, ses œuvres ont fait l'objet de nombreuses études rédigées par des universitaires et des critiques sérieux, études publiées non seulement dans des revues spécialisées, mais aussi par de prestigieuses maisons d'édition et presses universitaires. Comme exemples récents, je citerai mon Jack London : une vie américaine, publié chez Farrar, Straus & Giroux en 2013 (1), maison d'édition considérée par beaucoup comme la plus réputée des États-Unis et, publié il y a tout juste un mois, mon « Gospel de Jack London », paru en français dans la belle et toute nouvelle revue Reliefs (2).

Comment caractériser la rencontre de Jack London avec les idées de son temps ?

Earle Labor: Dans la biographie que je lui ai consacrée, j'établis que si les plus grandes histoires de Jack London rencontrent les lecteurs du monde entier et de tous les temps, l'histoire de son ascension personnelle est typiquement américaine. L'écrivain Edgar Lawrence Doctorow fait remarquer que London « a bondi sur l'histoire de son temps comme un homme sur le dos d'un cheval ». Pendant une carrière qui a duré moins de deux décennies, il a produit plus de cinquante livres, en même temps qu'une centaines d'histoires courtes, et ses œuvres ont eu trait aux principales préoccupations de son temps - parmi lesquelles nombreuses sont celles du nôtre. Par exemple, sa pièce de théâtre Vol met en scène la collusion du big business et de la politique à Washington, DC. Beaucoup de ses histoires traitent des problèmes persistants entre les différents groupes ethniques et culturels. D'autres examinent le thème universel de l'exploitation et de la pauvreté des classes non privilégiées et de la classe ouvrière. Il faut aussi noter qu'il fut un pionnier en ce qui concerne la dénonciation du pillage des ressources naturelles sous la pression de la recherche du profit.

(1) Earle Labor, Jack London. An American Life, Farrar, Straus & Giroux, 2013, 461 pages. (2) Earle Labor, « Le Gospel de Jack London », revue Reliefs numéro 3, Pôles, septembre 2016

Source:  Humanite

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