01/09/2018 entelekheia.fr  6 min #145171

Le meurtre de Zakharchenko entraîne le conflit ukrainien «vers l'une des pires voies possibles»

Analyse : l'assassinat du leader de la Rpd démontre que Kiev choisit l'option de la force



Paru sur  RT sous le titre Donbass leader's murder shows Kiev clearly wants to end Ukrainian crisis by force - analysts

L'assassinat d'Alexandre Zakharchenko, le leader de la République populaire de Donetsk, a été « très probablement » orchestré par Kiev. Il met en lumière les véritables plans du gouvernement ukrainien, ont déclaré des experts à Russia Today.

Moscou a accusé le gouvernement ukrainien d'être derrière l'attentat à la bombe de vendredi à Donetsk, qui a tué le leader de la RPD. Les analystes pensent que sa mort profite aux bellicistes au pouvoir à Kiev.

« L'assassinat de Zakharchenko profite en premier lieu aux partisans de la ligne dure ukrainienne. Ceux-là ne sont pas intéressés par les accords de Minsk ni par un quelconque autre traité de paix avec les habitants de la région du Donbass », a déclaré Aleksandar Pavic, un analyste politique, dans un commentaire sur l'assassinat. Il estime que les partisans de la ligne dure sont « dirigés par le président ukrainien[Petro] Poroshenko lui-même » et qu'ils constituent ainsi l'épine dorsale du gouvernement actuel.

Kiev a toujours considéré le conflit ukrainien comme un « jeu à somme nulle », a déclaré l'ancien diplomate américain Jim Jatras à RT, ajoutant que « tout ce qui affaiblit le leadership des républiques de Donetsk et de Lugansk est considéré comme un plus pour Kiev ». Il a souligné que ce meurtre « s'inscrit dans une série d'attaques antérieures » que Kiev a lancées contre les républiques autoproclamées.

'Kiev ne s'est jamais intéressée à un règlement politique'

L'assassinat de Zakharchenko montre clairement que le gouvernement de Kiev a toujours considéré la situation en Ukraine orientale « comme une question à régler par la force », analyse John Laughland, philosophe britannique, historien et directeur d'études à  l'Institut de la démocratie et de la coopération.

Kiev a toujours qualifié les forces des républiques autoproclamées de « combattants russes et non ukrainiens », a dit Laughland. « Si vous croyez que les habitants de votre territoire sont des envahisseurs venus d'un État étranger, et c'est ce que l'Ukraine dit au sujet du peuple du Donbass, alors cela démontre que vous n'êtes pas intéressé par un règlement politique. Vous ne les considérez pas comme vos propres citoyens », a-t-il ajouté.

L'assassinat de Zakharchenko « doit montrer au monde entier ce que certaines personnes savent depuis un certain temps, à savoir que l'Ukraine ne veut pas d'un règlement politique », a dit Laughland. Il a également souligné que Poroshenko a déclaré tout récemment être « totalement opposé » à l'idée d'une fédéralisation de l'Ukraine, ce qui signifie, dans les faits, qu'il est contre toute autonomie pour les régions de l'Est de l'Ukraine et qu'il n'envisage pas de respecter les accords de Minsk.

Jatras a fait écho à ces paroles en disant que « si quelqu'un doutait que le processus de Minsk était absolument mort, cela devrait mettre fin à tous les doutes sur la question ». Pavic, quant à lui, a déclaré que l'assassinat était apparemment « destiné à saper le nouvel élan donné au processus de Minsk après la dernière réunion Poutine-Merkel ».

L'Occident a « trop investi » dans Kiev

Cependant, tous ces faits sont peu susceptibles de changer l'attitude à l'égard du conflit ukrainien en Occident, en partie parce que les pays occidentaux se soucient davantage de leurs propres intérêts que de la vérité, ont averti les analystes.

Les décideurs politiques européens « ont investi un énorme capital politique en soutenant que la Russie avait envahi l'Ukraine dans le Donbass «, selon Laughland, qui ajoute qu'aujourd'hui, c'est la position officielle de l'UE. Même s'ils comprennent bien la réalité de la situation, il faudra encore « du temps avant qu'ils ne changent d'avis à ce sujet », a-t-il averti.

Jatras pense que les responsables américains et européens pourraient même promettre un soutien accru à l'Ukraine, et faire le jeu de Kiev qui veut « s'assurer qu'il n'y aura pas de rapprochement entre Washington et Moscou » et considère que « tout ce qui fait monter les tensions est bénéfique ».

Cet incident profite à tous les « acteurs étrangers intéressés à maintenir les tensions russo-ukrainiennes à un niveau élevé, sous la direction de l'État profond américain, du leadership libéral-interventionniste de l'OTAN » et même du Royaume-Uni, qui mène une campagne anti-russe frénétique depuis un certain temps déjà, a dit Pavic.

L'Occident finira par tenter d'imputer la responsabilité de l'assassinat de Zakharchenko à certains acteurs locaux ou de le faire passer pour une lutte de pouvoir interne, a prédit l'analyste. Il a ajouté que cet incident pourrait également « renforcer la position de Porochenko auprès des promoteurs de la campagne hystérique anti-russe aux États-Unis, dont beaucoup seront présents aux funérailles de John McCain, auxquelles Porochenko doit assister ».*

Entre-temps, les médias grand public sont susceptibles de minimiser toute la question ou même tout simplement de l'ignorer, a dit Laughland, qui note que ce meurtre pourrait avoir des conséquences désastreuses pour la situation dans la région. « Cet assassinat pourrait potentiellement détruire toute possibilité de règlement politique et ramener la pire période du conflit ukrainien. Cela détruira le processus politique », a-t-il dit.

Traduction Entelekheia

* Note de la traduction :

Voir aussi  'John McCain, retour sur une vie au service de la guerre'

 entelekheia.fr

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