03/09/2018 reseauinternational.net  9 min #145207

Le meurtre de Zakharchenko entraîne le conflit ukrainien «vers l'une des pires voies possibles»

Funérailles d'Alexandre Zakhartchenko - 200 000 personnes ont fait leurs adieux au chef de l'État assassiné

Le 31 août 2018, un  attentat à la bombe coûtait la vie à Alexandre Zakhartchenko, chef de la République Populaire de Donetsk (RPD) et à un de ses gardes, et blessait 12 autres personnes. Aujourd’hui, 2 septembre 2018 avaient lieu ses funérailles à Donetsk.

Dès hier, 1er septembre, les habitants de Donetsk ont commencé à venir se recueillir sur le lieu de l’attentat, déposant icônes, photos et fleurs là où le chef de l’État a été assassiné.

Le bilan initial s’est alourdi en fin de soirée la veille, passant à deux morts et douze blessés. Si Alexandre Timofeyev, ministre des Finances a repris conscience dans les heures qui ont suivi, Natalia Volkova est toujours dans un état critique.

Voir le reportage près du café où a eu lieu l’attentat :

Aujourd’hui avait lieu la cérémonie de funérailles publique. Alors que le théâtre n’ouvrait ses portes au public qu’à 9 h, dès 8 h, une file d’attente d’un kilomètre s’étirait dans l’avenue Artioma. En tout c’est  près de 200 000 personnes qui sont venues dire adieu au chef de l’État assassiné. Quatre fois le nombre de personnes qui étaient venus aux funérailles des commandants Motorola et Guivi. Des personnes sont même venues d’autres villes de la République (comme Gorlovka et Makeyevka) pour faire leurs adieux.

Il y avait tellement de monde, qu’au lieu des deux heures habituelles, cette fois, les gens ont eu trois heures et demie pour déposer des fleurs et se recueillir devant le cercueil d’Alexandre Zakhartchenko.

Et même ainsi, c’était insuffisant pour permettre à tout le monde de le faire. Beaucoup de personnes ont dû se résoudre à faire passer leurs fleurs de mains en mains jusqu’au théâtre ou à les jeter sur le convoi une fois que celui-ci s’est mis en branle.

Voir la vidéo des funérailles :

Parmi les membres du gouvernement de la RPD, étaient présents, entre autre, le nouveau chef de l’État par intérim, Dmitri Trapeznikov, Denis Pouchiline (président du parlement), Vladimir Kononov (ministre de la Défense) et Alexandre Timofeyev, qui est sorti de l’hôpital pour assister aux funérailles.

Des délégations étrangères de plusieurs pays sont aussi venues assister aux funérailles. Étaient présents, entre autre, le chef de la République Populaire de Lougansk (RPL), Léonid Passetchnik, le Président de la République d’Ossétie du Sud, Anatoli Bibilov, le Vice-premier ministre d’Abkhazie, Astamour Ketsba, le chef de la République de Crimée, Sergueï Aksionov, les députés de la Douma russe, Natalia Poklonskaya, Andreÿ Kozenko, et Kazbek Taïsaev, et le chef des Loups de la Nuit (club de motards russes), Alexandre Zaldostanov.

Ces représentants venus de quatre pays n’ont pas tari d’éloges sur Alexandre Zakhartchenko, et plusieurs ont fait des commentaires sur la suite des événements, ou  ce qui devrait être fait par la Russie, comme Kazbek Taïsaev.

« Alexandre n’était pas seulement un bon ami et le chef de la République Populaire de Donetsk. Il personnifiait la bannière russe de la paix, la lutte contre le fascisme. Un tel coup, comme celui qui nous a été infligé à tous aujourd’hui, devrait recevoir une réponse adéquate. J’ai pris la parole à plusieurs reprises à la Douma et j’ai proposé de reconnaître les résultats du référendum [de 2014 NDLR]. Je pense qu’il serait juste qu’en mémoire d’Alexandre Vladimirovitch, la Douma vote enfin et reconnaisse les résultats du référendum. Je pense que ce serait le meilleur cadeau qui soit, en mémoire de lui. C’était un grand homme, c’est dur de perdre des amis. Ce qu’il a commencé ici, dans le Donbass, ne restera pas inachevé, » a déclaré le député russe.

Alexandre Zakhartchenko a été enterré avec les honneurs militaires, aux côtés de Motorola et Guivi dans le cimetière du Sud de Donetsk. Frères d’armes du temps de leur vivant, c’est ensemble qu’ils reposeront désormais.

En attendant, cet assassinat a (comme on pouvait le craindre) des conséquences négatives sur le processus de paix dans le Donbass. Alors que Kiev dément être derrière cet assassinat, l’un des  députés ukrainiens les plus anti-russes, Igor Mossiytchouk, appelle le gouvernement ukrainien à revendiquer l’attentat (sic).

« [Il faut] dire ouvertement que ce n’est pas le FSB qui neutralise « les terroristes » mais nous-mêmes. On ne mène de dialogue avec « les terroristes » nulle part dans le monde et nous ne le ferons pas non plus. Il a été neutralisé par nos services spéciaux », a-t-il déclaré.

Mossiytchouk a aussi déclaré que les tentatives d’attentat précédentes contre Zakhartchenko avaient aussi été organisées par le SBU (service de sécurité ukrainien), et que le gouvernement ukrainien était lâche de ne pas revendiquer cet assassinat. Et après c’est les gens de la RPD que Kiev traite de terroristes… Je vous laisse juger qui mérite ce qualificatif.

Et pendant que l’ armée ukrainienne se renforce à coup de mercenaires étrangers, de volontaires néo-nazis et d’instructeurs américains et canadiens en vue de préparer une offensive dans le Sud de la RPD, la diplomatie a été totalement mise à l’arrêt par cet attentat. Alors qu’une nouvelle date de rencontre au Format Normandie était attendue,  Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères a déclaré que suite à l’assassinat de Zakhartchenko, il était impossible d’envisager une telle réunion.

« Dans la situation actuelle, il est impossible de parler de prochaines rencontres au format Normandie, comme le voudraient nos partenaires européens. La situation est grave et il faut l’analyser. Ce dont nous nous occupons à l’heure actuelle », a déclaré monsieur Lavrov.

Cette déclaration est compréhensible lorsqu’on voit le silence des chancelleries occidentales, et surtout de Paris et Berlin concernant cet attentat. Aucune condamnation n’est venue de la part des deux garants occidentaux des accords de Minsk.

Pourquoi chercher à discuter avec des terroristes et leurs soutiens se demande la Russie. Si Paris et Berlin ne jouent pas leur rôle alors il est en effet inutile de continuer à discuter. Or les réunions au Format Normandie sont les seules à avoir permis (parfois) de faire avancer le processus de paix.

Si la France et l’Allemagne ne réagissent pas rapidement, l’escalade de la situation semble inévitable. Et la date du 14 septembre, mentionnée par Édouard Bassourine hier comme date potentielle de la future offensive, correspond au  jour où la cour d’appel de Londres rendra son verdict dans le dossier de la dette de 3 milliards de dollars que l’Ukraine doit à la Russie.

Si l’Ukraine est condamnée, quoi de mieux pour glisser cette dette sous le tapis que de relancer la guerre, et prétendre la mener contre la Russie pour ne pas rembourser ?

Le 31 août 2018, ce n’est pas seulement Alexandre Zakhartchenko qui a été tué. Ce jour-là, c’est peut-être les accords de Minsk, et la paix, qui ont été assassinés avec lui…

 Christelle Néant

source: dnipress.com

 reseauinternational.net

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