05/04/2019 multinationales.org  5min #154352

 L'industrie du schiste argileux creuse plus de dettes que de bénéfices

Alors qu'une nouvelle cargaison arrive en France, Total mise gros sur l'exportation de gaz de schiste américain

Énergies fossiles

5 avril 2019 par  Olivier Petitjean

Un nouveau navire méthanier en provenance des États-Unis arrive en France, porteur d'une cargaison largement issue de l'exploitation du gaz de schiste. Au même moment, le groupe Total annonce un important investissement dans un nouveau projet de gazoducs et de terminal d'exportation de gaz de schiste sur la côte de Louisiane.

Il y a quelques semaines, l'Observatoire des multinationales révélait que la France a commencé à importer du gaz naturel liquéfié américain - en grande partie du gaz de schiste - à partir de l'automne 2018 (lire notre article :  Le gaz de schiste américain arrive discrètement en France).

Depuis, ces importations se poursuivent bon train, comme le montrent les chiffres rendus publics par [l'agence étatsunienne d'information sur l'énergie]. Un nouveau navire méthanier, le Oak Spirit,  devait accoster ce vendredi 5 avril au petit matin au terminal de Montoir-en-Bretagne, en provenance de celui de Sabine Pass aux États-Unis. Un paradoxe alors que la France a interdit depuis huit ans la fracturation hydraulique, et donc l'exploitation du gaz de schiste, sur son propre territoire.

Sur fond de relance du Tafta (lire  notre article), les milieux d'affaires ont parié sur le fort développement des exportations du gaz de schiste américain vers l'Europe. Plusieurs dizaines de terminaux méthaniers sont en cours de construction ou en projet sur les côtes du Golfe du Mexique (pour exporter le gaz de schiste extrait au Texas), ainsi que sur la façade Atlantique des États-Unis (pour exporter celui extrait en Pennsylvanie et dans l'Ohio). Les banques françaises, et en particulier la Société générale, sont d'ailleurs étroitement impliquées dans ces projets (lire  notre article).

Les géants du pétrole misent sur les exportations de gaz de schiste

C'est aussi un marché sur lequel le groupe Total, comme les autres géants du pétrole, est en train de miser gros. La major française possédait déjà des actifs dans l'exploitation du gaz de schiste dans l'Ohio et au Texas (lire  notre enquête). Il a récemment investi dans des nouvelles unités pétrochimiques au Texas. En rachetant les activités GNL d'Engie, il a acquis des parts dans le terminal d'exportation Cameron LNG, sur les côtes de Lousiane. Et enfin et surtout, Total a misé beaucoup d'argent sur l'entreprise Tellurian, spécialisée sur ce créneau de l'exportation du gaz de schiste américain, dont elle détiendrait aujourd'hui environ 25% du capital.

Le groupe français  vient d'annoncer qu'il injectait 700 millions de dollars supplémentaires dans Tellurian et notamment dans son projet de terminal d'exportation de GNL de Driftwood, également en Louisiane. Le projet Driftwood LNG, qui comprend le terminal mais aussi un réseau de gazoducs pour faire venir le gaz de schiste extrait au Texas, affiche un coût total de 30 milliards de dollars.

Au final, investir ainsi dans l'exportation du gaz de schiste américain présente probablement un double avantage pour Total. D'abord, certes, se positionner sur un marché en plein développement. Mais aussi s'assurer que la France et l'Europe resteront abreuvées de gaz pour les années à venir, ce qui est nettement moins menaçant pour les intérêts du groupe d'une transition énergétique ambitieuse.

Olivier Petitjean

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Photo : Le terminal de Sabine Pass, par Roy Luck.

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