11/10/2019 sciencesetavenir.fr  8 min #162867

Une superposition quantique obtenue avec le plus lourd objet jamais mesuré : pourquoi c'est important

C'est un pas de géant dans le domaine de l'infiniment petit. Une équipe de chercheurs de l'Université de Vienne, en collaboration avec des chercheurs de l'Université de Bâle, vient de repousser les frontières de la validité de la  physique quantique. Elle est parvenue à appliquer le célèbre principe de superposition à une échelle inédite : 2.000 atomes à la fois ! Elle multiplie ainsi par 30 le poids de l'objet avec lequel une interférence quantique a pu être obtenue, décrochant ainsi le record du plus lourd objet quantique observé.

Tout ceci est déjà un peu compliqué à suivre ? Nous allons y aller pas à pas. Pour comprendre quelle prouesse ont bien pu accomplir ces chercheurs, il faut d'abord rappeler l'un des principes piliers de la  mécanique quantique, cette branche de la physique qui décrit la manière dont se comportent les objets microscopiques comme les molécules, les atomes ou les particules. Ce principe, c'est celui de la "dualité onde-corpuscule".

Mais revenons encore un tout petit peu en arrière. Rappelons-le, toute la spécificité d’un objet quantique est de pouvoir être dans plusieurs états différents à la fois : "mort" et "vivant" (comme  le fameux chat de Schrödinger), "noir" et "blanc", "actif" ou "au repos". Un objet "classique" lui, comme un corps humain ou un ballon de foot, n’a pas cette étrange faculté. Mais où se situe la frontière entre objet quantique et objet classique ? On sait qu’il existe une limite de taille bien sûr, mais où placer ce palier fatidique ? Ce fut, dans les grandes lignes, tout l’enjeu de l’expérience de l’équipe de l’Université de Vienne, détaillé dans un article de la revue  Nature Physics.

L’expérience des "fentes"

Pour discerner un objet quantique d’un non-quantique, il "suffit" donc de savoir s’il est ou non dans plusieurs états à la fois. Il y a plusieurs manières d’y parvenir, dont celle de l’expérience des fentes de Young, destinée à mettre en lumière la dualité onde-corpuscule propre à un objet quantique. "C’est l’expérience fondatrice de la physique quantique", assure Julien Bobroff, physicien et professeur à l’Université Paris-Sud Orsay. Montrer qu’un objet se comporte à la fois comme une onde et comme une particule, et ainsi l’observer dans toute sa "dualité onde-corpuscule" !

Tant qu’on ne mesure pas un objet quantique, qu’on le "laisse tranquille", il va se comporter comme une onde. En revanche, dès qu’on le mesure, il va se réduire à l’état de particule. Mais alors comment le démasquer, s’il se replie dans un état ou dans un autre dès lors qu’on le titille ? Il existe plusieurs moyens de le faire, dont l’une d’entre elles est l’expérience des fentes de Young. Celle-ci consiste, de façon schématisée, à faire passer un objet entre des fentes pour observer la façon dont il ressort et s’imprime sur un écran placé de l’autre côté. En fonction de la marque, dite "interférence", qu’il laissera sur l’écran, les physiciens pourront déterminer s’il est quantique ou non.

Repousser les limites du visible

En 1999, cette même équipe de l’Université de Vienne avait déjà réussi à créer des interférences quantiques avec une molécule de 60 atomes. La prouesse était déjà de taille. Vingt ans plus tard, elle est donc parvenue à reproduire l’expérience avec une molécule de 2.000 atomes ! Toute la virtuosité de la manipulation réside dans le fait d’avoir pu obtenir des interférences visibles, car plus un objet quantique est lourd, plus celles-ci sont "difficiles à voir" (leur longueur d’onde est plus petite). Dans le cas de la molécule de 2.000 atomes, on parle d’une longueur d’onde de 53 femtomètres ! Pour rappel, un femtomètre vaut un millionième de milliardième de mètre…

"Ils ont amélioré leur méthodologie, notamment la façon de faire interférer les molécules. La réalisation technique est aussi plus astucieuse. Mais plus on voudra tester de gros objets, plus il faudra affiner", estime Julien Bobroff. "Ils n’ont en tout cas rien fait de moins que confirmer le principe de superposition quantique, et d’étendre encore le champ d’application de l’équation de Schrödinger !"

L'expérience des fentes de Young telle que présentée dans l'étude. À gauche, le point d'entrée de la molécule, à droite, les interférences obtenues à la sortie © Université de Vienne/Université de Bâle

Mais le physicien tient tout de même à souligner un détail. "En réalité, des objets plus lourds que le leur ont déjà été mesurés dans une superposition. Sauf qu’ils étaient très refroidis, un paramètre qui permet d’agrandir la longueur d’onde d’un objet. L’expérience de l’équipe des Universités de Vienne et de Bâle, elle, a été menée à température ambiante." En effet, la longueur d’onde d’un objet quantiquedépend de sa masse et de sa température. Plus il est lourd, plus celle-ci est petite, on l’a vu, mais c’est également le cas plus il est chaud. "Les conditions d’observation idéales s’obtiennent donc avec un objet léger à température très basse." Tout l’inverse de notre grosse molécule à la température du laboratoire.

De l’espoir pour maîtriser un jour l’ordinateur quantique

S’il s’agit là d’une avancée en sciences purement fondamentales, elle ouvre le champ des possibles dans plusieurs domaines : celui de la mesure de précision d’abord, en ayant repoussé plus loin encore la sensibilité des outils, mais aussi celui de l’informatique quantique. "Arriver à montrer qu’un objet peut être dans deux états à la fois, et surtout le contrôler, c’est la brique élémentaire de l’ordinateur quantique. Même si à mon avis, il n’est pas encore pour demain…", souligne Julien Bobroff. "Qu’importe, ce qu’ils sont parvenus à faire est déjà tellement beau que cela suffit à notre bonheur."

C’est un pas de géant dans le domaine de l’infiniment petit. Une équipe de chercheurs de l’Université de Vienne, en collaboration avec des chercheurs de l’Université de Bâle, vient de repousser les frontières de la validité de la physique quantique. Elle est parvenue à appliquer le célèbre principe de superposition à une échelle inédite : 2.000 atomes à la fois ! Elle multiplie ainsi par 30 le poids de l’objet avec lequel une interférence quantique a pu être obtenue, décrochant ainsi le record du plus lourd objet quantique observé.

Tout ceci est déjà un peu compliqué à suivre ? Nous allons y aller pas à pas. Pour comprendre quelle prouesse ont bien pu accomplir ces chercheurs, il faut d’abord rappeler l’un des principes piliers de la mécanique quantique, cette branche de la physique qui décrit la manière dont se comportent les objets microscopiques comme les molécules, les atomes ou les particules. Ce principe, c’est celui de la "dualité onde-corpuscule".

Mais revenons encore un tout petit peu en arrière. Rappelons-le, toute la spécificité d’un objet quantique est de pouvoir être dans plusieurs états différents à la fois : "mort" et "vivant" (comme  le fameux chat de Schrödinger), "noir" et "blanc", "actif" ou "au repos". Un objet "classique" lui, comme un corps humain ou un ballon de foot, n’a pas cette étrange faculté. Mais où se situe la frontière entre objet quantique et objet classique ? On sait qu’il existe une limite de taille bien sûr, mais où placer ce palier fatidique ? Ce fut, dans les grandes lignes, tout l’enjeu de l’expérience de l’équipe de l’Université de Vienne

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