14/01/2020 tlaxcala-int.org  11 min #167462

Iran-Venezuela : révolution islamique et révolution bolivarienne

 Alí Ramón Rojas Olaya

Puntofijismo

Le Puntofijismo (1958-1999) est la dernière période de la IVe République vénézuélienne (1830-1999). D'une part, il y a eu une politique d'extermination de toutes sortes de vestiges communistes par le terrorisme d'État contre les soulèvements révolutionnaires dont les militants ont été torturés et dont beaucoup ont été victimes d'assassinats sélectifs, de disparitions et de massacres. Mais d'un autre côté, la misère de la majorité de la population vénézuélienne a été planifiée dans les bureaux de la Mobil Oil Company de la famille Rockefeller, situés dans un bâtiment de huit étages conçu par l'architecte usaméricain Donald Hatch à La Floresta, où se trouve aujourd'hui le Centro Rodrigueano de Emancipación Académica Antonio José de Sucre de l'Université Nationale Expérimentale du Grand Caracas (Unexca).

En 1974, sous la présidence de Carlos Andrés Pérez, le Bureau de coordination et de planification (Cordiplan) avait chargé un groupe de recherche dirigé par l'économiste canadien Michel Chossudovsky de produire un rapport intitulé « Pauvreté et marginalité au Venezuela », qui fut censuré en raison des chiffres durs avec lesquels ils révélaient la réalité d'un projet politique aliénant et capitulationniste. Chossudovsky finit par publier chez les Frères Vadell en 1977 un des livres les plus choquants et nécessaires pour comprendre l'ingérence yankee : La miseria en Venezuela (La misère au Venezuela). Le moment de l'enquête est connu sous le nom de Venezuela saoudien, quand la classe moyenne gaspillait sa médiocrité aliénée à Miami en remplissant sa valise au nom du « c'est pas cher, donne m'en deux ». Dans ce pays, qui avait le revenu par habitant le plus élevé d'Amérique latine et des Caraïbes et dont la disponibilité moyenne d'aliments était suffisante pour nourrir correctement tout le pays, sept personnes sur dix étaient sous-alimentées et 55 % des enfants souffraient de malnutrition.

Les artisans du Pacte de Puntofijo, Rafael Caldera, Jòvito Villalba et Ròmulo Betancourt) à New York, 1958

Dynastie des Pahlaví

Les Pahlavi ont été la dernière dynastie de la monarchie iranienne à diriger ce pays entre 1925 et 1979. Reza Pahlaví, un sympathisant de l'Allemagne nazie, a régné de 1925 à 1941 et son fils Mohammad Reza Pahlaví, pendant les 37 dernières années. Lors de l'élection de 1951, Mohammad Mosaddegh est devenu Premier ministre de l'Iran. La première mesure qu'il a prise a été de nationaliser le pétrole cette même année, qui était sous le contrôle de la société British Petroleum. La nationalisation et la politique anti-impérialiste de Mohammad Mosaddegh mettaient en danger les intérêts des USA, et la CIA et le MI6 du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord ont promu un coup d'État militaire contre le gouvernement Mosaddegh, soutenu par le pantin gringo Shah Mohammad Reza Pahlavi qui restaura le pouvoir absolu.

Le Shah d'Iran a effectué plusieurs réformes connues sous le nom de « révolution blanche » qui n'ont favorisé qu'une petite partie de la population liée au pouvoir. Au niveau du logement, alors que 42 % de la population de Téhéran, la capitale de l'Iran, était sans abri et vivait dans des bidonvilles, les secteurs riches proches du régime vivaient dans des palais. Dans les années 1970, alors que l'Iran réalisait d'importants profits grâce à la hausse internationale des prix du pétrole, le pays présentait les pires indicateurs parmi les pays d'Orient en termes d'éducation et de mortalité infantile. Au milieu de la décennie 1970, l'Iran est devenu le plus gros acheteur d'armes usaméricaines. En retour, le Shah devait obéir inconditionnellement aux ordres des USAméricains pour nommer ou destituer certains responsables gouvernementaux ou militaires. Les conseillers militaires usaméricains pouvaient aller en Iran [en vertu de la Loi de capitualtion adoptée en octobre 1964, qui assurait l'impunité aux citoyens US, NdT] et aucun dispositif militaire ne pouvait être réparé en Iran.

Le vestige d'une statue du Shah devant le palais Saad Abad, Téhéran

Les révolutions

Le 11 février 1979, la Révolution islamique a triomphé en Iran sous la direction de l'ayatollah Khomeiny, ce qui a entraîné la création de la République islamique. De nombreux marchés d'armes, qui comprenaient l'achat de croiseurs, d'avions de chasse usaméricains et de chars d'assaut britanniques, ont été gelés et, dans la plupart des cas, l'Iran n'a pas été remboursé.

Le 6 décembre 1998, le commandant Hugo Chavez a remporté l'élection présidentielle au Venezuela. Il entre en fonction le 2 février 1999 et devient le dernier président de la IVe République. Le dimanche 25 avril 1999, un référendum est organisé pour la convocation d'une Assemblée nationale constituante. La constitution a ensuite été ratifiée par référendum le 15 décembre 1999, et de nouvelles élections présidentielles et parlementaires ont eu lieu en vertu de la nouvelle constitution le dimanche 30 juillet 2000, à la suite desquelles Chavez est devenu le premier président de la Cinquième République.

Les réalisations des deux révolutions sont importantes. Le Venezuela est un territoire libre d'analphabétisme, est le cinquième pays au monde avec le plus grand nombre d'inscriptions universitaires, a tenu 25 élections en 20 ans, ce qui en fait l'un des pays les plus démocratiques du monde et a atteint en décembre 2019, pas moins que le chiffre de 3 millions de maisons construites.

L'Iran a presque entièrement réalisé l'alphabétisation de sa population, réduit la pauvreté, amélioré l'espérance de vie, diminué l'inflation et fait des progrès dans d'autres domaines importants pour la société tels que l'éducation et la santé. La population universitaire de l'Iran est passée de 100 000 étudiants en 1979 à 2 millions en 2006 et 70 % des étudiants en sciences et en ingénierie sont des femmes. L'Iran est classé comme le neuvième pays à maîtriser la technologie spatiale. En termes d'autosuffisance dans le domaine de la production d'essence ou de médicaments, les industries nationales couvrent 95 % des besoins du pays. L'Iran a fait des progrès considérables dans les domaines de la technologie, de la pétrochimie et de l'agriculture et est autosuffisant en matière de construction de missiles et de véhicules blindés pour sa défense.

Guerre contre le chavisme

Les réalisations de la Révolution bolivarienne sont telles qu'Elliot Abrams, Représentant spécial pour le Venezuela, a déclaré le 15 juin 2019 devant la Commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants des USA :

Notre attaque contre le chavisme est simplement une guerre pour notre survie et pour imposer une raison qui doit prévaloir sur les autres, car sinon cela signifie que nous l'acceptons et lui donnons la possibilité de nous détruire. Pouvez-vous imaginer une seconde, Messieurs les représentants, que nous laissions les chavistes gouverner sans leur mettre des bâtons dans les roues, sans leur faire la guerre, en en leur permettant de réaliser leurs projets sociaux sans tenir compte de nos entreprises et de nos associés, alors que nos valeurs ont été les leurs depuis près de deux siècles ? Imaginez que nous continuions à leur permettre d'avoir toutes sortes de relations étranges avec tout ce monde hostile aux USA, qui remplit ses peuples de concepts et d'idées qui sont tous contraires à nos valeurs. Imaginez un instant, Messieurs les représentants : cela conduirait à la débâcle et à la chute de la démocratie dans l'hémisphère occidental, ici même, en notre propre sein.

C'est la principale raison pour laquelle un tel régime constitue une menace pour la sécurité nationale de notre pays, et vous devriez le savoir très bien. C'est essentiellement l'objet de la lutte que nous menons contre ce genre de régimes qui mettraient en danger notre propre destin, la paix dans le monde. Nous, qui sommes les champions de la démocratie dans le monde, avons toujours prouvé que le socialisme a été un échec partout où il a essayé de s'imposer, et nous ne pouvons donc pas permettre que faire une exception avec le Venezuela. Alors, allons-nous permettre au socialisme de réussir au Venezuela, Messieurs les représentants ? Pouvez-vous imaginer ce que cela provoquerait dans toute la région de l'Amérique latine ? Pouvez-vous imaginer ce que cela signifie de construire trois millions de maisons sans la participation de l'entreprise privée ?

Quel serait le sort de notre modèle si nous n'intervenons pas là-bas dans les projets de

santé ou d'éducation, dans la formation de leurs militaires et dans l'acquisition des éléments pour leur défense ? Allons-nous donc permettre au socialisme de triompher dans ce pays, un système auquel nous avons déclaré la guerre depuis que nous sommes devenus une démocratie de libre marché de premier plan ?

Par conséquent, quiconque n'est pas avec nous doit passer par les privations les plus douloureuses, les insécurités les plus terribles, les besoins les plus douloureux de tout ce dont il a joui pendant si longtemps en nous ayant comme allié et pour le soutien de ses coutumes, de ses habitudes et de ses divertissements les plus précieux.».

La guerre contre la révolution islamique

Le 22 novembre 2014, Michel Chossudovsky a publié l'article Vingt-six vérités sur le groupe État islamique (EI) qu'Obama veut vous cacher. (Lire l'article  ici)

Révolution culturelle

« Si l'Iran s'en prend à un quelconque Américain ou à un patrimoine américain, nous avons ciblé 52 sites, dont certains sont d'une grande importance pour la culture iranienne ». Ce gazouillis a été émis par Donald Trump le samedi 4 janvier 2020, un jour après qu'il eut fait assassiner le général anti-terroriste Qasem Soleimani à l'aéroport de Bagdad.

Un Mapoyo devant l'épée de Bolivar

Les peuples d'Iran et du Venezuela sont clairs sur le fait qu'une révolution, pour être irréversible, doit être culturelle. Le pouvoir religieux magique de la déesse Maria Lionza de la montagne de Sorte à Chivacoa, les palmiers de Chacao et de l'île Margarita, le carnaval d'El Callao, le festival de joropo, les connaissances et technologies traditionnelles pour la culture et la transformation de la curagua, la Parranda de San Pedro de Guatire et Guarenas, les Diablos Danzantes de Corpus Christi, le peuple Mapoyo et l'épée que Simón Bolívar lui a donnée, la poésie de Luis Mariano Rivera, les poupées de chiffon de Zobeyda Jiménez, l'architecture de Juan Félix Sánchez, la cité universitaire de Caracas, la centrale hydroélectrique Simón Bolívar du barrage de Guri, le pont General Rafael Urdaneta sur le lac Maracaibo, le téléphérique de Mérida, les noms des coins de Caracas, les valses vénézuéliennes, le merengue rucaneao (collé-serré), La variété musicale de l'est du Venezuela, l'arepa, la cachapa, le papelón au citron, le patacón pisao, les pelao guayanés, les tisserandes de Tintorero, les robes de femmes wayúu, ainsi que toutes les forces créatives du peuple sont la dignité de la patrie de Bolivar.

L'Iran est l'un des peuples ayant la plus grande capacité politique, scientifique, créative et artistique, à tel point que la finesse de son sens esthétique se retrouve dans tous les aspects de la vie traditionnelle, de l'architecture et de l'horticulture à la gastronomie. Pour la mentalité islamique, la fonction de l'art est d'ennoblir la matière.

Parmi l'héritage culturel de cette civilisation qu'elle a légué à l'humanité (et pas seulement de l'Iran comme le dit Trump), on peut citer la mosquée du vendredi d'Ispahan, la citadelle de Bam, le mausolée de Cyrus à Pasargadas (considéré comme le berceau de l'empire perse et la première capitale de la dynastie des Achéménides), Persépolis, le palais du Golestan, le jardin persan, les ensembles monastiques arméniens, Bam et son paysage culturel, l'inscription de Behistun, le paysage culturel de Maymand, la tour funéraire de Gonbad-e Qābus, la ville historique de Yazd, la place Emam à Ispahan, le paysage archéologique sassanide de la région du Fars, Shahr-i Sokhta (la "ville brûlée"), le site de Khānegāh et le sanctuaire du Cheikh Saifeddine à Ardabil, le système hydraulique historique de Shushtar, le mausolée d'Öldjeytü à Soltaniyeh, les ruines de Suse, le complexe historique du bazar de Tabriz, le site archéologique de Takht-e Sulaiman, la ville sacrée de Choga Zanbil, le qanat persan, la forêt mixte hyrcanienne de la Caspienne et le désert de Lout.

Bolton : « Nous sommes toujours ouverts au dialogue ». Dessin de Charles Latuff

Iran et Venezuela, cibles yankees

Le Venezuela est le pays qui possède les plus grandes réserves de pétrole au monde. Il est le premier d'Amérique latine et de la Caraïbe et figure parmi les huit plus grands exportateurs de cette source d'énergie dans le monde. C'est le deuxième plus grand producteur de charbon en Amérique latine. C'est le cinquième plus grand producteur de thorium au monde. Son sous-sol est riche en fer, or, diamants, amiante, gypse, sel, argile, magnésite, charbon, cuivre, bauxite, marbre, kaolin, soufre, phosphates, uranium, mercure, nickel, manganèse et coltan.

L'Iran est le premier producteur d'électricité et le deuxième producteur d'acier du Moyen-Orient. Il est le cinquième producteur de pétrole au monde, seulement derrière les USA, la Russie, l'Arabie Saoudite et l'Irak, et le troisième producteur de l'OPEP, avec 3 823 000 barils par jour, sans parler de la quatrième réserve de la planète. C'est le quatrième plus grand producteur de gaz au monde. Avec 10 % des réserves prouvées de pétrole et 15 % de ses réserves de gaz, l'Iran est considéré comme une superpuissance énergétique.

Aujourd'hui, l'Iran est le quatrième producteur mondial de médicaments biotechnologiques, le cinquième producteur mondial de bijoux et le cinquième producteur mondial de carreaux de fayence, après la Chine, l'Espagne, l'Italie et l'Inde. C'est le sixième producteur mondial de méthionine, le premier acide aminé de la chaîne de toute protéine. Les progrès scientifiques iraniens sont les plus rapides au monde. L'Iran produit fièrement 100 % de son équipement d'infanterie et répond à 70 % de ses besoins en matière d'armes et d'artillerie. L'Iran produit également des destroyers, des chars, des chasseurs, des drones et des missiles, et vous savez quoi ? Les USA le savent.

Courtesy of  Tlaxcala
Source:  aporrea.org
Publication date of original article: 10/01/2020

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