24/01/2020 les-crises.fr  5min #167947

 Les 75 ans de la libération du camp nazi d'Auschwitz-Birkenau par l'armée soviétique : un problème majeur dans ce monde atlantiste

Tout en s'opposant à propos de l'histoire de l'Holocauste, Israël et la Pologne émettent une critique commune de l'Ukraine - Par Sam Sokol

Source :  The Times of Israel, Sam Sokol, 02-01-2020

Les ambassadeurs des deux pays dénoncent la glorification des nationalistes ukrainiens du temps de guerre « qui ont encouragé... le nettoyage ethnique » des Juifs et des Polonais

Des militants de divers partis nationalistes portent des torches lors d'un rassemblement à Kiev, en Ukraine, le 1er janvier 2020. (AP Photo/Efrem Lukatsky)

Israël et la Pologne, qui se sont affrontés à plusieurs reprises ces dernières années en raison d'interprétations divergentes de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale, se sont réunis jeudi pour émettre une inhabituelle condamnation commune de l'Ukraine pour ses tentatives de réhabilitation des nationalistes qui ont collaboré avec les nazis.

La critique est survenue un jour après que les Ukrainiens ont marqué le 111e anniversaire de Stepan Bandera, le chef de guerre de l'Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN), une organisation violemment antisémite qui a collaboré avec les nazis. Parmi les historiens de l'Holocauste, le consensus est que l'OUN et sa branche militaire, connue sous le nom d'UPA, ont été responsables de la mort de milliers de Juifs et de quelque 100 000 Polonais pendant la guerre (les estimations varient).

Dans une lettre conjointe adressée aux notables de Lviv et de Kiev, l'ambassadeur israélien Joel Lion et son homologue polonais Bartosz Cichocki ont exprimé leur préoccupation concernant les initiatives visant à honorer Bandera et Andryi Melnyk, le chef d'une faction concurrente de l'OUN.

A Kiev, mercredi, les responsables locaux ont hissé une banderole géante avec la photo de Bandera au-dessus du bâtiment de l'administration de la ville, ce qui a provoqué la colère des militants juifs. Cela s'est produit un peu plus d'une semaine après que le conseil de l'oblast de Lviv eut approuvé le financement d'une célébration en 2020 en l'honneur de Melnyk.

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« Nous souvenant de nos frères et sœurs innocents assassinés dans les territoires occupés de Pologne 1935-1945, qui font maintenant partie de l'Ukraine, nous, les ambassadeurs de Pologne et d'Israël, pensons que célébrer ces individus est une insulte », ont écrit Lion et Cichocki.

« La glorification de ceux qui ont promu activement le nettoyage ethnique est contre-productive dans la lutte contre l'antisémitisme et la réconciliation de nos peuples », ont-ils poursuivi.

« Ces jours-ci, nos gouvernements déploient tous leurs efforts pour répondre aux nouvelles attaques contre les juifs dans différents pays et empêcher les tentatives de falsification de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale », ont-ils ajouté en faisant apparemment référence aux récentes affirmations russes selon lesquelles la Pologne  a précipité le conflit mondial.

La déclaration de jeudi est la deuxième initiative de Lion et Cichocki visant à demander un changement dans la politique de la mémoire ukrainienne. En juin, ils ont tout deux signé une lettre commune au maire de la ville ukrainienne d'Ivano-Frankisvsk,  protestant contre l'inauguration d'un monument en l'honneur de Roman Choukhevitch, un collaborateur des nazis qui a été impliqué dans le meurtre d'innombrables juifs et Polonais de souche.

[Un bâtiment de l'administration municipale de Kiev a été décoré avec une image de Stepan Bandera, chef de l'Organisation fasciste et antisémite des nationalistes ukrainiens, dont les membres ont largement participé à l'Holocauste et ont organisé le massacre de 100 000 Polonais innocents en 1941-1944].

Après la révolution de 2014 en Ukraine, le parlement de l'ancienne république soviétique a adopté une série de projets de loi connus sous le nom de  lois de décommunisation, qui visent à couper les liens du pays avec son passé russe et soviétique. L'un de ces projets de loi interdisait ce qu'il appelait le « déni public de la légitimité de la lutte pour l'indépendance de l'Ukraine au XXe siècle ».

Concrètement, ces projets de loi ont ouvert la voie à la réhabilitation des figures ultranationalistes ukrainiennes qui avaient collaboré avec les nazis.

Au cours des dernières années, des rues de toute l'Ukraine ont été baptisées du nom de personnalités d'extrême droite et des mesures ont été prises pour réhabiliter leur image, les présentant comme des combattants pour la démocratie dont les partisans ont sauvé les Juifs des Allemands.

Interrogé sur cette lettre, l'ambassadeur Lion a déclaré au Times of Israel qu'Israël et la Pologne « ont un intérêt commun à combattre le déni de l'Holocauste et la réécriture de l'Histoire ».

L'ambassadeur d'Israël en Ukraine, Joel Lion. (Wikimedia Commons/Dovernewyork)

Israël  a multiplié les confrontations avec la Pologne depuis que celle-ci a adopté un projet de loi qui rend illégal de tenir la Pologne pour responsable des crimes nazis en 2018.

Ceux qui critiquent cette loi, y compris des politiciens israéliens et des historiens éminents de l'Holocauste,  ont averti qu'elle limiterait le débat sur l'Holocauste et servirait à dissimuler les actions des Polonais qui ont livré des Juifs aux Allemands ou les ont tués.

Le mois dernier, dans ce qui pourrait marquer le début d'un changement dans l'approche de l'Ukraine par rapport à son passé, le gouvernement  a annoncé qu'il nommait Anton Drobovych, un universitaire qui avait auparavant travaillé au Centre commémoratif de l'Holocauste de Babi Yar, à la tête de l'Institut de la mémoire nationale, l'organe étatique principalement responsable de la mise en œuvre de la politique mémorielle.

JTA a contribué à ce reportage.

Source :  The Times of Israel, Sam Sokol, 02-01-2020

Traduit par les lecteurs du site  les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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