16/09/2020 wsws.org  9 min #179300

Les incendies de forêt en Californie, les changements climatiques et le capitalisme

Des incendies de forêt dévastent la côte ouest des états-Unis

Par Linda Rios
16 septembre 2020

Les incendies de forêt massifs qui ravagent la côte ouest des États-Unis continuent de brûler sans relâche. Plus de 100 incendies actifs font rage dans la région, y compris les plus grands incendies de l'histoire de l'État de Washington et de la Californie. La saison des feux de forêt devrait durer au moins jusqu'en octobre ou novembre. Les gouvernements de Californie, de l'Oregon et de l'État de Washington ont tous déclaré l'état d'urgence.

Jeudi soir, les autorités ont annoncé sept nouveaux décès attribuables à l'incendie «North Complex» dans le comté de Butte, en Californie, ce qui porte à 19 le nombre total de victimes dans l'État. Au moins 25 personnes sont à présent mortes dans les incendies de la côte ouest. Des dizaines de personnes manquent à l'appel dans la région et des centaines de milliers de personnes ont été déplacées de leurs foyers.

Comme la gestion criminelle de la pandémie de COVID-19, la dévastation massive causée par les incendies de forêt révèle l'incapacité totale du capitalisme à résoudre tout problème social. Si les incendies peuvent être considérés comme une «catastrophe naturelle», la destruction sans précédent est le produit de la subordination de tous les aspects de la société aux intérêts de profit de l'oligarchie financière.

La classe dirigeante n'a rien fait pour lutter contre les changements climatiques, qui, au cours des dernières décennies, ont provoqué des sécheresses de plus en plus graves et des saisons de feux de forêt plus longues et plus intenses. Les budgets des États ont été réduits au minimum, laissant les services d'incendie en sous-effectif et mal préparés à faire face à des incendies aussi massifs. Jusqu'à présent cette année, les feux de forêt qui ont ravagé la Californie, l'Oregon et l'État de Washington ont brûlé des millions d'hectares de forêt et décimé de petites communautés de montagne.

Les incendies ont rempli l'air de cendres et de fumée, compromettant la qualité de l'air et enveloppant les régions métropolitaines densément peuplées de Seattle, Portland, San Francisco, Los Angeles et d'autres villes dans une brume orange apocalyptique, semblable à des images de Mars. Portland, Seattle et San Francisco ont aujourd'hui la pire qualité de l'air au monde, tandis que Los Angeles se classe au septième rang.

Les particules fines émises par les incendies causeront des dommages permanents aux poumons de millions d'habitants et menacent la vie de dizaines de milliers de personnes souffrant de problèmes respiratoires. Les personnes souffrant de maladies cardiaques, pulmonaires ou vasculaires sont désormais plus exposées aux risques d'accident vasculaire cérébral et de crise cardiaque. La mauvaise qualité de l'air affaiblit le système immunitaire des personnes, même en bonne santé, ce qui augmente le risque de contracter la COVID-19 pour les quelque 50 millions d'habitants de la région, tandis que ceux qui contractent le virus souffriront de symptômes exacerbés.

Selon les chiffres officiels, qui sont généralement considérés comme des sous-estimations importantes, environ 186.000 sans-abri vivent en Californie, dans l'Oregon et dans l'État de Washington, dont beaucoup n'ont pas accès à un abri intérieur et sont maintenant obligés d'endurer des conditions respiratoires insupportables dans la rue. L'offre limitée de bons d'hôtel fournis par les gouvernements des États dirigés par les démocrates s'est rapidement tarie, obligeant des milliers d'autres personnes à vivre dans leur voiture.

La majorité des incendies ont débuté à la suite de coups de foudre, déclenchés par des vagues de chaleur record. La chaleur extrême, combinée à une humidité très faible ou nulle et à l'assèchement de milliers d'hectares de forêts, a créé des conditions de poudrière. Ces conditions arides favorisent également l'infestation de certains types de coléoptères qui affaiblissent et tuent les arbres, ce qui alimente à son tour les feux de forêt.

Les incendies se sont propagés à une vitesse record, l'incendie de Bear Creek en Californie ayant ravagé environ 93.000 hectares en 24 heures. Daniel Swain, climatologue à l'Université de Californie à Los Angeles, a déclaré au New York Times: «Il est vraiment troublant de voir le nombre d'incendies rapides, extrêmement importants et destructeurs qui brûlent simultanément. J'ai parlé à une vingtaine d'experts en incendie et en climat au cours des dernières 48 heures et presque tout le monde ne sait plus quoi dire. Il n'y a certainement rien eu à cette échelle de mémoire d'homme.»

Californie

Au moins 19 décès ont été signalés à travers l'État, plus de 1,2 million d'hectares ont été brûlés et plus de 6000 structures ont été détruites. Il y a eu 7700 «incidents» de feux de forêt jusqu'à présent cette année.

Jeudi, l'incendie «August Complex», situé à 240 km au nord de San Francisco, est devenu le plus grand incendie de l'histoire de l'État, avec 302.201 hectares, dépassant de loin l'incendie de Mendocino de 2018, qui avait brûlé 185.800 hectares. L'incendie, qui n'a été maîtrisé qu'à 24%, est le résultat de la fusion de plusieurs incendies et est désormais plus grand que l'État du Rhode Island.

Plusieurs autres incendies majeurs continuent de brûler en Californie du Nord, notamment l'incendie «North Complex», dans les contreforts de la Sierra Nevada, au nord-ouest de Sacramento, et l'incendie de Creek, au nord-est de Fresno, qui ont tous deux entraîné l'évacuation de milliers de personnes.

En Californie du Sud, l'incendie «SQF Lightning Complex» a brûlé 14.436 hectares et reste entièrement non confiné malgré le fait qu'il brûle depuis près d'un mois. L'incendie «Apple», qui a débuté le 31 juillet et qui est contenu à 95%, a été l'un des incendies qui ont brûlé le plus longtemps. L'incendie «Dolan» a brûlé 29.578 hectares et est contenu à 40%. L'incendie «Lake» est contenu à 90% et a brûlé 12 structures. L'incendie «Valley», à l'est de San Diego, a brûlé près de 7300 hectares et n'est maîtrisé qu'à 39%.

Oregon

Avec 39 incendies qui ravagent l'État, plus de 50.000 habitants ont été priés de se préparer à évacuer leur maison, ce qui représente plus de 10% de la population de l'État. Au moins 14 personnes ont été tuées, plus d'un demi-million d'hectares a été brûlé et des centaines de maisons et de bâtiments commerciaux ont été détruits.

Le maire de Portland, Ted Wheeler, a émis une ordonnance d'urgence jeudi, alors que «des conditions extrêmes d'incendie menaçant les vies et les biens» se rapprochent de la zone métropolitaine de 2,4 millions de personnes. Saturé par la fumée des 39 incendies qui font rage dans l'Oregon, l'indice de qualité de l'air de la ville a atteint 379 vendredi, selon le Bureau de gestion des urgences: un niveau que l'on peut qualifier de «dangereux» pour la santé humaine. La qualité de l'air est actuellement considérée comme la plus mauvaise de toutes les grandes villes du monde.

L'ordonnance de la ville ferme les parcs, ordonne aux sans-abri de «se déplacer le plus rapidement possible vers des zones plus sûres» et active les sites d'évacuation pour les victimes d'incendie. L'arrêté ne prévoit pas de ressources ni de zones d'évacuation sûres pour les sans-abri de la ville.

Les incendies «Beachie Creek» et «Riverside», près de la ville d'Estacada - à environ 40 km de Portland - menaçaient de fusionner vendredi, car ils n'étaient séparés que d'un peu moins de 2 km. Une fusion des feux de forêt augmenterait l'intensité en raison du comportement des feux «dominés par le panache.» Les villes d'Estacada et de Molalla, situées à proximité, ont été évacuées.

Avec près de 3000 pompiers déployés contre les incendies qui ravagent les zones rurales, plusieurs villes de la partie occidentale de l'État ont été complètement décimées. Le chef du département des forêts de l'Oregon estime que 3000 pompiers supplémentaires sont nécessaires, soulignant le besoin urgent de plus de pompiers et de ressources pour combattre les incendies. «Cela pourrait être la plus grande perte de vies humaines et de biens due à un incendie de forêt dans l'histoire de notre État», a prévenu la gouverneure de l'Oregon, Kate Brown, lors d'une récente conférence de presse. «Nous n'avons jamais vu autant de feux non maîtrisés dans notre État.»

Washington

Il y a environ 15 feux actifs dans l'État de Washington où plus de 200.000 hectares ont été brûlés en quelques jours seulement. Les incendies «Pearl Hill» et «Cold Springs Canyon» menacent de fusionner. Un garçon d'un an a été tragiquement tué dans l'incendie «Cold Springs», et ses deux parents restent dans un état critique avec de graves brûlures. L'incendie «Cold Springs Canyon» n'est actuellement maîtrisé qu'à 25%, tandis que «Pearl Hill» est maîtrisé à 50%. Au total, plus de 200 maisons et structures ont été perdues et près de 800 autres sont menacées.

La péninsule olympique a été particulièrement touchée par la mauvaise qualité de l'air. Un panache de fumée dense et massif s'est déplacé vers le nord à la suite des incendies de l'Oregon. Des vents plus frais sont attendus prochainement, ce qui amènera davantage de particules de fumée du sud-ouest.

La Californie, l'Oregon et Washington sont tous dominés par le Parti démocrate, qui a supervisé des décennies de coupes budgétaires. Ces réductions se sont accentuées en raison des conséquences économiques de la pandémie de COVID-19, ce qui va encore saper le financement déjà insuffisant des ressources indispensables pour lutter contre le nombre croissant d'incendies.

En Californie, le gouverneur Gavin Newsom a soutenu la réduction de 681 millions de dollars du budget de l'État de cette année pour la protection de l'environnement. Les législateurs de l'Oregon ont récemment proposé des coupes budgétaires de 400 millions de dollars, alors qu'une sous-commission chargée de la rédaction du budget a donné le coup d'envoi de sa réunion de juillet en proposant de retarder l'achat d'équipements de lutte contre les incendies de forêt, dont le besoin se fait cruellement sentir.

Les scientifiques mettent en garde depuis des décennies que les changements climatiques auront des conséquences catastrophiques pour la population mondiale. Les incendies dévastateurs qui ravagent la côte ouest marquent l'approfondissement qualitatif d'un processus d'aggravation des saisons des incendies qui dure depuis des années. Ils font suite à des feux de forêt similaires qui ont établi un record dans toute l'Australie l'année dernière. La cause sous-jacente de ces immenses crises est le système capitaliste, dans lequel toutes les ressources de la société sont contrôlées par une minuscule couche d'oligarques parasites.

La dislocation sociale massive causée par les incendies, comme par la pandémie mortelle de COVID-19, témoigne de l'incapacité du capitalisme à servir les intérêts de la grande majorité de la population. Seule la transformation socialiste de la société permettra à la classe ouvrière d'arrêter les incendies dévastateurs, de stopper et d'inverser les changements climatiques, de mettre fin à la pandémie et de faire en sorte que les besoins sociaux prennent le pas sur le profit privé.

(Article paru en anglais le 12 septembre 2020)

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