Le tribunal de première instance de Bruxelles a ordonné à l'État, ce mercredi, de mettre fin aux mesures exceptionnelles prises dans le cadre de la pandémie, et ce dans les 30 jours. Une astreinte de 5 000 euros par jour sera due si l'État ne se conforme pas à la décision.
La Ligue des Droits humains avait introduit, il y a trois semaines au nom de tous les Belges, une action en référé devant le tribunal de première instance de Bruxelles. Celui-ci a ordonné à l'État, ce mercredi, de mettre fin aux mesures exceptionnelles prises dans le cadre de la pandémie, et ce dans les 30 jours, a appris Le Soir. Une astreinte de 5 000 euros par jour sera due si l'État ne se conforme pas à la décision. Le tribunal des référés a estimé que l'urgence invoquée par les demandeurs était établie par le fait de la prolongation jusqu'au 1er avril, par arrêté ministériel du 6 février dernier, des mesures querellées, et ce « sans qu'une réelle communication ait été faite sur le sujet ».
Les demandeurs mettaient en cause la responsabilité de l'État belge en ce qu'il aurait commis une faute en adoptant des mesures, par voie réglementaire, attentatoires aux libertés fondamentales « en méconnaissance des règles constitutionnelles et/ou légales qui lui imposent de s'abstenir ou d'agir dans un sens déterminé ». Aucune des trois lois invoquées par l'État belge pour restreindre les libertés des Belges, estimaient Me Despontin et Me Lackner pour la LDH, ne pouvaient servir de base sous-jacente à l'arrêté ministériel litigieux. L'arrêté ministériel, soulignaient les deux avocates, « viole le principe de subsidiarité du droit pénal, l'obligation de consultation du Conseil d'État et le principe de la sécurité juridique ».
ultimedia.comComme d'autres l'avaient fait avant, sans jusqu'ici obtenir gain de cause, la LDH soulignait que le défendeur, en l'occurrence l'État, « s'était abstenu de légiférer alors qu'il savait que l'arrêté ministériel était illégal » et que d'autre part, il a cautionné les poursuites et les sanctions pénales « illégales » liées à l'application de cet arrêté.
La principale loi sur laquelle se basait la ministre de l'Intérieur pour adopter les mesures « corona » est celle du 15 mai 2007 sur la société civile, qui concerne des mesures d'évacuation et qui a été adoptée suite à la catastrophe de Ghislenghien. Le tribunal de première instance constate, dans l'ordonnance rendue ce matin, que cette loi définit « de manière restrictive et prévisible les pouvoirs ainsi conférés à l'exécutif », et que la situation liée au covid n'est pas visée par cette loi. « La fermeture des divers établissements (culturels, festifs, sportifs, récréatifs, événementiels, horeca, des professions de contacts), la suspension de l'obligation scolaire, la limitation des rassemblements publics ou privés, la limitation de circuler depuis et vers la Belgique échappent aux notions que le langage courant nous impose des termes « réquisition et évacuation », conclut l'ordonnance.
Il apparaît, dit le tribunal de première instance, que les mesures restrictives des libertés constitutionnelles et des droits de l'homme, édictées par l'arrêté ministériel du 28 octobre 2020 et ses arrêtés subséquents « ne reposent, en apparence, pas sur une base légale suffisante ».
Le montant d'astreinte fixé à 5 000 euros/jour ne pourra excéder un total de 200 000 euros. « Au regard des circonstances complexes liées à la crise sanitaire et sans les remettre en cause », le tribunal a accordé un délai de 30 jours calendrier à l'État pour se conformer à la décision. Il serait étonnant que l'État n'interjette pas appel de cette décision.
Notons que la loi « pandémie », destinée à mettre fin à ces problématiques, sera débattue ce mercredi après-midi en commission à la Chambre.
Au cabinet du premier ministre, on ne réagit pas pour l'instant. On attend d'étudier le jugement du tribunal de première instance de Bruxelles.
source : lesoir.be