30/04/2021 tlaxcala-int.org  5 min #189027

Les néo-nazis de Trump et ceux d'Israël

 Iris Leal איריס לעאל أيريس ليل

À bien des égards, les longs adieux du Premier ministre Benjamin Netanyahou au gouvernement rappellent le crépuscule de la présidence de Donald Trump : le déclin psychologique, les épisodes maniaques côtoient la reconnaissance mélancolique que la fin est proche et la volonté de tout faire pour rester dans la résidence officielle, que chacun a souillée à sa manière.

Dans les deux cas, ces hommes blessés en fin de mandat détiennent encore un pouvoir considérable et sont capables d'intimider leur entourage. Tout comme les républicains et les médias sympathisants ont permis à Trump de diffuser ses histoires d' « élection volée » et ont ouvert la voie à l'assaut du Capitole, ici aussi, les députés du Likoud servent de chœur grec, répétant toutes les pirouettes ou restant silencieux, le tout selon les ordres de Netanyahou.

Et Netanyahou, comme Trump, a des agents dans les médias, des flagorneurs et des serviteurs, qui annoncent le plat du jour et le poussent vers les clients épuisés. Tantôt c'est le parti de la Liste arabe unie, tantôt c'est « Gideon Sa'ar, reviens à la maison », tantôt c'est « Naftali Bennett est un gauchiste » et tantôt c'est l'élection directe du Premier ministre. De manière assez étonnante - ou peut-être pas - ce sont les mêmes personnes qui ont diffusé les dangereux mensonges de Trump sur la fraude électorale auprès du public hébréophone.

Mais plus que tout, ce sont les événements de jeudi (22 avril) qui ont montré à quel point ces deux dirigeants sont réellement similaires, lorsque les participants à la marche de l'organisation d'extrême droite Lehava, rejoints par des membres de La Familia, le club ultra de supporters de football du Beitar Jérusalem, ainsi que de nombreux Haredim - ce que nous n'avions pas vu auparavant - sous le slogan « Restaurer l'honneur juif », ont parcouru les rues de Jérusalem à la recherche d'Arabes à frapper, tout en criant des commentaires haineux et racistes. Ils ont jeté des bouteilles et des pierres sur la police, ont fait irruption dans des maisons de la vieille ville et se sont déchaînés au son des cris de bébés et d'enfants terrifiés. À la vue des vidéos que le journaliste de Haaretz Nir Hasson a postées sur Twitter, une petite voix dans ma tête a saisi le schéma familier et a gazouillé : « Regardez, nos propres néonazis ».

La marche violente de groupes dits d'alt-right à Charlottesville en 2017 a obtenu le soutien non déclaré de Trump, tout comme les Proud Boys, qui étaient présents et ont ensuite pris d'assaut le Capitole sur son instruction. À Charlottesville, ils ont crié « Les Juifs ne nous remplaceront pas », et ici des Juifs ont crié « Mort aux Arabes », mais dans les deux cas, les manifestants avaient des liens clairs avec le régime.

Lehava est le bras armé du membre de la Knesset Itamar Ben-Gvir, de Sionisme religieux, une alliance électorale que Netanyahou a facilitée et poussée à la Knesset. Sur les groupes WhatsApp, dont certains sont gérés par Ben-Gvir, le message suivant est apparu avant la manifestation de jeudi : « Aujourd'hui on brûle des Arabes, les cocktails sont déjà emballés ». C'est le même Ben-Gvir qui s'est plaint lorsque l'émission satirique à sketches "Eretz Nehederet" l'a représenté en train de lever le bras dans un salut nazi, affirmant que la satire blessait « avant tout les 6 millions de Juifs massacrés et brûlés » lors de l'Holocauste.

Netanyahou savait exactement qui il faisait entrer à la Knesset, tout comme Trump savait ce qui allait se passer lorsqu'il a sifflé la bande de néonazis qui n'attendait que le signal. Deux dirigeants désespérés au crépuscule de leur règne étaient prêts à causer des dommages inimaginables à leur peuple, aux institutions qu'ils dirigeaient et aux symboles nationaux dans leurs efforts de survie politique. Les deux dirigeants disposaient d'un groupe de journalistes irresponsables qui s'efforçaient de les aider à survivre à n'importe quel prix.

Comme le marigot fétide du Tea Party d'où Trump a émergé et dans lequel il a puisé, et la pollution raciste qu'il a laissée derrière lui lorsqu'il a quitté la Maison Blanche, il en est de même ici : après que Netanyahou aura quitté la scène, les processus qu'il a mis en branle continueront à se développer. Bezalel Smotrich continuera à voler les électeurs des partis haredim et à les contrôler de l'intérieur. Ben-Gvir sera le bras parlementaire de l'extrême droite et les Riklin, Taub et Bardugo* changeront à jamais le visage des médias. Et comme à l'époque, sur Pennsylvania Avenue, aujourd'hui, sur Balfour Street, il y a des gens qui ont beaucoup de pouvoir, assis dans la pénombre de leurs chambres, ruminant des idées désespérées et indignées. Nous vivons une époque dangereuse.

NdT

*Shimon Riklin : archéologue et star médiatique de droite ; Jacob Bardugo : commentateur de la radio militaire, propagandiste de Netanyahou ; Gadi Taub : historien conspirationniste, chroniqueur de Ha'aretz, ancien « gauchiste » devenu netanyahoulâtre.

Courtesy of  Tlaxcala
Source:  cutt.ly
Publication date of original article: 26/04/2021

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