Par Moritz Müller, 14 mai 2021
Mardi, la sentence a été annoncée au procès du journaliste Craig Murray. Dans le passé, NachDenkSeiten a souvent publié des traductions des textes de Craig Murray. Il a été condamné pour "outrage à la cour". Il a été accusé d'avoir permis "l'identification de pièces de puzzle" des témoins dans sa couverture de la défense dans le procès de l'ancien chef du gouvernement écossais, Alex Salmond. Cette décision a été accueillie par de vives critiques de la part des journalistes, qui ont estimé qu'il s'agissait d'une nouvelle critique du gouvernement réduite au silence. Craig Murray est connu pour ses reportages détaillés dans le procès Assange et il a été appelé à témoigner dans le procès espagnol de la société qui a espionné Assange pendant des années à l'ambassade d'Équateur. Mais il ne pourra plus se rendre à Madrid car le tribunal lui a également retiré son passeport. Un bref résumé par Moritz Mueller.
En mars 2020, l'ancien Premier ministre écossais Alexander Salmond a été déclaré non coupable par un jury de toutes les accusations de harcèlement sexuel et de tentative de viol. Craig Murray a assisté à deux jours du procès et a publié de nombreux articles sur les procédures non publiques contre Salmond.
Comme lui, il a suggéré qu'il y avait eu une collusion entre les témoins, le Scottish National Party SNP et les fonctionnaires du gouvernement pour discréditer délibérément Salmond. L'affaire Salmond serait motivée par des raisons politiques, car il a adopté une ligne beaucoup plus radicale sur la question de l'indépendance de l'Écosse que son successeur Nicola Sturgeon.
Comme dans toutes les procédures au Royaume-Uni (RU) en lien avec des violences sexuelles, les noms des témoins et des éventuelles victimes ne peuvent être révélés, mais, étonnamment, celui de l'accusé qui n'a pas (encore) été déclaré coupable, si. Dans son reportage, Craig Murray s'y était conformé, mais le tribunal lui a reproché d'avoir publié des détails sur des témoins qui, dans le cadre de ses connaissances personnelles et d'autres articles datant parfois de plusieurs années, auraient pu permettre de les identifier.
Craig Murray affirme que de nombreux médias grand public et, de manière piquante, l'un des critiques les plus virulents de Salmond, DaniGaravelli, ont publié des détails qui pourraient conduire à l'identification de témoins bien plus souvent que lui. Ses avocats ont déclaré que cela n'avait pas d'importance, mais Murray se demande toujours pourquoi il est le seul à être poursuivi pour cela.
La peine de 8 mois de prison semble également être une nouveauté dans cette affaire. Normalement, une amende aurait probablement été imposée dans un cas comme celui-ci. De même, le fait que Craig Murray ait des problèmes cardiovasculaires et soit le père d'un bébé de 2 mois n'a pas été considéré comme une circonstance atténuante par le juge Dorrian. Il convient également de noter qu'il s'agit du même juge qui a présidé le procès de Salmond et qui a dû pour le moins être irritée par Murray en raison de ses reportages critiques à ce sujet.
Je connais personnellement Craig Murray de Londres, où nous nous sommes croisés presque quotidiennement autour du procès Assange. C'est une personne agréable à vivre, dotée d'un grand sens de la justice et d'un esprit d'analyse aiguisé. Il a rédigé des rapports quotidiens sur le procès de Julian Assange avec une grande rigueur. Samedi, je l'ai croisé brièvement en marge d'une conférence en ligne et il a dissimulé son inquiétude quant à l'audience de condamnation qui allait avoir lieu dans trois jours.
Craig Murray a été l'ambassadeur de Londres en Ouzbékistan de 2002 à 2004. Comme il ne cessait de rendre compte des violations des droits de l'homme et de la torture dans ce pays, il a été convoqué à Londres et, après quelques allers-retours, démis de ses fonctions. Depuis lors, il tient son blog, où il commente les questions de politique britannique et internationale.
La décision de mardi a été accueillie avec incompréhension et inquiétude par de nombreux observateurs. HughKerr, ancien vice-président de la National Union of Journalists, a déclaré à The Dissenter qu'il trouvait le verdict et la sentence dans l'affaire Murray "honteux".
"[Cette décision représente] une véritable menace pour les libertés civiles", a déclaré M. Kerr.
"Un point crucial, bien sûr, est que les femmes qui risquaient d'être identifiées sont toutes restées anonymes, alors que la vie d'Alex Salmond a été détruite et que celle de Craig Murray est sur le point de l'être également." "Je sais que Craig ne fera pas seulement appel à la Cour suprême mais aussi à la Cour européenne des droits de l'homme. Il le fera avec le soutien de nombreuses personnes en Écosse et dans le monde entier", a ajouté M. Kerr.
NoamChomsky a tweeté :
"Craig Murray a fait preuve d'un courage et d'une intégrité remarquables en exposant les crimes d'État et ce qu'il a entrepris de faire pour y mettre fin. Il mérite pleinement notre profond respect et notre soutien pour ses réalisations."
Il y a aussi des voix qui critiquent le reportage de Craig Murray, comme #AnnieBrown dans le Daily Record. Cependant, lorsque je lis ensuite des phrases non fondées dans son article chargé de sentiments, telles que
"le nom de Murray est cité dans le même souffle que celui de Julian Assange, et si tous deux ont souvent été célébrés à juste titre comme des militants des droits de l'homme, ils ont montré peu de respect pour les droits des femmes qui osent dire leur propre vérité aux puissants",
je deviens très sceptique. Il s'agit simplement d'une affirmation qui fait écho à des préjugés existants, mais qui n'est étayée par aucune preuve concrète.
Les cas d'Assange, Salmond et Craig Murray sont très complexes. Vous ne pouvez pas leur rendre justice avec des phrases ou des articles comme celui-là.
Dans les trois cas, il me semble que les éventuels défauts ou faiblesses de ces trois hommes ont été exploités pour les détruire publiquement et les réduire au silence en tant que critiques de l'establishment.
Dans le cas de Julian #Assange, cette campagne a été poussée à l'extrême par de nombreux médias et gouvernements, ce que le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, [NilsMelzer], a détaillé dans son livre publié le 20 avril.
Le fait qu'il [Craig Murray] ne puisse pas témoigner en faveur de Julian Assange à Madrid dans le procès de la société de surveillance UC Global, parce qu'il a dû rendre son passeport mardi, va également dans ce sens. Craig Murray a maintenant trois semaines pour contester cette décision. Ce combat risque de passer par les tribunaux et lui coûter cher, d'où sa demande de soutien ici.
source : fb
(avec suppression de tous les hashtags et de ces saloperies de liens marqués)