15/07/2021 reseauinternational.net  5 min #192216

L'Europe à l'approche des temps troublés

par Irnerio SEMINATORE

Tout converge, dans les analyses et les réflexions actuelles, pour indiquer que nous sommes entrés dans une période de temps troubles et à la veille de chocs de haute intensité qui concerneront les acteurs moyens ou mineurs des sous-systèmes régionaux; en ce qui concerne l'Europe, les relations Nord-Sud, les rapports Est-Ouest, ainsi que la Méditerranée élargie (MEMA).

Déclarations, prises de positions, dispositifs diplomatiques et intellectuels, exercices militaires et précédents historiques, tout est mise en œuvre en vue d'un retournement de situation, à savoir une conjoncture de mouvement et de risque, qui présuppose l'hypothèse d' un engagement conflictuel étendu.

Le signe le plus inquiétant de cette montée des tensions est le démenti des dangers, le besoin de détournement des mots qui désignent la dégradation de l'environnement socio-stratégique, la confluence de tendances lourdes, le potentiel de désordre et d'incertitudes et la différente perception des risques et des menaces, impliquant une redéfinition du concept de « sécurité globale ».

Les termes qui cachent cette situation et qui sont destinés à tracer les limites du tolérable dans les relations de compétition et d'affrontement possible, sont représentés par la notion de « ligne rouge ».

Subtile redéfinition du vocabulaire, cette « ligne », trahit la difficulté de se retenir dans l'usage de la force militaire et l'impossibilité de la remplacer par des options substitutives.

Les intentions hostiles, la violence potentielle et la menace de sanctions, ou, pour finir, la réprobation morale se limitent pour l'heure, à la dénonciation politique et médiatique.

Nous en connaissons le vocabulaire et ses figures emblématiques, rivalité ou hostilité, ennemi ou compétiteur, partenaire ou adversaire.

Quant aux régimes politiques et aux formes de gouvernement, démocratie ou autocratie.

Au sujet des régimes historiques, civilisations ou empires.

En ce qui concerne l'Europe, la condition de fragmentation politique et d'acteur subordonné, doué d'une volonté non partagée d'indépendance politique et d'autonomie stratégique.

Aux jeux du monde, l'Europe porte dans son DNA une culture du refus des enjeux conflictuels et son rôle actuel et ardus consiste à passer d'une puissance désarmée et civile à un puissance d'affrontement et de confrontation.

Cela suppose une sorte de désenchantement et d'éveil stratégique, un changement des paradigmes intellectuels et une adaptation du projet initial aux enjeux et à la logique de compétition et de survie.

Telle à un météorite dans l'espace de la galaxie systémique, l'Union Européenne est aujourd'hui sans pilote et sans direction et perce l'éther raréfié de la politique mondiale entre le réel et le virtuel.

Or, l'espace de la « pensée unique » suggère que cette course hors du temps soit celle d'un « modèle de gouvernance », qui traduit un effet de la mondialisation, en quête d'histoire.

Un « modèle » qui nécessite d'un ordre et d'une décision, capable de préserver une stabilité minimale sans plonger dans le chaos et en donnant l'illusion d'être encore dans un devenir signifiant.

Or, ce qui marque symboliquement la fin d'un cycle de régulation européenne et internationale, est l'émergence d'un système multipolaire en déséquilibre et spécifiquement d'une transversalité compétitive à long terme, comme frein et tampon à la montée paroxystique de le conflictualité.

Les États continentaux européens, depuis 1945, ont intégré, pour survivre, l'idée d'équilibre et de coalition et renoncé à celle d'empire, de supériorité nationale et de peuple-maître, sauf la Grande Bretagne, qui rêve de revenir à l'idée de Commonwelth.

Ils se sont subordonnés à l'idée de fédération ou de confédération et leurs systèmes des partis ont prêté allégeance aux deux vainqueurs, russes et américains, sous la forme idéologique du communisme et du libéralisme (ou encore de démocratie).

Aujourd'hui la corruption de l'idée de liberté, devenue individualiste et convertie en relativisme absolu (idéologie LGBT, transgendre, écolo, Woke etc.) et la disparition de grands courants idéaux, affaiblissent l'ordre interne et l'ordre international.

Au sein de l'Union Européenne, la politique de dissociation nationale (Espagne) et d'intégration (ou subordination) impériale (Otan), qui aurait dû être garantie par une tendance unitariste des institutions européennes, n'a pas préservé les équilibres internationaux face au pari lancé par le Royaume Uni (Brexit).

Ainsi des scénarios de « gouvernance » se sont imposés sous la traduction du concept aseptisé de « policy » (société civile internationale, à fondement transactionnel et coopératif), plutôt que sous celle de gouvernement des équilibres et des rapports de force, relevants du « politics » et de l'État, à base compétitive et conflictuelle et dans une perspective géopolitique, continentale et systémique.

L'universalisme démocratique abstrait et celui de droits humains ont été utilisés pour dissoudre les vieilles identités séculaires dans un globalisme apatride et encourager les flux indiscriminés de migrations, négatrices des civilisations et des cultures nationales.

L'affaiblissement des passions nationales a justifié, à gauche des échiquiers politiques nationaux,des pratiques multi-culturalistes de rabaissement du geist national.

Ces incompréhensions, d'ordre historique, n'ont pas interdit la sortie de la Grande Bretagne de l'Union Européenne, qui a dû revoir ses modèles de « gouvernance ».

Voici ces mêmes « modèles », formulés il y a six ans, à la sortie du Royaume Uni de l'Union Européenne et aujourd'hui à nouveau sur le tapis, en raison de leur remise en cause par le gouvernement britannique (aux jeux de l'UE).

Source:  ieri.be

via:  euro-synergies.hautetfort.com

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