Malgré leur défaite la plus humiliante depuis le Vietnam, les USA n'en ont pas fini avec les Talibans. Des voix s'élèvent pour que l'armée américaine y retourne, et dans cette perspective, les médias grand public des USA maintiennent un tir de barrage de propagande anti-talibane, quittes même à fabriquer des fausses informations.
En creux, il s'agit bien évidemment de contrer la Chine et son méga-projet de routes commerciales Belt & Road, auquel selon Nikkei, les Talibans ont « déroulé le tapis rouge ». Nul doute que des plans enfiévrés soient en discussion en ce moment même au Pentagone, mais comment faire pour gagner une guerre qu'on a passé vingt ans à perdre ?
Note : étant donnée la grande quantité de tweets dans cet article, leurs traductions ont été surlignées pour en faciliter la lecture.
Par B.
Paru sur Moon of Alabama sous le titre To Disparage Taliban NYT, CNN Quote Hoax Twitter Account, Create Fake Story
Gareth Porter a décrit comment, après la guerre, les médias grand public ont attisé une hystérie mondiale sur le terrorisme pour susciter une hostilité envers le nouveau gouvernement afghan :
Après la victoire des Talibans sur l'armée américaine, les médias grand public américains ont produit un nouveau récit sur une menace terroriste imminente en Afghanistan, qui prépare le terrain pour de futures interventions militaires. En le diffusant de manière étonnamment synchronisée, les médias ont démontré plus clairement que jamais leur coordination avec l'appareil de sécurité nationale US [*] et la promotion de ses intérêts.
Parallèlement, le dénigrement du gouvernement taliban se poursuit.
Il y a deux jours, le New York Times, ainsi que CNN, ont publié une « fake news » destinée à présenter les Talibans sous un mauvais jour :
Le nouveau recteur taliban interdit l'accès des femmes à l'université de Kaboul
Renforçant les restrictions imposées aux femmes par les talibans, le nouveau recteur de l'université de Kaboul a annoncé lundi que les femmes seraient indéfiniment interdites d'accès à l'établissement, que ce soit en tant qu'enseignantes ou étudiantes.
« Je vous donne mes paroles en tant que recteur de l'Université de Kaboul », a déclaré Mohammad Ashraf Ghairat dans un tweet lundi. « Tant qu'un véritable environnement islamique ne sera pas fourni à tous, les femmes ne seront pas autorisées à aller dans les universités ou à travailler. L'islam d'abord. »La nouvelle politique universitaire fait écho à la première fois où les talibans ont été au pouvoir, dans les années 1990, lorsque les femmes n'étaient autorisées à sortir en public qu'accompagnées d'un parent masculin et qu'elles étaient battues en cas de désobéissance, et qu'elles étaient totalement exclues de l'école.
L'article de CNN, publié plus tard, dit :
Tant qu'un véritable environnement islamique ne sera pas fourni à tous, les femmes ne seront pas autorisées à aller dans les universités ou à travailler. L'islam d'abord », a déclaré Mohammad Ashraf Ghairat sur son compte Twitter officiel.
Lorsque j'ai lu l'article du NYT, je suis allé voir le compte et découvert qu'il s'agissait d'un compte non vérifié, créé ce mois-ci sous le nom du nouveau recteur de l'université de Kaboul. Le compte avait curieusement utilisé principalement l'anglais dans ses tweets et semblait inhabituellement familier dans sa formulation. Le tweet en question, que le NYT cite de manière incomplète, commençait par « Les gars! »
I give you my words as the chancellor of Kabul University:
as long as real Islamic environment is not provided for all, women will not be allowed to come to universities or work. Islam first.
(Tweet : « Les gars ! Je vous donne mes paroles en tant que recteur de l'université de Kaboul : Tant qu'un véritable environnement islamique ne sera pas fourni à tous, les femmes ne seront pas autorisées à aller dans les universités ou à travailler. L'islam d'abord »)
Quelque chose clochait manifestement avec ce compte, j'ai donc creusé un peu plus avant. Il s'est avéré que plusieurs Afghans avaient immédiatement signalé que le compte était 𝕏 parodique et que toute l'histoire était donc fausse.
(Tweet : « Ce compte est faux et aucun ordre de ce type n'a été donné. Le New York Times a perdu la tête. Ils devraient vérifier les faits avant de publier des articles fondés sur des fausses informations. Ils sont tombés bien bas. »)
Locals have urged reporters to uphold journalistic ethics and standards by thoroughly fact checking and verifying news.
(Tweet : « Des étudiants de l'université de Kaboul ont rejeté les nouvelles allégations selon lesquelles des femmes ont été bannies après qu'un grand média n'ait pas vérifié les tweets d'un faux compte parodique. Des Afghans ont exhorté les journalistes à respecter l'éthique et les normes journalistiques en vérifiant minutieusement les faits et les informations. »)
(Tweet : « Les étudiants de l'Université de Kaboul me disent que les femmes professeurs et étudiantes ont accédé à l'université comme d'habitude. Le #NewYorkTimes devrait vraiment vérifier ses informations avant de les publier. Le #recteur de l'université refuse d'accorder des interviews. Des directives d'en haut, je suppose. »)
L'université de Kaboul affirme que son recteur 𝕏 n'a pas de 𝕏 compte Twitter ou Facebook.
Mais cette fake news du New York Times reprise ensuite par CNN, est toujours en ligne sans corrections ou rectifications, bien que les deux organes aient été informés par les Afghans que l'histoire était fausse.
L'article du NYT a été écrit par Cora Engelbrecht et Sharif Hassan, et celui de CNN par Karen Smith et Tara John. Il est évident qu'aucune de ces personnes, qui dénigrent un pays dans des articles fondés sur des tweets-canulars, sans vérification, ne devrait être appelée journaliste.
Leurs rédacteurs en chef, qui ont autorisé la publication de ces articles sur la seule base d'un tweet non vérifié, ne sont pas non plus qualifiés pour leur travail.
MAJ Quarante-huit heures après, seul le Washington Post, qui avait également publié cette fake news, a corrigé son article avec le chapeau qui suit :
Correction : Une version antérieure de cet article attribuait à Mohammad Ashraf Ghairat, le nouveau recteur de l'université de Kaboul, des commentaires apparus sur un compte Twitter à son nom. Des messages ultérieurs sur le compte ont affirmé que l'utilisateur réel est un étudiant de l'Université de Kaboul qui a tweeté de « faux » mots pour sensibiliser sur la politique des Talibans. L'article a été corrigé.
Etant donné que ni le New York Times, ni CNN n'ont procédé à la même rectification, Moon of Alabama conclut sagement que la fake news tweetée par cet « étudiant » était probablement délibérée, et non pas juste une blague d'un compte parodique.
Traduction et note de présentation Corinne Autey-Roussel
Photo S. Hermann et F. Richter / Pixabay
[*] Note de la traduction : L'appareil de sécurité nationale US inclut Le Département d'État, les think tanks/lobbies bellicistes de Washington, les dix-sept agences de renseignement des USA et le Pentagone (liste non exhaustive).