04/10/2021 mondialisation.ca  23 min #196028

La Cop26 doit être une rupture voulue et non subie pour éviter l'effondrement de la civilisation

Par  Chems Eddine Chitour

«Trente années de blabla... il n'y a pas de planète B, d'économie verte, de neutralité carbone en 2050 blabla.» «C'est tout ce que nous entendons : des mots. Des mots qui n'ont mené à aucune action, nos espoirs et nos rêves noyés dans leurs mots et leurs promesses creuses», l'absence d'action «délibérée» des dirigeants mondiaux est une «trahison des générations actuelles et futures». «Mais on peut changer les choses. Il faudra des réductions d'émissions annuelles immédiates et drastiques.»

(Greta Thunberg, à Milan, le 28-09-2021)

« Notre maison brûle et on regarde ailleurs !»

Président Jacques Chirac (4e Sommet de la Terre, Septembre 2002 Johannesburg)

De tout temps, l'Homme a été avide d'énergie pour satisfaire sa boulimie sans trop utiliser la sienne ! De la maîtrise du feu au paléolithique à la non-maîtrise du nucléaire à Fukushima, le rapport de l'Homme à l'énergie fut toujours placé sous le signe de la domination économique, sociale ou politique. Ainsi, le cri du cœur de Greta Thunberg a résumé, en quelques phrases, trente ans d'autisme et d'indifférence pour l'humanité et la nature. Il est connu que nous consommons plus que ce que la Terre peut produire en une année. Pendant ce temps-là, le climat devient erratique. La biodiversité rétrécit. D'un côté, on parle de changements climatiques, de la nécessité d'aller vers des énergies renouvelables pour ne pas dépasser le seuil de non-retour en termes de changements climatiques ; de l'autre, une véritable frénésie s'est emparée des pays industrialisés pour traquer la moindre bulle de gaz et même la moindre goutte de pétrole.

Des boucles de rétroactions menacent le climat

Le changement climatique entraîne des réactions en chaîne. «Certaines sont d'autant plus dangereuses qu'elles s'autoalimentent et s'amplifient. Parfois, cet effet domino est circulaire : un changement en entraîne d'autres, qui vont eux-mêmes renforcer le phénomène initial qui les a déclenchés. C'est ce qu'on appelle une boucle de rétroaction positive : c'est une sorte de chaîne de réactions qui tend à s'amplifier. Le problème, c'est qu'à l'heure actuelle, plusieurs des boucles qui commencent à se former aggravent le changement climatique.»(1)

«Avec plus de 2 degrés supplémentaires, l'écosystème de la planète serait (encore plus) bouleversé, les conséquences de ce réchauffement vont également influer sur la faune, notamment les coraux. Le climat, c'est un système. Quand une partie est affectée, il y a une sorte d'effet domino.» Les épisodes extrêmes vont encore s'intensifier et se multiplier. Les conséquences sont catastrophiques. «Le monde est sur une voie catastrophique. le Giec estime qu'il faudrait une baisse de 45% des émissions en 2030 pour ne pas dépasser 1,5 °C de réchauffement mondial d'ici à la fin du siècle».(2)

Ambiguïté du discours de Boris Johnson COP26 : «Un tournant pour l'humanité»

Dans un discours à la tribune des Nations Unies à New York, mercredi 22 septembre, le Premier ministre britannique a appelé le monde à faire preuve de «maturité» et de «sagesse» «Il est temps pour l'humanité de grandir. C'est pourquoi la COP26 de Glasgow est le tournant pour l'humanité. Nous devons limiter la hausse des températures.» Pire et plus vite qu'on ne le craignait. Le réchauffement climatique s'accélère et risque de faire augmenter la température planétaire de +1,5°C dix ans plus tôt qu'attendu, en 2030. Cependant d'une façon ambiguë, le Royaume-Uni fait tourner de nouveau ses centrales à charbon. Comment le gouvernement britannique pourra-t-il renoncer au charbon d'ici octobre 2024 ?

Même ambiguïté chez les pétroliers. Comme l'écrit Philippe Escande, «malgré les engagements des majors, le vieux monde tarde à mourir. Pour Shell, comme pour ses homologues européens BP et Total Energies, sous pression de l'opinion et des marchés, ils ont tous les trois promis la neutralité carbone nette pour 2050, avec des engagements intermédiaires forts, même s'ils sont jugés insuffisants par les activistes écologistes, qui ne les lâchent plus. Pour l'instant, le vieux monde tarde à mourir».(3)

L'autisme des grands et la civilisation du « toujours plus »

La boulimie énergétique et la civilisation du gaspillage d'une économie linéaire fait qu'une grande partie de la consommation est inutile. Cependant le fait de remettre toujours au lendemain c'est à dire à plus tard, pensant que nous avons le temps est une cruelle erreur. Elle devient une faute quand on pense « qu'après nous le déluge ». Les coupables ? Les Etats à l'instar d'un président américain qui est partie en croisade au nom du mantra : «  le niveau de vie des Américains à 8tep/an n'est pas négociable » ; Résultat des courses une planète dévastée avec en prime le malheur des populations ciblées parce que possédant du pétrole cet « excrément du diable » dont parle si bien le président Hugo Chavez. Dans le même acte d'accusation nous ajoutons Les apprentis sorciers du Climat les oligarques d'un néolibéralisme sans état d'âme ont une grande responsabilité par leur comportement boulimique dans le dérèglement du monde.

Ainsi l'équation du nénuphar proposée par Albert Jacquard illustre bien le phénomène de la croissance dans un milieu fermé. «Imaginons un nénuphar planté dans un grand lac qui aurait la propriété héréditaire de produire, chaque jour, un autre nénuphar. Au bout de trente jours, la totalité du lac est couverte et l'espèce meurt étouffée, privée d'espace et de nourriture. Question : au bout de combien de jours les nénuphars vont-ils couvrir la moitié du lac ? Réponse : non, pas 15 jours, comme on pourrait le penser, mais bien 29 jours, c'est-à-dire la veille, puisque le double est obtenu chaque jour. Au bout du 24e jour, 97% de la surface du lac est encore disponible et nous n'imaginons probablement pas la catastrophe qui se prépare, et pourtant, nous sommes à moins d'une semaine de l'extinction de l'espèce»...(4)

C'est ce qui nous arrive avec les changements climatiques et les phénomènes de rétroaction qui amplifient d'une façon exponentielle les convulsions du climat. Pour Albert Jacquard, «la société de consommation et le progrès technique nous éloignent de la nature. Cette société mène à la ruine car elle se heurte à la finitude de la planète qui ne peut alimenter de manière croissante et indéfinie le moteur d'une économie fondée sur la consommation». Albert Jacquard propose un gouvernement mondial des ressources naturelles qui sont un bien commun de l'humanité et qui ne devraient pas être exploitées par une minorité. Il nous faut «penser globalement, agir localement». Le développement durable préconise un changement d'échelle pour analyser les enjeux environnementaux et sociétaux».(5)

Ce qui nous attend. L'humanité peut-elle s'adapter aux événements extrêmes ?

Le changement climatique pourrait pousser 216 millions de personnes à migrer d'ici 2050. «Pénurie d'eau, exode, malnutrition, extinction d'espèces La vie sur Terre telle que nous la connaissons sera inéluctablement transformée par le dérèglement climatique. Mais l'Homme a-t-il les capacités pour y faire face ? ''S'adapter ou mourir''. Car les catastrophes naturelles vont - c'est désormais une certitude - se multiplier. Malgré les avertissements des scientifiques du monde entier depuis des décennies, rien n'a été fait - ou presque - pour prendre en compte le changement climatique. Au-delà des catastrophes naturelles, l'humanité devra aussi s'adapter à un déclin massif de la biodiversité, qui a déjà largement commencé.»(6)

Les atermoiements et les apprentis-sorciers du climat

L'un des plus grands crimes contre la nature et, partant, contre l'humanité, est l'égoïsme d'une oligarchie néo-libérale qui pousse à continuer à brûler des combustibles et carburants et ceci en niant la responsabilité de l'Homme dans les convulsions climatiques actuelles et ceci en finançant des études «climato-sceptiques» par des multinationales bien connues, mais aussi avec la complicité des pays rentiers et de l'Opep. Il est une autre catégorie de fossoyeurs de l'humanité, ceux qui pensent tricher avec le climat, voire provoquer des pluies sur commande en faisant appel à la géo-ingénierie. On sait en effet que «les armes climatiques» sont des technologies permettant de contrôler la nature. Ce qui est beaucoup plus difficile à déterminer, c'est l'interdépendance entre les catastrophes naturelles et l'utilisation éventuelle de ces technologies expérimentales. Ainsi ces apprentis-sorciers oublient qu'il y a certainement un fragile équilibre qui nous rappelle l'adage qui veut qu'un battement d'ailes de papillon peut provoquer un ouragan à l'autre bout de la Terre. Cela n'a pas arrêté les Émirats arabes unis qui ont importé la technologie qui leur a permis d'ensemencer les nuages et de provoquer la pluie qui a fait des dégâts avec des inondations catastrophiques.

La pandémie, antichambre de l'effondrement de l'humanité

Pour Fred Vargas, chercheuse au CNRS, spécialiste de la peste au Moyen-Âge, rédactrice d'un essai, L'humanité en péril. Virons de bord, toute  ! : «Depuis trente années, ils savaient. Les gouvernants, les industriels, ils savaient. Que leur folle ruée vers l'Argent et la Croissance était meurtrière. Tout est aujourd'hui dévasté : le climat, les sols, les eaux, la faune, les forêts. Nous ont-ils informés ? Bien sûr que non ! À nous de mettre fin à leur effroyable cynisme. À nous de nous battre, par les actes, par les urnes, à nous de sauver nos enfants.»(7)

Les espèces disparaissent à un rythme alarmant selon une nouvelle étude. L'auteur Elizabeth Kolbert estime que cela soulève des questions quant à notre propre survie. Au cours des dernières 500 millions d'années, la vie sur Terre a presque totalement disparu à cinq reprises, à cause de changements climatiques. À la différence que, cette fois, nous sommes seuls responsables de ce qui se produit. Le livre de la journaliste Elizabeth Kolbert, La Sixième Extinction, a remporté le prix Pulitzer. Le fait que nous soyons a priori responsables de la sixième extinction ? Très peu, voire aucune des extinctions d'espèces des 100 dernières années n'aurait eu lieu sans l'implication de l'Homme.(8)

L'Humanité pousse-t-elle, par son inconscience, la Terre vers la sixième «extinction de masse» ? Certains experts appellent cela l'anthropocène au vu du rythme alarmant de disparition des espèces. «Lors des cinq précédentes extinctions de masse, on a perdu 75% des espèces», explique Robert Watson, patron du groupe d'experts de l'ONU sur la biodiversité (IPBES). Nous avons autant d'occasions de changer la planète dans le bon sens que d'occasions de la détruire (...). En fait, la question que chacun devrait se poser est plutôt la suivante : les 7,3 milliards - qui passeront bientôt le seuil de 8, puis de 9 milliards - de gens peuplant cette planète auront-ils assez de place et de ressources pour cohabiter avec toutes les autres espèces ? N'allons-nous pas droit dans le mur en consommant quantités de ressources dont de nombreuses autres créatures ont aussi besoin ? Même si nous arrivons à survivre, est-ce vraiment le monde dans lequel nous voulons vivre ? Est-ce le monde que nous voulons léguer à nos enfants ?(8)

Avec tout ce qui se passe actuellement à l'échelle mondiale, on est tenté de dire que la fin est proche. À en croire les scientifiques, ce ne serait pas complètement faux. Le 27 janvier 2021, le groupe d'experts The Bulletin of Atomic Scientists a présenté la mise à jour du Doomsday Clock (l'Horloge de l'Apocalypse). D'après les experts, l'incapacité des gouvernements à gérer la pandémie mondiale risque de nous précipiter plus vite que l'on ne pense vers la fin du monde. Pour cette année 2020, l'heure de l'horloge reste inchangée. Pour justifier ce dangereux «sur-place» de l'humanité, «les gouvernements nationaux et autres organisations internationales sont mal préparés pour faire face aux menaces des armes nucléaires et du changement climatique qui pourraient véritablement mettre fin à la civilisation».(9)

Omar Aktouf, professeur honoraire HEC Montréal, est encore plus pessimiste. Il écrit : «La pandémie de Covid-19 et les catastrophes climatiques que nous vivons en ces jours ne sont qu'un prélude aux cataclysmes qui nous guettent. Nous avons dévasté et mis sens dessus-dessous notre planète. Les coupables sont multiples, mais le plus direct reste la façon dont on conduit l'exploitation de ce que la Terre donne, et ce, depuis près de deux siècles.»(10)

Le rapport Meadows, lanceur d'alerte d'un possible effondrement

Il y a une autre catégorie de gourous : ceux qui s'appuient sur une lecture hémiplégique du rapport Meadows. Pour eux, réduire la population pour régler le problème sous-entendu en gardant le business as usual. Ils réchauffent pour cela le rapport Meadows des années 70 en attirant enfin l'attention sur le problème de la surpopulation. Ils appellent à stabiliser une population qui, aujourd'hui, augmente de plus de 200 000 personnes par jour. Ils affirment que depuis ses débuts, la civilisation humaine a connu une trajectoire continue de complexité sociopolitique croissante, une tendance qui s'est dramatiquement accélérée récemment. Ce phénomène a entraîné des perturbations de plus en plus graves du système terrestre, qui se sont récemment manifestées par des effets à l'échelle planétaire tels que le changement climatique. Pour eux, c'est la surpopulation qui en est responsable. Ils oublient les variables d'intensité, à savoir la consommation débridée d'énergie par une oligarchie qui fait que les pays occidentaux consommant en moyenne 10 fois plus d'énergie par habitant que les pays du Sud dont le nombre est loin de refléter l'état de la consommation. Pour un niveau américain à 8 tep.hab/an, nous avons en Afrique des habitants qui consomment 40 fois moins.(11)

En fait, l'interprétation plus juste du rapport Meadows décrit la nécessité de changer de modèle de croissance : «Aujourd'hui, Alice Canabate le rappelle, une constante existe entre de nombreux courants d'écologie politique : la volonté de rompre avec le modèle économique présent considéré comme dépassé et destructeur. Popularisée notamment par les auteurs Pablo Servigne et Raphaël Stevens en 2015, la notion d'effondrement dans un futur proche convainc et crée un certain engouement. Sa conclusion ? Le pire est à venir.

La sociologue vient pourtant pointer du doigt le défaut d'anticipation de l'humanité : pourquoi, malgré sa connaissance du caractère non durable et insoutenable de la croissance depuis la publication du rapport Meadows, l'être humain n'a toujours pas agi concrètement ? Pire, pourquoi a-t-il continué à creuser plus intensément encore vers sa perte ? Alice Canabate en est pourtant certaine, l'effondrement, l'humanité le vit déjà. l'idée d'une réorganisation radicale des modes de production s'est enfin diffusée. Un petit pas pour l'Homme qui, si rien ne se passe, sera peut-être l'un des derniers de la civilisation.»(11)

Effondrement de l'humanité : est-il trop tard ?

Les mauvaises nouvelles concernant l'environnement s'accumulent à un rythme effréné. Pour parvenir à limiter ce réchauffement à 1,5 °C, il faudrait réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) d'environ 45% en 2030 par rapport à celles de 2010, et par la suite atteindre des émissions nettes nulles vers 2050. Harvey L. Mead, auteur du livre Trop tard. La fin d'un monde et le début d'un nouveau, fait abondamment référence à un autre ouvrage, The Limits to Growth : A Report for The Club of Rome's. Tous les scénarios envisagés dans ce modèle conduisent à un effondrement inéluctable des écosystèmes mondiaux en considérant une croissance économique exponentielle, telle que soutenue et encouragée par le modèle capitaliste actuel.(12)

«Depuis que la vie est apparue sur Terre, ces extinctions ''normales'' ont été ponctuées par cinq épisodes d'extinction massive (définis en 1982 par Jack Sepkoski et David M. Raup, une sixième, l'extinction de l'Holocène, pourrait être amorcée. Depuis 13 000 ans, l'extinction de l'Holocène est provoquée par la colonisation de la planète et la modification importante des écosystèmes (fragmentation, transformation des habitats - dont impacts des technologies -, extirpation d'espèces) par les populations humaines.»(13)

«Tout va s'effondrer ! La preuve ? Taper le mot ''effondrement'' dans Google et immédiatement 14,3 millions d'occurrences vous sautent à la figure. Dans notre XXIe siècle suffocant, les prophètes de l'effondrement crèvent les écrans ! On n'est plus dans le temps des réformes, mais dans celui des ruptures violentes au sein de sociétés complexes. Ces ruptures peuvent toucher l'ordre social ou l'écosystème. Des effondrements sont en cours, d'autres sont à venir. L'humanité entre dans une phase inédite de son évolution, tant par le nouveau regard qu'elle porte sur son passé que par ses interrogations sur son avenir. Dans un contexte de plus en plus incertain, notamment avec la pandémie mais surtout l'imminence de changements climatiques incontrôlables. Avec cette question vitale qui nous taraude : notre espèce Homo sapiens peut-elle s'adapter aux conséquences fulgurantes de son succès depuis 40 000 ans et à son amplification sans précédent depuis un demi-siècle ?»(13)

Comment alors éviter l'effondrement ?

En fait, maintenant que le diagnostic est établi, le problème est comment il est possible de changer l'histoire, en luttant contre la cause profonde du changement climatique : la surexploitation de la Terre? Alors même que ce 29 juillet 2021, l'humanité aura déjà consommé la totalité des ressources que notre planète peut générer en une année entière Pour Jean Jouzel, paléoclimatologue, «le changement climatique est en cours. Il s'accélère même plus rapidement que prévu par nombre d'entre nous». «Les politiques visant à atténuer le réchauffement climatique ne devraient pas être axées sur le soulagement des symptômes, mais sur la lutte contre la cause profonde : la surexploitation de la Terre. La réalité est que pour combattre le réchauffement climatique, il faut s'attaquer à la source : la surexploitation de la planète», alertent des scientifiques.(14)

Faut-il en finir avec la croissance sans état d'âme ?

C'est un fait si on continue sur cette trajectoire, la planète sera de plus en plus invivable pour nous mais surtout pour nos enfants. Nous ne pouvons continuer à surexploiter la Terre, comment le montre « l'Over shoot Day » Le jours du dépassement ; Pour 2021 le 29 juillet nous avons consommé ce que Dame Nature a mis à notre disposition pour une année. Nous vivons donc à crédit sur les cinq mois. Nous faisons comme si nous avions 1,5 planète à notre disposition. ! Tout ceci pour permettre aux pays occidentaux de consommer plus de 5 tep/hab/an, sachant que dans le même temps un Sahélien en est à 200 kgep. /an ! Tout ceci à cause d'une croissance sans état d'âme !

Il vient que «Toutes les régions du monde» sont déjà affectées par des dérèglements «sans précédent» et grandissants, résume le rapport du Giec. Les pays industrialisés polluent et Et ceux qui en souffrent le plus sont les pays faibles en développement qui n'ont pas la parade. «Le changement climatique est en train de se dérouler sous nos yeux, on en a la confirmation», pointe le climatologue Robert Vautard. Les scientifiques soulignent aussi que la montée des eaux, l'acidification des océans, la fonte des calottes et glaciers sont «irréversibles». Devant la montée des inégalités et les changements climatiques faut-il en finir avec la croissance ? La question de la décroissance émerge surtout au XXe siècle, lorsque la croissance devient l'idéologie dominante et l'horizon principal. C'est ce qui pousse certains observateurs et intellectuels à tenter d'ouvrir la «boîte noire» de la croissance, de pénétrer dans son fonctionnement, d'évaluer ses effets et ses impasses ».(15)

Est-ce qu'une décroissance en pente douce serait la solution ?

On sait que les pays industrialisés ont pollué pour l'essentiel des 1 500 milliards de tonnes de CO2 depuis le début de la révolution industrielle. Dans cette comptabilité, à titre d'exemple, l'Afrique n'est responsable que de 4 % pour un milliard d'habitants. Depuis une vingtaine d'années, des spécialistes ont alerté, en vain sur l'imminence des changements climatiques. On se souvient de la fameuse phrase de Jacques Chirac sur la maison qui brûle. Pas de pompier à l'horizon ! Nous avons à la place des pyromanes Les compagnies pétrolières climato-sceptiques, par intérêt, ont allumé des contrefeux en finançant des études déclarant que le changement climatique est naturel et que l'Homme n'y est pour rien.

Jusqu'au XIXe siècle, les sociétés vivaient dans un monde relativement stable, gérant la pénurie et des ressources contraintes. Dès les débuts de l'essor industriel, de nombreux doutes sont exprimés à l'égard du projet d'expansion continue de la production, et de nombreuses alertes sont formulées contre le projet moderne d'artificialisation du monde. Tous les arguments éculés pour discréditer la décroissance nécessaire ne peuvent résister au constat implacable, énoncé depuis des décennies maintenant, selon lequel l'extraction et l'accumulation matérielle atteignent leurs limites, alors que les imaginaires dominants de la croissance nous poussent vers l'abîme et pendant que s'impose l'urgence d'une réduction massive des émissions de CO2. La décroissance n'est ni un programme d'action précis ni même une théorie, mais une aspiration née de la conscience aiguë des contradictions et impasses qui caractérisent nos modes de vie, nos infrastructures et nos imaginaires.(16)

Il est temps de dire la vérité aux citoyen(ne)s du monde

Sans verser dans un catastrophisme stérile des vérités doivent être dites

*J'accuse la mondialisation et la financiarisation de l'économie, le néolibéralisme prédateur qui fait que nous allons droit dans le mur au nom du PIB, de la richesse des partenaires du CAC 40, du Dow Jones, des fonds de pension qui ne pensent qu'à s'enrichir.

* J'accuse les pays industrialisés de nous bercer d'illusions et avec une mondialisation laminoir de nous précipiter vers le chaos.

* J'accuse le Giec de réagir trop tard avec des rapports lénifiants et catastrophistes sur le tard, sans imposer des situations contraignantes

* J'accuse la COP21. Tout a commencé avec la COP21. Elle n'a pas représenté un tournant dans la lutte climatique. Le communiqué final laisse aux pays le soin de réduire leurs émissions sans aucune contrainte. D'ailleurs, les émissions ont continué à grimper régulièrement. De plus, le fonds vert prévu s'avère inopérant par manque de contributeur.

* J'accuse certains pays qui font tout pour rendre vert le nucléaire et même l'hydrogène bleu.

* J'accuse l'AIE d'avoir berné la planète par des informations contradictoires selon les ordres et ceci depuis cinquante ans en se dédouanant sur le tard portant même préjudice aux travaux du GIEC d'une façon autiste on donnant encore des prévisions à plus de 100 millions de baris/jour avant le Covid et prenant ensuite le train pour présenter un scénario en...2050 de la neutralité carbone ! sans tarder la démarche drastique

J'accuse l'IRENA de ne pas être suffisamment déterminée à faire réussir la mise en place d'un Plan Marshall des énergies renouvelables se contentant de faire la comptabilité de ce qui a été réalisée en se remettant à l'AIE pour la vision d'ensemble forçément influencée par les lobbys pétroliers et les pays grands consommateurs

* J'accuse les organisateurs de la COP26 de suivre le business as usual sans annonce majeure

* J'accuse enfin l'Opep et les rentiers qui donnent le mauvais exemple avec des prévisions de consommation de pétrole jusqu'à 250 à 50 millions de barils/jour

Et l'Algérie dans tout ça ?

Notre pays a connu une vague de chaleurs exceptionnelles durant l'été, des départs de feu qui ont ravagé une partie du pays : 90 000 hectares partis en fumée. Les projections futures sur l'Algérie «montrent que les saisons chaudes continueront à s'étendre au-delà des périodes estivales et le stress hydrique sera structurel. La consommation débridée des énergies fossiles ne nous exonère pas de notre responsabilité dans la catastrophe humanitaire à venir.

L'embellie actuelle des hydrocarbures nous incite à la paresse. En une semaine, nous brûlons 800 millions de m3, soit 800 millions de dollars, et 400 000 tonnes de pétrole, soit 200 millions de dollars. Un total de 1 milliard de $/semaine ! Il nous faut sortir du sortilège du baril et de la rente. Il faut se battre au lieu de se tenir le ventre en surveillant les convulsions du baril. Miser sur les économies d'énergie et les renouvelables (géothermie, bois, solaire, éolien) qui devraient être mobilisées et arriver sans tarder à un nouveau modèle de consommation à la fois sobre mais qui mise sur les économies d'énergie avec le Plan H2 ! Nous ne faisons pas les efforts qu'il faut par manque de stratégie d'ensemble. La plantation d »un milliard d'arbres d'ici 2030 pourrait avec la détermination nous permettre aussi de mobiliser des fonds verts pour le barrage vert. Nous perdons du temps. et le temps travaille contre nous. Nous devrons mettre en place une stratégie permanente Énergie-Climat constamment adaptable et réinventer un nouveau (Schéma National D'Aménagement du Territoire) SNAT totalement différent en proposant des solutions spécifiques par région. Tous ces projets vont créer de la richesse.

Conclusion

Que dire de la justice énergétique et la justice climatique pour les damnés de la Terre quand on sait qu'un plein de 4×4 en biocarburant, soit 225 kg de maïs transformé, peut nourrir un Sahélien pendant une année ! Se concentrer sur la justice sociale et les besoins humains fondamentaux, le péril d'un climat erratique qui impactera en premier les déshérités de la Terre. Il y a près de 15 ans, Jared Diamond dans Effondrement nous répond : «L'humanité est engagée dans une course entre deux attelages. L'attelage de la durabilité et celui de l'autodestruction. Aujourd'hui, les chevaux courent à peu près à la même vitesse et personne ne sait qui va l'emporter.»(15)

Josée Boileau compare les efforts concernant la maîtrise de la pandémie avec le laisser-aller concernant l'imminence des changements climatiques. Mais qu'attendent-ils pour s'attaquer ensemble, et de façon sérieuse, aux changements climatiques ? Il n'y a pas que la crise sanitaire qui a cours, il y a aussi une crise environnementale. «No Safe Place» - aucun refuge -, titrait The Economist pour résumer l'affaire, fin juillet. En dépit des données qui s'accumulent, ça ne bouge pas vite sur le front environnemental (...) Un virus serait-il plus facile à circonscrire que des gaz à effet de serre ? Nous connaissons depuis longtemps la source de nos problèmes et quoi faire pour les régler : si, pour cause de pandémie, les élus ont été capables de mettre en place des règles très contraignantes à suivre dans les commerces, les entreprises et les lieux publics, ils peuvent être aussi exigeants pour l'environnement, d'autant plus que la gestion des dérives climatiques coûte cher.(16)

La seule issue encore possible pour régler le problème de la température est de diviser par deux la consommation d'énergie fossile. La COP26 pourrait décider de fixer les quotas de CO2 sur la base contraignante contrairement à la COP21 qui nous a menés à la situation actuelle. Il est temps de nous unir et de faire preuve de coopération et d'équité pour faire face à l'urgence climatique. Quand un Européen consomme 4tep/an est-il deux fois moins heureux qu'un Américain à 8tep/an? Un Chinois à 2,5 tep/an se développe. Par contre, un Sahélien à 0,5tep/an n'a pas accès à un Smic de dignité énergétique.

C'est de cela que les Nations Unies devraient s'occuper au lieu de faire des communiqués sans lendemain. Imaginons que la moyenne mondiale soit fixée à 1tep/an/habitant et que les pays développés fassent des sacrifices pour aller à l'essentiel à 3tep/an/hab. Cela permettrait d'aller résolument vers une pollution à 15 milliards de tonnes de CO2. Nous aurons divisé par deux le recours aux fossiles en donnant un coup d'accélérateur aux énergies renouvelables et en sortant de l'ébriété énergétique inutile pour aller à la sobriété énergétique heureuse, synonyme de partage et de solidarité. La COP26 ne devrait pas être celle qui amène l'humanité à la 6e extinction.

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique Alger

Notes

1. Anne Cagan 23 septembre 2021  numerama.com

2. Rachida Boughriet  actu-environnement.com
3.   Lemonde. fr/economie /article/2021 /09/21/malgre-les-engagements-des-majors-le-vieux-monde-tarde-a-mourir-dans-l-industrie-du-petrole_6095443_3234.html

4.  carfree.fr
5. Jacquard A. et Amblard H., 2014, Réinventons l'humanité, Sang de la terre, Paris, 156 pages  https:  journals.openedition.org

6.  lexpress.fr

7.  culture-tops.fr

8. Ghislain Rocheleau  ledevoir.com 27 décembre 2018

9.  fredzone.org

10.  https:   ledevoir.com/opinion /idees/621591idees-stop-a-la-croissance-et-aux-ecoles-d-economie-et-de-gestion

11 Silouane Bourel  liberation.fr

12. Nadia Drake  nationalgeographic.fr

13. fr.m.wikipedia.org

14. Nathalie Mayer 01/08/2021  futura-sciences.com

15. Frédéric Joignot  lemonde.fr
16. Josée Boileau  lactualite.com? 8 septembre 2021

Référence :

 lesoirdalgerie.com 03.10.2021

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