30 octobre 2021
'«C''est la première fois, à notre connaissance, que les États-Unis demandent l''aide d''un tribunal britannique pour obtenir la compétence sur une personne dont les preuves suggèrent qu''elle a envisagé, sinon comploté, l''assassinat, l''enlèvement, l''empoisonnement de cette personne.'»
C''est ce qu''a déclaré hier le représentant du fondateur de WikiLeaks Julian Assange, Mark Summers QC, devant laa Royal Courts of JusticeCour royale de justice de Londres.
Les États-Unis cherchent à obtenir l''extradition d''Assange pour répondre aux accusations portées en vertu de la loi sur l''espionnage, qui prévoit une peine de prison à vie pour avoir révélé une série de crimes d''État, notamment des crimes de guerre et des violations des droits de l''homme.
Tout au long des années de procédure, le mensonge central sur lequel s''appuie l''accusation est que le gouvernement américain procède équitablement par les voies appropriées pour assurer le transfert légal d''Assange, comme dans tout autre cas d''extradition.
Mais, comme l''a dit Summers hier, '«rien dans cette affaire n''est normal'».
Assange fait l''objet d''une chasse à l''homme massive et multiétatique vqui visante à le punir pour sa dénonciation des crimes impérialistes contre les peuples du monde et à le réduire au silence pour toujours.
Les avocats américains et les tribunaux britanniques ont travaillé sans relâche pour exclure ou ignorer cette réalité, créant un monde imaginaire dans la salle d''audience. Hier, à la lumière des révélations faites le mois dernier par Y«Yahoo ! News,», selon lesquelles la CIA aurait discuté des plans d''assassinat d''Assange, ses avocats ont mis cette mascarade en pièces.
Summers a expliqué: '«Il s''agit d''un cas où il existe des preuves crédibles de plans du gouvernement américain, longuement élaborés, visant à causer un préjudice grave à M. Assange.'».
Faisant référence aux assurances américaines récemment produites selon lesquelles M. Assange sera bien traité en Amérique, et aux arguments de l''avocat américain James Lewis QC selon lesquels ces assurances doivent être prises '«de bonne foi'», Summers a demandé aux juges de la Haute Cour de '«prendre du recul pour un instant'» et de considérer '«la réalité de cette affaire'».
Summers les a dirigés vers l''enquête de Yahoo ! News, '«Kidnapping, assassination and a London shoot-out: Inside the CIA's secret war plans against WikiLeaks'Kidnapping, assassinat et fusillade à Londres: Les plans de guerre secrets de la CIA contre WikiLeaks», qui, selon lui, permet de '«bien comprendre jusqu''où la CIA était prête à aller en ce qui concerne M. Assange'».
Résumant l''article, Summers a déclaré que la publication par WikiLeaks du '«Vault 7'», qui contient des outils de surveillance électronique et de cyberguerre de la CIA, '«a provoqué ce que d''anciens responsables américains décrivent diversement comme '"un désir de revanche'", '"une fureur'", '"voir du sang'", '"une obsession'" et '"un désir de vengeance'"'».
Cela a conduit l''ancien directeur de la CIA et secrétaire d''État américain Mike Pompeo à '«désigner WikiLeaks comme une agence de renseignement hostile non étatique'», à accorder à la CIA des pouvoirs supplémentaires pour agir contre elle, et à '«mener des discussions sur le meurtre de M. Assange.'».
Il a poursuivi en disant que '«la CIA a discuté de son enlèvement et de son rapatriement en Amérique'» et que cela '«a conduit à la mise en place d''accusations afin d''avoir quelque chose en place au cas où ils le remettraient aux États-Unis.».'
Les conversations entre la CIA et UC Global, la société qui a assuré la sécurité de l''ambassade d''Équateur où Assange a demandé l''asile, comportaient '«des discussions sur l''enlèvement et l''empoisonnement'».
Summers a conclu en disant que '«ce que l''on sait maintenant'», c''est que les révélations d''UC Global évoquées lors de l''audience initiale sur l''extradition étaient '«potentiellement la pointe de l''iceberg et que les plans de la CIA concernant M. Assange vont beaucoup, beaucoup plus loin que cela'».
En ce qui concerne les conditions de vie à l''ambassade, le collègue de Summers, Edward Fitzgerald QC, a évoqué la '«situation menaçante et effrayante'» dans laquelle se trouvaient Assange et sa famille. Il s''agissait notamment de '«la surveillance de M. Assange par UC Global, en coopération avec une agence américaine...... Ils prenaient les notes des conseillers et des avocats et les photocopiaient, recherchaient de l''ADN dans les couches des [enfants d''Assange et de sa compagne] Stella Moris, et parlaient même d''empoisonner, de tuer ou d''enlever M. Assange'».
Ces mots condamnent le gouvernement britannique et son système judiciaire en tant que complices dans un assassinat au ralenti, qui se déroule au vu et au su de tous, sous le plus mince vernis de pseudo-légalité.
Même si les États-Unis ne peuvent pas obtenir le meurtre immédiat et direct d''Assange, ils cherchent à atteindre le même objectif en le jetant dans le trou le plus profond que le système juridique américain puisse creuser.
Les avocats des États-Unis ont suggéré mercredi que les assurances données par les États-Unis au Royaume-Uni enlevaient la possibilité d''emprisonner Assange dans le cadre de mesures administratives spéciales, ou dans la prison ADX Florence du Colorado, ce qui impliquerait un isolement extrême équivalent à la torture et un isolement du monde extérieur. Summers a rétorqué jeudi que ces assurances sont '«conditionnelles, qualifiées et aspirationnelles'ambitieuses» et qu''elles peuvent être retirées sur l''avis d''agences telles que la CIA.
Summers a déclaré que le sort d''Assange '«est probablement déjà scellé'». Il a conclu: '«La probabilité écrasante est que...... cela se produira et cela se produira indépendamment de ce que les médecins disent au sujet de l''isolement qui pourrait conduire à sa mort'».
S''exprimant à l''extérieur du tribunal après l''audience, le rédacteur en chef de WikiLeaks, Kristinn Hrafnsson, a expliqué que les mesures administratives spéciales (MAS) '«signifient fondamentalement la torture et, pour Julian dans son état, la mort...... Les juges n''ont que deux choix. En gros, maintenir la décision de ne pas extrader Julian Assange ou prononcer de facto une condamnation à mort'».
Signe de l''importance de cette affaire pour le Royaume-Uni, cette décision a été confiée au plus haut juge du pays, le Lord Chief Justice d''Angleterre et du Pays de Galles Ian Burnett, Baron Burnett de Maldon. Il siège dans cette affaire aux côtés du Lord Justice Timothy Holroyde.
Leur attitude face à la criminalité manifeste décrite par Summers et Fitzgerald a étéa été résuméeée par l''interjection de Holroyde: ' «Je n''aurais pas pensé que le fait que la CIA et la communauté du renseignement américaine s''intéressent de près à M. Assange soit une position controversée. '».
Summers a étéa été contraintt de répondre: '«Ce qu''ils sont prêts à faire à son égard est une autre question.'».
Holroyde est intervenu à plusieurs reprises au cours des deux jours d''audience pour contester les arguments de la défense et, à une occasion, a semblé approuver ouvertement un point de l''accusation.
Stella Moris a déclaré après l''audience: '«Il s''agit d''une persécution politique qui a utilisé la loi, la loi sur l''extradition, comme un outil pour atteindre un objectif politique. Pour se venger d''un journaliste. Pour quelle raison ? Pour les publications pour lesquelles il est maintenant inculpé. Des publications qui ont révélé des crimes de guerre, des assassinats ciblés, des restitutions, de la torture......»
'«Cette affaire d'extradition américaine s'est effondrée depuis le début parce qu'elle est née pourrie. Elle est née à un moment où la CIA complotait pour assassiner Julian. Et elle s'avère également dévastatrice pour les États-Unis devant les tribunaux. Non seulement parce que le système carcéral américain et ses conditions inhumaines sont démasqués devant ces tribunaux dans toute leur barbarie. Mais aussi parce que les crimes commis par le gouvernement américain contre Julian sont également démasqués devant ces tribunaux».
«Aujourd'hui, nous avons pu diffuser au tribunal les plans de Mike Pompeo, ses 'croquis' et ses 'options ' pour assassiner Julian à Londres. Assassiner un journaliste dans cette ville pour avoir fait son travail parce qu'il a démasqué leurs crimes.»
Ce n'est pas seulement l'affaire américaine qui est pourrie, mais chaque planche et pilier de la démocratie bourgeoise, qui ne peut même plus faire semblant de défendre les droits juridiques et humains les plus élémentaires. La persécution d'Assange est l'expression la plus nette du fait que les tensions de classe et géopolitiques atteignent des niveaux si extrêmes que les gouvernements du monde entier sont amenés à adopter les méthodes de la dictature, y compris l'exécution politique.
Les juges de la Haute Cour vont maintenant examiner leur décision, dont la date limite n'a pas encore été fixée. Tous les efforts doivent être faits pour utiliser ce temps pour la construction d'une campagne de défense de masse, enracinée dans la seule force sociale qui peut garantir la liberté d'Assange face à des adversaires aussi impitoyables, la classe ouvrière internationale.
(Article paru en anglais le 29 octobre 2021)