02/11/2021 infomigrants.net  2 min #197306

En Tunisie, la ville de Zarzis submergée par les cadavres de migrants

Le cimetière "Jardin d'Afrique" compte déjà environ 500 tombes, pour une capacité de 800 places. Crédit : Dana Alboz / InfoMigrants

Leslie Carretero, envoyée spéciale en Tunisie.

"C'est devenu une habitude, c'est à Zarzis de s'occuper des morts". Mekki Larayedh, le maire de la ville côtière du sud de la Tunisie, semble un brin agacé. L'édile ne supporte plus que sa commune soit devenue au fil des années le lieu de sépulture des cadavres de migrants rejetés par la mer.

Partis de Libye ou parfois de Tunisie, de nombreux migrants font naufrage en mer Méditerranée. Leurs corps sont repêchés au large, ou s'échouent sur les plages du sud tunisien en raison des courants marins.

Et Zarzis n'accueille pas seulement les milliers de corps retrouvés le long de ses côtes. La ville prend aussi en charge ceux récupérés dans tout le pays. Y compris aux frontières. Fin octobre, un Africain subsaharien est mort à la lisière de l'Algérie et de la Tunisie. La région a demandé à Zarzis de s'occuper de son inhumation. "C'est pas à nous de gérer les dépouilles de toute la Tunisie", peste Mekki Larayedh.

En Tunisie, les municipalités sont réticentes à accueillir les cadavres des exilés. Beaucoup arguent qu'elles manquent de places. Des exceptions existent : quelques cadavres ont bien été enterrés dans certains cimetières du pays mais la démarche reste exceptionnelle.

Des cadavres déchargés depuis des bennes à ordures

Que faire alors des corps de migrants dont personne ne veut ? En 2005, la municipalité de Zarzis a créé le cimetière des inconnus sur une ancienne décharge éloignée du centre-ville, dans une zone désertique. En 15 ans, au moins 500 corps y ont été enterrés, même si le nombre est difficile à estimer tant le lieu a été fait à la hâte.

"Il y a quelques années, on voyait des bennes à ordures de la mairie décharger les cadavres dans des fosses communes, sans en prendre soin, comme si c'était des déchets. Les morts étaient ensuite recouverts de terre", se souvient Mongi Slim, responsable du Croissant-rouge tunisien, en regardant le terrain désormais recouvert de grillages.

Les employés de la mairie ne sont pas formés à manipuler les dépouilles, parfois en décomposition, et ne possède aucun équipement particulier : ni combinaison, ni paire de gants, ni camions frigorifiques. C'est donc dans des camions-poubelles que sont transportés les corps.

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