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Ce week-end, les projecteurs étaient tournés vers le fléau de la faim dans le monde. Aux États-Unis, Elon Musk s'est dit prêt à céder six milliards de dollars pour aider, sous certaines conditions. En France, c'est une cinquantaine de gamers qui se sont réunis pendant trois jours pour lever des fonds.
Le Programme alimentaire des Nations Unies (PAM) en appelle aux fortunes mondiales
David Beasley, directeur du PAM, a annoncé sur CNN que "6 milliards de dollars pourraient aider 42 millions de personnes, qui vont littéralement mourir". Ce faisant, il espérait inciter les plus fortunés à faire un geste. La réponse d'Elon Musk ne s'est pas faite attendre :
Si le PAM peut décrire précisément sur ce fil Twitter, comment six milliards de dollars peuvent résoudre le problème de la faim dans le monde, je vendrais des actions Tesla dès maintenant pour le faire. Mais, il faut une comptabilité en "open data" afin que tout le monde puisse voir précisément comment l'argent est dépensé.
Le milliardaire soupçonnerait-il le PAM d'utiliser l'argent reçu pour servir d'autres fins ? Quoi qu'il en soit, David Beasley a immédiatement saisi sa chance pour expliciter son propos :
Traduction : "Le titre n'est pas précis. Six milliards de dollars ne résoudront pas la faim dans le monde, mais ils empêcheront l'instabilité géopolitique, les migrations de masse, et sauveront 42 millions de personnes au bord de la famine. Une crise sans précédent et une tempête parfaite due aux crises de covid/conflit/climat. Avec votre aide, nous pouvons apporter l'espoir, construire la stabilité et changer l'avenir. Parlons-en : ce n'est pas aussi compliqué que Falcon Heavy, mais l'enjeu est trop important pour ne pas avoir, au moins, une conversation. Je peux avoir le prochain vol jusqu'à vous. Jetez-moi dehors si vous n'aimez pas ce que vous entendez !"
Puis, s'est ensuivi un dialogue que l'on devine assez stérile ; d'un côté Elon Musk qui attend les preuves de transparence des flux financiers, de l'autre David Beasley qui insiste pour que les échanges se fassent en dehors de Twitter.
Un événement plus concret en France : le ZEvent
De l'autre côté de l'Atlantique, en France, une cinquantaine de joueurs se sont rassemblés afin de récolter des fonds pour l'association "Action contre la faim". Ils sont tous des figures plus ou moins reconnues du monde des jeux vidéos, exerçant presque exclusivement sur Twitch et YouTube. Si certains d'entre eux sont suivis pour leurs performances, d'autres s'illustrent davantage dans le divertissement, l'animation. Mais, ça ne s'arrête pas là ; depuis quelques années déjà, les plus motivés (et suivis) ont réussi à organiser de grands événements autour du jeu vidéo.
Le plus célèbre étant le ZEvent. Organisé chaque année depuis 2016, cofondé par Adrien Nougaret (Zerator) et Alexandre Dachary, il s'agit d'un projet caritatif. Comme ils l'expliquent sur leur site, "le but est de rassembler plusieurs animateurs spécialisés dans le streaming de jeux vidéo sur Internet pour un marathon s'étalant sur tout un week-end." Ainsi, pendant plus de 50 h, lesdits streamers jouent en direct, et le public donne. Emmanuel Macron le premier, avait encouragé l'événement :
En 2016, ils avaient réussi à récolter 170 000€ pour l'association "Save the children". Depuis, ils battent leur record chaque année. En 2020, c'est Amnesty International qui a bénéficié de 5 700 000€. Ce week-end, ils ont récolté plus de dix millions d'euros pour "Action contre la faim". Un résultat que le président n'a pas manqué de féliciter, toujours sur Twitter :
Quel combat mène-t-on vraiment ?
Si l'intention est certainement louable, et concrète, on est en droit de se poser la même question qu'Elon Musk : où va (vraiment) l'argent ? D'autant que l'ONG "Action contre la faim", forte de 300 salariés rien qu'en France, fait partie des plus importantes. Aussi de celles qui essuient régulièrement des salves de critiques concernant leurs actions et financements... Dont ils se défendaient par avance sur leur site, en prévision du ZEvent. On lisait il y a quelques années de cela déjà, dans la Revue Frustration, que l'ONG servait un discours politique déguisé en humanitaire, qui permettait surtout de masquer le "bruit et l'odeur", comme disait Jacques Chirac. "Culpabiliser et dépolitiser", peut-on lire dans le même article. L'année d'après, c'est l'humoriste Jérémy Ferrari qui tirait à boulets rouges, dénonçant les "méthodes putassières" d'Action contre la faim et pointant du doigt le budget alloué au "fonctionnement" de l'ONG.
En tout cas, que ce soit sur Twitter ou sur Twitch, le combat contre la faim semble se mener sur les écrans.