Régionales, gouvernementales et municipales, les «méga-élections» qui se tiennent ce 21 novembre au Venezuela sont scrutées à la loupe comme un test préfigurant un possible nouveau départ pour le président Nicolas Maduro, qui cherche à faire lever les sanctions occidentales sur son pays, mais aussi pour l'opposition qui espère avoir les garanties d'un scrutin présidentiel qu'elle jugera démocratique en 2024.
Plusieurs missions d'observation internationales assistent à ces élections dont celle de l'ONU ou de la fondation Carter. Plus rare : une mission de l'Union européenne (UE) est arrivée à Caracas le 29 octobre. Une première eu égard aux tensions entre l'UE et le Venezuela qui étaient si prégnantes ces dernières années. «Cette mission est indépendante, impartiale, neutre», a affirmé sa chef, l'eurodéputée portugaise Isabel Santos. «Nous allons observer tout le processus : campagne électorale, organisation, vote, dépouillement, les réclamations s'il y en a... On produira ensuite un rapport», a-t-elle détaillé. Le 18 novembre, 34 observateurs à «court terme» ont rejoint la mission qui comprend désormais plus de 130 membres. «J'ai été très bien accueillie. Il n'y a rien à dire, tout est tout à fait normal», avait déclaré Isabel Santos à la presse fin octobre, dans un contexte de récentes tensions entre l'UE et Caracas. Le 17 novembre, elle ajoutait espérer que la mission qu'elle dirige soit «un facteur de plus grande confiance et de transparence pour les Vénézuéliens».
Le président Nicolas Maduro qui compte sur ces élections pour les présenter comme une garantie démocratique afin d'espérer en retour la levée des sanctions économiques et la fin de la mise au ban de son gouvernement sur la scène internationale, appelle l'ensemble des Vénézuéliens à voter. «Les élections 21 novembre revêtent une grande importance pour le pays, car elles entérinent le respect du calendrier électoral et défendent une démocratie renforcée, malgré les tentatives des Etats-Unis, de l'Europe et de leurs laquais de salir et de vilipender notre souveraineté», a déclaré le président à la télévision publique.
Nicolas Maduro a estimé que ce scrutin permettrait les «retrouvailles», «la réunification», «le pardon et le rapprochement» entre les Vénézuéliens.
L'opposition divisée
Une partie importante de l'opposition, qui avait décidé de boycotter au moins les quatre dernières élections organisées dans le pays en raison de la méfiance qu'elle avait à l'égard du Conseil national électoral (CNE), prendra part à ces élections.
Les principaux partis qui la composent ont ainsi rompu avec leur stratégie de boycott, pour notamment entrer au CNE. Mais, très divisée, ils peinent à mobiliser leurs troupes démotivées, et aspirent à créer un mouvement de fond en vue de la présidentielle de 2024. «Indépendamment du résultat, il doit y avoir une réorganisation et une relance de toutes les forces démocratiques», a affirmé le 20 novembre Henrique Capriles, deux fois candidat à la présidentielle du pays, qui a appelé les Vénézuéliens à voter, même s'il se dit pessimiste sur les résultats. Il a ainsi reconnu que sans union, «soyons honnêtes : le PSUV [Parti socialiste uni du Venezuela, au pouvoir] va gagner». Selon observateurs et sondeurs, le chavisme est en effet en excellente position pour remporter une large victoire, profitant notamment de cette très grande division de l'opposition qui, selon les estimations, pourrait l'emporter dans six Etats tout au plus.
Une division de l'opposition à laquelle l'opposant préféré de Washington n'est certainement pas étranger. Juan Guaido, autoproclamé président par intérim en 2019 et reconnu comme tel par les Etats-Unis et leurs alliés, a annoncé ne pas voter et persiste dans la stratégie du boycott, employant un discours visant à évincer le président Maduro, sans compromis. «Voter ou non... il n'y a pas de dilemme, il y a une certitude, Maduro est et continuera à être illégitime», 𝕏 a déclaré Guaido qui ne jouit d'aucun mandat électif. «Les conditions ne sont pas réunies pour un scrutin libre et juste au Venezuela», assure-t-il dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux. Sa position sans concession et son alliance totale avec l'interventionnisme étasunien font que Juan Guaido est isolé, et de plus en plus inaudible au sein même de l'opposition vénézuélienne.
Le gouvernement du président Nicolas Maduro, qui aimerait une levée des sanctions économiques internationales contre son pays, est engagé depuis août dans un dialogue avec l'opposition. Caracas, dont une partie des fonds à l'étranger sont gelés, veut pouvoir vendre son pétrole (dont les Etats-Unis étaient le principal acheteur), et pouvoir importer sans difficultés.
Vingt-et-un des 30 millions de Vénézuéliens doivent voter ce 21 octobre avec des machines pour élire, entre 70 000 candidats en lice, 23 gouverneurs, ainsi que les maires et conseillers de 335 communes de ce pays touché par une très forte crise économique.
Meriem Laribi
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