© David CHAN Source: AFP
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Des policiers arrêtent un manifestant du «Convoi de la liberté», à Ottawa, le 17 février 2022.
18 févr. 2022, 08:20
Le police a procédé à des arrestations ciblées de meneurs du mouvement de contestation contre les restrictions sanitaires qui bloque en partie les rues d'Ottawa depuis bientôt trois semaines et conduit l'exécutif à adopter des mesures d'exception.
Dans la soirée du 17 février, la police canadienne a procédé aux premières arrestations ciblées de meneurs du Convoi de la liberté, le mouvement anti-mesures sanitaires qui bloque une partie des rues d'Ottawa depuis le 29 janvier. Selon le Premier ministre Justin Trudeau, cette contestation n'aurait plus rien de «pacifique».
«Si vous voulez partir de votre propre gré, c'est maintenant qu'il faut le faire», avait lancé aux manifestants dans l'après-midi le chef intérimaire de la police d'Ottawa, Steve Bell. Il a averti que ce week-end serait «bien différent des trois derniers».
Dans la soirée, la police a procédé aux premières arrestations : Tamara Lich, l'une des organisatrices du Convoi de la liberté, a été interpellée par la police, a indiqué dans un tweet le compte officiel du mouvement, vidéo à l'appui. Sur les images, on la voit, menottes aux poignets, monter dans une voiture des forces de l'ordre, entourée de deux policiers, et crier à ses compagnons «tenez bon !».
Un peu plus tôt, un autre leader, Chris Barber, avait été interpellé. Une arrestation qui s'est déroulée dans le calme, là aussi filmée et postée sur les réseaux sociaux par des membres du mouvement.
Pour la première fois depuis le début de la contestation, des groupes de policiers s'étaient positionnés en masse le 17 février dans les rues d'Ottawa face aux contestataires et aux centaines de camions bloquant les rues. «Nous sommes prêts à agir pour expulser les manifestants illégaux de nos rues», avait encore expliqué Steve Bell, parlant d'une intervention «imminente».
Un périmètre de sécurité a été érigé autour du centre-ville et une centaine de barrages permettent de contrôler les entrées dans la zone.
Des mesures d'exception prises contre les manifestants
A quelques mètres de là, le Premier ministre Justin Trudeau a estimé dans la matinée du 17 février que cette contestation n'avait plus rien de «pacifique», lors d'un débat historique à la Chambre des communes portant sur la mise en œuvre de la loi sur les mesures d'urgence, une disposition exceptionnelle invoquée le 14 février pour la deuxième fois de l'histoire du Canada en temps de paix.
Dans une lettre adressée aux Premiers ministres des provinces dans la soirée du 16 février, il avait estimé que le mouvement «menaçait la démocratie» et minait «la réputation du Canada à l'étranger». «L'objectif de toutes les mesures, y compris les mesures financières prévues dans la loi sur les mesures d'urgence, est de faire face à la menace actuelle et de maîtriser pleinement la situation», a ajouté Justin Trudeau.
Des comptes bancaires d'individus et d'entreprises liés au blocage ont ainsi été gelés, a précisé lors d'une conférence de presse la ministre des Finances et vice-Première ministre Chrystia Freeland.
Qualifiant la situation de «précaire», le ministre de la Sécurité publique Marco Mendicino a quant à lui estimé que «les blocus illégaux aux frontières» avaient coûté des milliards de dollars à l'économie canadienne.
La police prête à «employer certaines techniques qui ne sont pas couramment vues à Ottawa»
Les manifestants, déterminés à rester «jusqu'à la fin», avaient reçu le 15 février un ultimatum des forces de l'ordre, qui ont fait le tour des camions pour distribuer un tract leur intimant l'ordre de «quitter les lieux».
«Ils essaient de faire peur aux gens pour éviter qu'ils ne viennent ce week-end», a commenté auprès de l'AFP le camionneur Kevin Veurink, 39 ans, réagissant à l'installation de barricades autour de l'enceinte parlementaire. Pull gris avec logo «Liberté ensemble» sur le dos, cet Ontarien qui transportait un chariot avec des bidons d'essence pour le ravitaillement des camions se dit prêt à rester «jusqu'à ce qu'on se fasse arrêter, si cela arrive».
Le nouveau chef de la police d'Ottawa avait déclaré le 16 février être prêt à «employer certaines techniques qui ne sont pas couramment vues à Ottawa».
Un mélange de pluie et de neige pourrait cependant compliquer les opérations de la police, confrontée à une situation complexe et périlleuse pour déloger les manifestants sans heurts. Elle craint notamment la présence d'«éléments radicaux» mais doit aussi tenir compte de la présence de nombreux enfants dans la manifestation - y compris des bébés.
La ville d'Ottawa, la province de l'Ontario et le Canada tout entier sont sous état d'urgence en raison de ce mouvement de contestation sans précédent, parti de l'opposition des camionneurs à se faire vacciner contre le Covid-19 pour franchir la frontière entre le Canada et les Etats-Unis. Minimisé au départ par les autorités, le mouvement s'est étendu ces dernières semaines à l'ensemble des mesures sanitaires et, pour de nombreux manifestants, à un rejet du gouvernement de Justin Trudeau.