Un tribunal britannique vient d'autoriser l'extradition du journaliste lanceur d'alerte Julian Assange aux USA, ce qui revient à « un permis de torturer », a déclaré l'un de ses avocats.
Le fondateur de Wikileaks, qui a passé les dix dernières années à l'ombre pour avoir révélé des crimes de guerre américains et britanniques en Irak et en Afghanistan, est en danger de mort.
« C'est l'ultime et horrible paradoxe, comme l'écrit le journaliste Jonathan Cook, que le sort physique et judiciaire d'Assange repose entre les mains des deux États qui ont le plus à perdre en lui permettant de recouvrer sa liberté et de publier d'autres vérités qu'ils veulent maintenir cachées. En requalifiant son journalisme en « espionnage » - motif de l'extradition états-unienne - ils sont déterminés à ne pas laisser le génie sortir de la bouteille ».
« L'issue pour Julian Assange n'est que très légèrement moins prédéterminée qu'elle ne l'était pour Jamal Khashoggi quand il a pénétré dans l'ambassade saoudienne à Istanbul. L'objectif des responsables américains a toujours été de faire disparaitre à jamais Julian Assange. Peu leur importe la façon d'y parvenir », annonçait Jonathan Cook.
Aux USA, il peut être enfermé pour une durée de 175 ans en isolement strict dans une prison de sécurité maximale. Et cela malgré son état de santé catastrophique, à l'isolement dans la prison anglaise de haute sécurité de Belmarsh, où il croupit depuis deux ans, et l'accident vasculaire-cérébral (AVC) qu'il a fait lors de l'une de ses audiences.
Les USA ont donné « l'assurance que des mesures seraient mises en place pour garantir que Julian Assange ne puisse se suicider », ce qui fait froid dans le dos, sachant le sort que les Etats-Unis réservent à certains prisonniers politiques. Sans parler du fait que les « assurances » en question sont assorties de clauses suspensives qui peuvent être annulées, par exemple, si les responsables états-uniens considèrent que Julian Assange n'est pas assez coopératif...
Nils Melzer, l'expert des Nations Unies en matière de torture, a prévenu à maintes reprises que Julian Assange est soumis à une torture psychologique prolongée depuis le moment où il a cherché refuge à l'ambassade de l'Équateur à Londres, il y a neuf ans, en quête d'asile pour échapper aux tentatives de persécution des États-Unis.
Mais Julian Assange est impardonnable parce qu'il a montré que les gouvernements occidentaux revendiquant la supériorité morale, commettent en réalité des crimes en notre nom dans des pays lointains hors de notre vue.
« Avec Julian Assange réduit au silence, commentait le journaliste britannique basé à Nazareth, la politique étrangère occidentale peut tranquillement revenir à l'époque où elle n'avait aucun compte à rendre, celle qui existait avant que Julian Assange n'ébranle tout le système par ses révélations. Aucun journaliste n'osera refaire ce que Julian Assange a fait - à moins qu'ils ne soient prêts à passer le restant de leur vie derrière les barreaux. »
Et pire que leur absence de courage, il y a la manière dont bon nombre de journalistes, -du Figaro au Monde- se sont désolidarisés de Julian Assange après avoir exploité ses informations.
Nos élus français ne sont pas glorieux non plus, eux qui ont rejeté le 4 février dernier une résolution transpartisane pour que la France accorde l'asile politique au journaliste Julian Assange. Proposition rejetée par 31 voix contre 17, car seulement 48 députés ont participé au vote à l'Assemblée Nationale !
« Si des crimes chinois ou russes plutôt que des crimes américains avaient été révélés par Assange. S'il avait été un journaliste chinois ou russe, il aurait reçu le prix Nobel, serait la vedette de la Journée internationale des droits de l'homme, et son portrait aurait figuré en proue du sommet sur la démocratie du Président Joe Biden », a commenté pour sa part, le Cri des Peuples, George Gallaway, ancien député britannique.*
Son « crime », cependant, est d'avoir dénoncé, entre autres, les crimes de guerre des États-Unis en Irak, y compris des assassinats et plus de 15 000 morts non signalées de civils ; la torture d'hommes et de garçons âgés de 14 à 89 ans, à Guantanamo ; le fait que les États-Unis espionnent illégalement les secrétaires généraux de l'ONU et d'autres diplomates ; le coup d'État militaire initié par la CIA au Honduras en 2009 ; et la guerre secrète des États-Unis contre le Yémen au cours de laquelle des dizaines de milliers de personnes ont été tuées.
« Dans toute sa splendeur à perruque, la Haute Cour de Londres vient de porter un coup mortel, non seulement aux fragments, aux lambeaux, de la justice britannique, mais ils ont assassiné le journalisme lui-même. Et, étant donné que le quatrième pouvoir, en théorie, est une sentinelle de la démocratie elle-même, ils ont tué le prétexte que le Royaume-Uni est lui-même une démocratie », a écrit George Galloway, également connu pour sa défense des droits palestiniens et pour les missions spectaculaires de secours aux Gazaouis qu'il a effectuées.
Il explique : « L'affaire Assange aurait dû s'effondrer au vu même du traité d'extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis, car il est spécifiquement exclu qu'une personne puisse être extradée de l'un à l'autre pour faire face à des accusations politiques.
Des violations flagrantes presque innombrables de la procédure régulière auraient dû tuer la moindre chance d'extradition d'Assange. Permettez-moi d'en souligner trois.
Une fois qu'il est apparu que le gouvernement américain avait enregistré secrètement sur vidéo chaque rencontre juridique entre Julian Assange et ses avocats compétents et éminents pendant plusieurs années, l'affaire aurait dû être rejetée par tout juge qui se respecte, dans n'importe quelle démocratie.
Une fois qu'il est apparu que le témoin clé contre Assange était un voleur islandais, un fraudeur et un menteur condamné pour pédophilie, qui admet en outre maintenant librement que son témoignage (sur lequel les accusations sont basées) était un paquet de mensonges, tout vrai juge se serait prononcé contre le gouvernement américain..
Et une fois qu'il est apparu que le gouvernement américain avait élaboré des plans minutieux pour kidnapper Assange à Londres et, si nécessaire, l'assassiner devant Harrods dans les rues autour de l'ambassade équatorienne, la valeur de toute « assurance » américaine sur ce qui arriverait à Assange a touché le fond. On ne pouvait pas s'y fier. Et l'extradition ne pouvait pas être approuvée.
Les « journalistes » occidentaux, payés grassement pour leurs compétences en lecture de prompteurs, se taisent sur son sort et sur le sort de leur « métier ». Ils savent que si cela arrive à Assange, cela pourrait leur arriver, mais, comme la flèche qui vole dans la nuit, ils ont eux-mêmes tué il y a longtemps cette possibilité. Il n'y aura pas de matin heureux et confiant pour eux. Seulement de la servitude et des pièces d'argent. »
George Galloway a été membre du Parlement britannique pendant près de 30 ans. Il présente des émissions de télévision et de radio. C'est un cinéaste, écrivain et orateur de renom.
LIBÉREZ JULIAN ASSANGE !
CAPJPO-EuroPalestine