par Le Courrier des Stratèges
Les mises en scène autoritaires auxquelles la pandémie de COVID a donné lieu sont- elles allées trop loin ? Les événements de ces dernières heures illustrent la fragilité du pouvoir lorsqu'il s'exerce avec excès et déraison, et lorsqu'il instrumentalise les crises pour opprimer les peuples. En Chine, comme en France, la carapace se lézarde et pourrait donner lieu à des retournements imprévus de situation.
En Chine, les grandes villes sont désormais parcourues par des manifestants qui ressemblent beaucoup à nos résistants, mais aux dimensions et conditions particulières de cette immense fourmilière humaine. Des manifestations ont lieu un peu partout à Pékin, à Shangai, à Wuhan et dans d'autres villes moins connues comme le prouvent les images qui circulent sur Telegram ( profitez-en pour vous abonner à notre fil gratuit qui regorge d'informations toute la journée).
Visiblement, des manifestants, dans certains endroits, ont même lancé des slogans visant nommément Xi Jinping, ce qui est rare en Chine et témoigne d'une intensité particulière dans la crise qui couve. Partout, c'est la politique du Zéro-Covid et ses privations de liberté qui est contestée. Lors du dernier Congrès du parti communiste, qui a permis la réélection de Xi, l'intéressé a annoncé qu'il continuerait cette politique envers et contre tout. Visiblement, cette stratégie ne lui réussit pas ?
Faut-il en conclure que le pouvoir chinois est désormais menacé. Ce serait aller vite en besogne : pour l'instant l'impact des manifestations est difficile à cerner, le pouvoir reste solide, et il faudra suivre l'évolution des prochains jours pour mesurer l'ampleur exacte de la contestation. Mais démonstration est faite que le tout autoritaire et le tout sécuritaire a ses limites, même en Chine.
Au passage, on se souvient ici que de nombreux commentateurs français (pas toujours indépendants du pouvoir, il est vrai) avaient exprimé beaucoup d'admiration pour la Chine et sa capacité, lors de la pandémie, à imposer des mesures liberticides drastiques. Ils assistent désormais au revers de la médaille : l'opposition aux confinements semble avoir atteint une maturité en Chine qui constitue un exemple pour les Français.
Aberkane et France Soir dynamitent Fact & Furious
En France, le pouvoir a témoigné de la même faiblesse à l'occasion de l'affaire Fact & Furious révélée par Idriss Aberkane et France Soir.
Tout est parti des confidences faites à France Soir par Malika Daoust, l'épouse d'Antoine Daoust, fondateur du site de fact-checking Fact and Furious, « validé » par l'AFP. L'intéressée, qui dit avoir été victime de violences conjugales étouffées par les fact-checkers, a expliqué dans quelles conditions étranges son mari, ancien opérateur audiovisuel de l'armée ( selon les dires de la fiche Linkedin de Daoust) était devenu fact-checker, en un temps record, adoubé par le cartel des médias subventionnés.
C'est donc par une banale vengeance conjugale que la vérité éclate sur les coulisses du fact-checking : favoritisme, pilotage probable en sous-main par les autorités, et dénigrement systématique des opposants au pouvoir.
Nous y reviendrons dans la journée mais, pour l'instant, France Soir n'a pas évoqué les financements étranges du site de Daoust. Il n'est en tout cas pas impossible que cette affaire débouche sur une crise interne dans le milieu journalistique, qui fait tant ses gorges chaudes sur la déontologie du journalisme.
Ce week-end, le site de Fact and Furious avait brutalement disparu, sans crier gare. Daoust est parti comme il est arrivé : à la cloche. S'il fallait une preuve de l'insoutenable légèreté des médias, nous l'avons. Remercions-en France Soir et Idriss Aberkane, récemment victime d'un procès en crédibilité dressé par l'Express.
La macronie se vengera-t-elle d'Anne Hidalgo ?
Le trouble s'empare-t-il du pouvoir ? En tout cas, la garde d'Emmanuel Macron s'est prise les papiers dans le tapis ce week-end sur la question de la mise sous tutelle de la ville de Paris. Le ministre des Transports, Clément Beaune, a créé la surprise en expliquant que le gouvernement n'excluait pas de mettre Paris sous tutelle compte tenu du désordre financier qui y règne. Dans la foulée, Gabriel Attal, ministre des Comptes Publics, a démenti l'information.
Cette contradiction dans la jeune génération que Macron a porté au sommet de l'État est révélatrice des crises propres au macronisme. Nous disons « des », car cette joute interne par médias interposés montre d'abord que l'on peut être nouveau et n'avoir pas l'esprit collectif. Elle montre ensuite que des décisions politiquement aussi sensibles sont mal cadrées en macronie : un ministre des Transports annonce de possibles mesures relevant de la compétence d'un collègue qui les dément... Tout cela fait désordre et signale que, cinq ans après son arrivée au pouvoir, Macron n'a pas complètement vaincu les dérives de l'amateurisme politique qui lui était cher.
En tout état de cause, la période qui s'annonce sera tendue, et le gouvernement pourrait être mis en sévère difficulté.
source : Le Courrier des Stratèges