03/12/2022 arretsurinfo.ch  9 min #220058

Crimes de guerre ou génocide à Srebnica ?

Lors du conflit en Bosnie, les dirigeants occidentaux et les médias ont dénoncé le génocide qu'aurait commis les forces para-militaires Serbes envers des civils Bosniaques lors de leur évacuation de la localité de Srebnica en juillet 1995. Une remarque préliminaire s'impose : la guerre en Bosnie fut une guerre fratricide, qui raviva des haines anciennes et déchaîna des violences inter-communautaires. Mais les vrais responsables sont, d'abord, ceux qui planifièrent (1) la destruction de l'État multi-ethnique de Yougoslavie : les  »proxénètes de guerre » (2) comme les nomme Chris Hedge, les mêmes à l'origine du conflit actuel en Ukraine. Voir aussi les articles de Vladislav B.Sotirovic relatant « Les mythes et les vérités  sur Srebnica» (3).

De mai à décembre 1992, à Srebrenica et Batunac, les forces musulmanes de Bosnie ont tué plus de 3 500 Serbes.

Dans la présente contribution  Marc Jean analyse une étude publiée par une Commission internationale indépendante sur les souffrances de tous les peuples de la région de Srebrenica entre 1992 et 1995 [ICSR].

Par  Marc Jean - 03 décembre 2022 -  Arretsurinfo.ch

Cette Commission d'experts était présidée par Gideon Greif, historien israélien spécialiste de l'histoire des camps de concentration de la Deuxième Guerre Mondiale, notamment dans les Balkans. Il a été chercheur et professeur, entre autres, aux universités de Tel Aviv, Vienne, Austin et Miami. Il est un spécialiste mondialement reconnu sur l'histoire de l'holocauste et l'historien principal de l'Institut Shem Olam pour la documentation et la recherche sur l'holocauste en Israël. La Commission comporte également Yukie Osa, vice-président de l'Université de Rikkyo à Tokyo, spécialiste de Srebrenica et de l'assistance humanitaire internationale et le professeur Roger W. Byard, médecin légiste, qui tient la chaire de pathologie de l'université d'Adélaïde en Australie. Les autres membres de la commission sont tous d'éminents spécialistes reconnus dans leurs secteurs respectifs, comprenant deux Américains, un Italien, un Nigérian, un Autrichien, une Serbe et un Allemand. Les lecteurs intéressés se reporteront au document en annexe précisant leurs noms et compétences (4). Dans l'impossibilité de résumer les 1105 pages du volumineux rapport (5) écrit par cette Commission, nous nous sommes limité à évoquer certains points de cette étude, en nous basant sur l'article publié par Nikola Mircovic, le 11 juillet 2021 (6).

Précisons aussi que ce sont les autorités serbes de la Républica Srpska qui ont commandité cette étude et sollicité le professeur Greif pour en assumer la direction. Le parcours universitaire du Professeur Greif était censé lui conférer l'autorité et les compétences pour ce travail de recherche, et lui éviter les accusations usuelles de négationnisme....

Une enquête objective réalisée à partir de faits concrets et de témoignages des deux camps

L'enquête très détaillée menée par l'ICSR porta sur la région de Podrinje et des cinq municipalités de la ville de Srebrenica : Srebrenica, Bratunac, Zvornik, Milići et Vlasenica. Le rapport rappelle que le jour de Noël (7 janvier 1993 - Noël orthodoxe) entre 3 000 et 4 000 soldats musulmans de l'Armée de Bosnie et Herzégovine (ARBiH [Armija Republike Bosne i Hercegovine]) ont mené une campagne massive dans les environs de Bratunac, particulièrement à Kravica. Durant l'attaque tous les Serbes ont été expulsés, les villages ont été pillés et incendiés. Toutes ces incursions criminelles étaient menées depuis la base arrière de l'ARBiH à Srebrenica, qui était devenue une zone exclusivement musulmane.

Le rapport souligne donc qu'au début de la guerre, la région de Srebrenica avait été nettoyée ethniquement par les forces musulmanes et qu'un peu moins de 2000 Serbes avaient été tués et de nombreux étaient portés disparus. 150 villages serbes de la Republika Srpska avaient été détruits. A noter que jamais les médias occidentaux n'ont évoqué les drames subis par les populations serbes de cette région. On ne manquera pas de relever l'analogie avec les bombardements ukrainiens sur le Donbass provoquant des milliers de victimes et passés sous silence par les mêmes médias.

Ces drames ont été volontairement occultés, pour faire désigner, comme seuls responsables, les Serbes. Ce rappel est nécessaire pour comprendre la haine des Serbes envers les Bosniaques, haine qui explique, sans les justifier pour autant, les massacres commis à Srebnica par les milices serbes.

Des combats meurtriers ont mis aux prises les troupes bosniaques cherchant à forcer les lignes serbes avec les forces serbes

L'évacuation de 23 000 civils, essentiellement des femmes, des enfants et des personnes âgées, a été organisée en juillet 1995, vers le camp de l'ONU à Potocari. Cette colonne n'a pas subi d'attaques. Par contre, les combats ont causé la mort de nombreux soldats de l'ARBiH.

« D'après les témoignages, la colonne de la 28e division de l'ARBiH était composée essentiellement d'hommes en âge de se battre qui portaient des armes d'infanterie, des armes de chasse et des explosifs. L'ARBiH a subi de nombreuses pertes d'après les témoignages : entre 500 et 1000 personnes à Ravni Buljim et entre 2 000 à 3 000 personnes à Kamenica.... Plus de 1000 membres des forces musulmanes y trouvent la mort d'après les témoins. Le 13 juillet entre 4h et 8h du matin des unités de la 28e Division traversent la route de Nova Kasaba - Konjević Polje où entre 500 et 1000 soldats perdent la vie. L'avant de la colonne devait opérer un demi-tour et retrouver l'arrière mais elle changea d'avis laissant derrière elle une partie de la colonne se faire encercler par les forces de la VRS... Le 15 juillet, la 28e division inflige de lourdes pertes à la VRS et récupère du matériel militaire. Le 16 juillet les forces musulmanes franchissent la dernière ligne serbe et un accord est conclu avec les Serbes pour laisser la colonne rejoindre la zone sous contrôle de l'ARBiH de Nezuk » (6).

La Commission ne disculpe aucunement les forces serbes de s'être rendues coupables de crimes de guerre, bien au contraire. Elle estime qu'entre 1500 et 3000 combattants et réservistes de la 28° Division ont été capturés par les forces serbes et tués.

Des massacres constitutifs de crimes de guerre, mais pas un génocide

Les responsables de ces massacres ont été poursuivis et condamnés par le TPIY [Tribunal Pénal International pour la Yougoslavie]. Les Bosniaques ont également commis des crimes de guerre mais n'ont pas été condamnés par le TPIY. Le seul responsable bosniaque accusé fut Naser Oric, l'homme a mené la purification ethnique contre les Serbes depuis le début de la guerre dans la région de Srebnica, comme nous l'avons mentionné précédemment. Il a été acquitté par le TPIY !

La Commission souligne qu'à aucun moment, contrairement à l'extermination de populations entières en Arménie par les Turcs pendant la 1ère guerre mondiale, ou celle des Juifs pendant la seconde guerre mondiale, ou plus proche, celle, en 1994, des Tutsis au Rwanda, il n'y avait de volonté des Serbes d'exterminer tous les Bosniaques musulmans ni à Srebnica ni ailleurs en Bosnie-Herzegovine. L'équipe du professeur Gideon Greif précise que l'article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide ne s'applique donc pas aux Serbes ayant participé à la bataille de Srebnica. La Commission reproche une utilisation abusive du terme de génocide par le TPIY, qui va finir par dénaturer complètement le sens du mot.

On rappellera, pour mémoire, que lorsque l'organisation terroriste  »Daech », lors de son offensive sur Mossoul, a exécuté sommairement, le 13 juin 2014, 1700 militaires irakiens faits prisonniers à Tikritt (7), il n'y eut aucune condamnation pour génocide...D'ailleurs, on notera avec étonnement que la Communauté internationale n'a pas jugé utile de créer un tribunal spécial pour juger les massacres et les crimes commis par cette organisation...Pourquoi ? La question reste posée....

Des juges influencés par les médias

La Commission souligne que les juges du TPIY ont été fortement influencés par les médias qui présentaient systématiquement les Serbes comme les « méchants » et passaient sous silence les exactions des Bosniaques. Depuis le début de ce conflit, une désinformation massive avait été élaborée pour diaboliser les Serbes. Les commanditaires de la désintégration de la Yougoslavie vont utiliser les haines ancestrales pour dresser les communautés les unes contre les autres. Le même schéma se reproduira quelques années plus tard au Kosovo. Des sociétés de communication vont être mises à contribution pour jeter le discrédit sur les Serbes dans l'opinion publique. Pour mémoire, rappelons l'énorme fake-news (8) sur les soi-disant « camps de concentration serbes » qui va définitivement faire basculer les Serbes dans le camp du « mal absolu ».

En conclusion

Les conclusions de cette enquête ont suscité, comme on pouvait s'y attendre, de violentes réactions des responsables bosniaques qui ont mis en cause l'impartialité de cette Commission. Il faut préciser que le Professeur Greif a reconnu des erreurs dans les chiffres des victimes, mais tout en maintenant que ces massacres et crimes de guerre ne constituaient pas un génocide au sens habituel de ce terme. Le seul fait que cette étude avait été commanditée par les Serbes a été un facteur de diabolisation et le professeur Greif n'a pas échappé au lynchage médiatique habituel et à l'accusation infamante de  »négationnisme ». Sa malencontreuse erreur lui a été fatale... Le gouvernement allemand a décidé de ne pas lui accorder la médaille de l'Ordre du Mérite de la République fédérale d'Allemagne (9). [ce n'est pas surprenant, lorsqu'on se souvient du parti-pris de l'Allemagne envers les Serbes pendant les guerres de Yougoslavie].

Dans un entretien accordé au quotidien israélien Haaretz, le Professeur Greif a précisé avoir officieusement appris qu'il ne recevrait plus le prix et a accusé les Frères musulmans de Bosnie d'avoir ruiné sa réputation. « Les attaques personnelles particulièrement violentes et malveillantes découlent de mon statut d'universitaire juif et israélien », déclare-t-il, accusant les « organisations des Frères musulmans de Bosnie de mener une campagne de diffamation à son encontre ».

C'est dommage, car ce rapport méritait sans doute mieux....

 MARC Jean

(1)  Ce fut un jeu d'enfant pour les Etats-Unis de disloquer l'Etat multiethnique de Yougoslavie

(2)  Chris Hedges : Les proxénètes de la guerre

(3)  lesakerfrancophone.fr

(4)  Members INDEPENDENT INTERNATIONAL COMMISSION OF INQUIRY ON SUFFERINGS OF ALL PEOPLE IN THE SREBRENICA REGION BETWEEN 1992 AND 1995

(5)  Commission internationale sur la souffrance de tous les peuples de la région de Srebrenica

(6)  stratpol.com

(7)https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_de_Tikrit

(8)  Quand des sociétés de communication fabriquent des fake news

(9)  bbabo.net

Source:  arretsurinfo.ch

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