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L'ancien secrétaire d'État américain Henry Kissinger intervient à distance lors de la réunion annuelle du Forum économique mondial (WEF) à Davos, le 17 janvier 2023.
Fabrice COFFRINI / AFP
Quelques mois après avoir averti contre une adhésion de l'Ukraine à l'Otan, l'ex-secrétaire d'État américain, Henry Kissinger, change d'avis. Intervenant par visioconférence au Forum économique mondial (WEF) qui se déroulait à Davos depuis lundi jusqu'à vendredi, l'ancien chef de la diplomatie américaine a estimé que l'Ukraine "devrait être autorisée à rejoindre l'alliance" occidentale une fois le conflit résolu.
Lors de son intervention mardi 17 janvier par visioconférence, Henry Kissinger a plaidé pour un soutien "continu" de l'Ukraine jusqu'à ce "qu'un cessez-le-feu puisse être obtenu". Il a expliqué soutenir désormais l'adhésion de ce pays à l'Otan. "Avant cette guerre, j'étais opposé à ce que l'Ukraine devienne membre de l'Otan parce que je craignais que cela ne provoque exactement le processus qu'on voit maintenant", a-t-il expliqué. "Mais maintenant que ce processus a atteint ce niveau, une Ukraine neutre dans ces conditions n'aurait plus de sens".
Henry Kissinger, 99 ans, a ainsi affirmé qu'une "adhésion de l'Ukraine à l'Otan serait une issue appropriée" lorsque la guerre prendrait fin, appelant toutefois à tout faire pour éviter que la guerre "ne se transforme en guerre contre la Russie", et à s'efforcer de poursuivre un dialogue avec la Russie afin de lui donner "l'occasion de rejoindre le système international" une fois la paix conclue.
Tenter d'intégrer l'Ukraine à l'Otan "n'était pas prudent"
Il n'a pas manqué d'aborder le soutien des États-Unis, "qui ont soutenu la résistance ukrainienne et devraient poursuivre ce soutien et si nécessaire de l'intensifier sur le plan militaire jusqu'à ce qu'une ligne de cessez-le-feu soit atteinte ou acceptée lors de discussions préliminaires", a-t-il plaidé.
L'opposition de Kissinger à une adhésion de l'Ukraine à l'Otan remonte à 2014, année de l'annexion de la Crimée par la Russie. Il estimait ainsi que "politiquement et économiquement, l'Ukraine devrait faire ce qu'elle veut" mais que "l'adhésion tant attendue à l'Otan devrait être refusée".
Fin septembre 2022, il a estimé que les tentatives de Washington d'intégrer l'Ukraine à l'Otan après l'effondrement de l'Union soviétique "n'étaient pas prudentes". "Du point de vue russe, les États-Unis ont tenté (après la chute de l'URSS, NDLR) d'intégrer toute cette région, sans exception, dans un système stratégique dirigé par les États-Unis", a-t-il rappelé, pour supprimer la "ceinture de sécurité" historique de la Russie.
Lors du même sommet à Davos en 2022, quelques mois après le déclenchement de l'opération militaire russe, le vétéran de la diplomatie américaine estimait que l'Ukraine devait envisager des concessions territoriales à la Russie, plutôt que de vouloir reconquérir la Crimée et le Donbass. "Les négociations doivent commencer dans les deux prochains mois avant que cela ne crée des bouleversements et des tensions qui ne seront pas facilement surmontés", avait-il alerté.