Lauriane Bernard, France-Soir
Le Conseil constitutionnel ne valide qu'une moitié de l'article 6 de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la Justice.
Ian Langsdon / AFP
FRANCE - Le 16 novembre, le Conseil constitutionnel a censuré l'activation à distance et en temps réel de la caméra et du micro du téléphone portable d'une personne soupçonnée d'être l'auteur d'un crime ou d'un délit puni d'au moins cinq années d'emprisonnement. Le Conseil autorise toutefois la géolocalisation.
Le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la loi d'orientation et de programmation 2023-2027 du ministère de la Justice, dont il avait été saisi par plus de 60 députés. A l'initiative du ministre Dupond-Moretti, l'article 6 de cette loi suggérait que n'importe quelle personne, soupçonnée d'être l'auteur d'un crime ou d'un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement, puisse être géolocalisée, enregistrée et photographiée, en temps réel, par le biais de son propre téléphone portable.
Autorisation de la géolocalisation
Pour motiver sa décision, le Conseil précise d'abord que le Code de procédure pénale autorise déjà la géolocalisation d'une personne, de tout objet lui appartenant, ou de son véhicule, sans son consentement, dans le cadre d'une enquête ou d'une instruction relative à un crime ou à un délit puni d'une peine d'au moins trois ans d'emprisonnement.
Il rappelle également que l'activation à distance d'un appareil électronique à des fins de géolocalisation ne pourrait être autorisée que par le juge des libertés et de la détention, à la requête du procureur de la République, ou par le juge d'instruction, et uniquement lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent.
Enfin, que cette géolocalisation ne doit pas concerner les appareils électroniques utilisés par un membre du Parlement, un magistrat, un avocat, un journaliste, un commissaire de justice ou un médecin.
Il admet donc que cette partie de l'article 6 de la loi ne constitue pas une atteinte au droit au respect de la vie privée.
Censure de l'activation de la caméra et du micro
En revanche, le Conseil a jugé que l'activation à distance et en temps réel de la caméra et du micro des téléphones portables "est de nature à porter une atteinte particulièrement importante au droit au respect de la vie privée".
Selon lui, ce dispositif "permet l'enregistrement, dans tout lieu où l'appareil connecté détenu par une personne privée peut se trouver, y compris des lieux d'habitation, de paroles et d'images concernant aussi bien les personnes visées par les investigations que des tiers".
Plus haut dans sa décision, le Conseil rappelle qu'il est déjà permis de mettre en place des dispositifs techniques ayant pour objet "la sonorisation et la captation d'images dans des lieux ou véhicules privés ou publics" dans le cadre d'une enquête ou d'une instruction relative à l'une des infractions relevant de la délinquance ou de la criminalité organisées.