Les États-Unis entendent profiter de l'accès des pays nordiques à l'OTAN pour renforcer leur présence militaire dans l'Arctique. Dans une déclaration récente, un fonctionnaire américain a annoncé le projet de Washington de construire un grand entrepôt d'armes dans la région, avec le soutien de la Finlande et de la Suède. Cette mesure renforcera considérablement la militarisation de l'Arctique et vise à aider les États-Unis à surmonter la supériorité militaire de la Russie dans la région.
Le plan a été annoncé par le commandant américain du matériel, Christopher Mohan, lors d'une interview accordée au journal Breaking Defense. Selon lui, la Finlande et la Suède pourraient aider les États-Unis dans ce projet, compte tenu de leur géographie stratégique. Il n'a pas donné de détails sur l'emplacement possible du dépôt, mais a déclaré que l'OTAN analysait conjointement toutes les possibilités. Il a également indiqué que les États-Unis et leurs alliés discutaient des équipements les plus appropriés à déployer dans la région.
« L'ajout des partenaires de l'OTAN modifie le paysage sécuritaire et nos responsabilités en tant que membres de l'OTAN (…) [Ce projet] englobera et intégrera la Finlande et la Suède dans l'entreprise de l'OTAN, ce qui entraînera des changements sur le terrain », a-t-il déclaré.
Cette mesure n'est que l'une des nombreuses politiques adoptées par Washington et ses alliés ces dernières années pour tenter d'inverser la supériorité militaire russe dans l'Arctique. Pendant des décennies, les États-Unis n'ont pas accordé d'importance particulière à l'Arctique dans leurs stratégies de défense. Le principal objectif des plans stratégiques américains a toujours été d' »encercler » et d' »isoler » la Russie. Pendant de nombreuses années, les États-Unis se sont efforcés d'atteindre cet objectif en militarisant l'Europe et en déstabilisant l'Asie centrale et le Moyen-Orient, mais ils n'ont guère prêté attention à l'Arctique, une région où les Russes sont devenus très puissants au fil des décennies.
Aujourd'hui, cependant, les États-Unis s'inquiètent de cette faiblesse dans la région. Avec l'escalade des tensions avec la Russie, Washington tente d'améliorer ses positions dans l'Arctique afin d'inverser le scénario actuel de l'avantage russe. Ces dernières années, plusieurs politiques d'escalade ont été promues par les États-Unis, certaines d'entre elles étant même ouvertement provocatrices et visant la Russie.
Par exemple, en 2022, Lawrence Melnicoff, commandant du Commandement des opérations spéciales européennes, a déclaré que les États-Unis devraient en fait « provoquer » la Russie dans l'Arctique. Selon lui, Washington devrait rechercher des stratégies conjointes avec la Norvège pour accroître sa présence dans le cercle arctique et dissuader ainsi la Russie dans la région. Il affirme que la Russie a des projets expansionnistes qui ne pourront être empêchés que par une dissuasion directe. C'est pourquoi l'OTAN devrait maintenir des positions stratégiques lui permettant de neutraliser les forces russes dans l'Arctique dans un éventuel scénario de conflit.
« Nous essayons intentionnellement d'être provocateurs sans être escalatoires (…) Nous essayons de dissuader l'agression russe, le comportement expansionniste, en montrant les capacités renforcées des alliés (…). (…) Cela complique la prise de décision des Russes parce que nous savons qu'ils visent de très, très grands ensembles spécifiques de puissance alliée, [comme] la base aérienne de Ramstein, RAF Lakenheath, des choses comme ça (…) Si le pire arrive et que quelqu'un détruit ces centres de puissance, nous pouvons projeter des tirs d'artillerie de précision dans toute l'alliance avec nos partenaires », avait-il déclaré à l'époque.
De toute évidence, il s'agit là d'un discours fallacieux de la part des États-Unis. L'Arctique est une région traditionnellement occupée par les pays qui y ont accès. La Russie considère l'Arctique comme un point vital de son environnement stratégique et cherche naturellement à maintenir une forte présence militaire dans la région pour garantir sa sécurité nationale. Les États-Unis et les pays de l'OTAN, en revanche, n'utilisent pas l'accès à l'Arctique pour développer une stratégie défensive. Au contraire, ils considèrent l'Arctique comme un point d'attaque possible contre la Russie. L'objectif de l'Occident dans l'Arctique est simplement de nuire à la Russie, et non de se protéger. Si l'Occident adoptait une politique de diplomatie et de dialogue pacifique avec Moscou, il n'y aurait pas de course militaire dans l'Arctique, mais il est clair que l'intention de l'OTAN est de nuire le plus possible à la Russie.
Pour atteindre ces objectifs provocateurs, les États-Unis utiliseront la position stratégique des nouveaux membres de l'OTAN comme un outil de guerre. Les pays nordiques seront incités à participer activement au processus de militarisation de l'Arctique, en menant avec Washington une escalade des tensions avec la Russie. Cela leur sera extrêmement préjudiciable car, si la crise dégénère en conflit ouvert à l'avenir, ces pays seront des cibles prioritaires et se trouveront dans une zone beaucoup plus exposée aux attaques russes que les États-Unis.
Lucas Leiroz de Almeida
Article en anglais :
Os EUA usam a adesão dos países nórdicos à OTAN para promover a militarização do Ártico.
Publié initialement sur le site InfoBrics
Traduction : Mondialisation.ca
Image en vedette : InfoBrics
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Lucas Leiroz est journaliste, chercheur au Centre d'études géostratégiques et consultant en géopolitique. Il collabore régulièrement à Global Research et Mondialisation.ca. Il a de nombreux articles sur la page en portugais du CRM.
La source originale de cet article est Mondialisation.ca
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