Par Abdel Bari Atwan
Les incendies qui font rage dans le nord de la Palestine occupée depuis quelques jours en raison des frappes de drones du Hezbollah - que les équipes d'urgence israéliennes s'efforcent de maîtriser depuis samedi - ont ravivé le front du Sud-Liban et accru la perspective d'une guerre totale.
Naim Qasem, l'adjoint du premier dirigeant du Hezbollah, Hassan Nasrallah, parfois décrit comme son « premier ministre », a fait une apparition surprise sur Al Jazeera mardi (pour la première fois depuis de nombreuses années) pour révéler qu'au cours des deux derniers mois, le parti avait reçu de nombreux avertissements concernant l'imminence d'une offensive israélienne de grande envergure.
Sa réponse a été sans ambiguïté : le front libanais est inextricablement lié à Gaza. « La résistance ne cherche pas à élargir le cercle de la guerre avec Israël, mais elle est prête si elle lui est imposée et ne permettra pas à Israël de remporter une victoire », a déclaré M. Qasem.
« Si Israël veut mener une guerre totale, nous y sommes prêts. Toute extension par Israël de la guerre contre le Liban se traduira par des destructions, des dévastations et des déplacements de population en Israël. »
Un climat de guerre est dans l'air, et le Hezbollah y est parfaitement préparé. Dans ses trois derniers discours, Nasrallah a vivement critiqué les partis libanais soutenus par les États-Unis qui justifient l'agression d'Israël contre leur pays et condamnent la résistance, encourageant même un assaut total qui pourrait être imputé au Hezbollah.
5 juin 2024 - Les médias militaires du Hezbollah ont publié une vidéo montrant la Résistance islamique attaquant les plateformes du « Dôme de fer » à Za'urah dans le Golan occupé avec des missiles Katiusha et des drones..
L'apparition de Qasem sur Al Jazeera, et son affirmation que toute guerre israélienne contre le Liban serait farouchement contrecarrée, a constitué un avertissement pour le cabinet de guerre israélien.
L'un de ses membres, l'ancien général Benny Gantz, a demandé qu'il se réunisse mardi soir pour discuter de la réponse à apporter aux incendies dans le nord qui ont ravagé de nombreuses colonies et villes occupées et qui ont fait fuir encore plus de colons vers le sud.
La rhétorique de guerre contre le Liban a atteint de nouveaux sommets ces derniers jours et a pris des proportions hystériques. Le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, a exigé l'incendie et la destruction de tous les bastions du Hezbollah au Liban. Son collègue terroriste Bezalel Smotrich, ministre des finances, a demandé au cabinet de guerre de passer à l'offensive : « Le temps de l'action est venu. Le temps des discussions est terminé. »
Les questions clés sont les suivantes : qui déclenchera une telle guerre, quel en sera l'élément déclencheur et comment la résistance islamique libanaise réagira-t-elle ?
Il est certain que seul Israël déclencherait une guerre. Il ne peut pas supporter les pertes énormes qu'il a subies à cause des tirs continus de missiles et des attaques de drones du Hezbollah, qui ont conduit à l'évacuation de quelque 200 000 colons des régions de haute et de basse Galilée avant même les derniers incendies.
Le moment du déclenchement d'une guerre est évidemment un secret militaire qui ne peut être prédit. L'élément de surprise est essentiel. Mais si l'on en croit les informations disponibles, les fuites délibérées dans les médias et l'impact militaire et moral des opérations du Hezbollah sur l'État d'occupation, ce pourrait être très bientôt.
Mardi, le journal libanais al-Akhbar, proche du Hezbollah, a rapporté que plusieurs pays européens ont averti les responsables libanais qu'une attaque israélienne massive sur le pays était imminente. Il s'agit notamment du Royaume-Uni, qui ne s'est pas contenté de transmettre l'avertissement, mais a ajouté que l'attaque était prévue pour la mi-juin et qu'elle dévasterait les infrastructures du pays et certaines parties de Beyrouth.
5 juin 2024 - Les médias militaires du Hezbollah ont publié une vidéo montrant l'attaque à la roquette de la Résistance islamique sur le site d'occupation israélien de Birket Risha. La vidéo montre le missile Almas, équipé d'une caméra, s'approchant de la cible, tandis que deux soldats ennemis en panique tentent de s'enfuir avant que le missile n'explose..
Le journal rapporte également qu'après avoir visité Doha, Walid Jumblatt a déclaré aux visiteurs qu'il sentait que les Qataris craignaient les plans de guerre israéliens contre le Liban et que, compte tenu de leur proximité en tant que médiateurs avec les décideurs à Washington, ces craintes devaient être prises au sérieux.
Je peux ajouter, d'après mes propres sources, que certains pays du Golfe, dont le Qatar, ont approché le gouvernement syrien au sujet de la possibilité d'utiliser l'aéroport de Damas pour évacuer leurs citoyens du Liban si l'aéroport de Beyrouth était détruit. Les Syriens, comme on s'y attendait, ont répondu positivement.
Je ne peux pas prédire si, quand ou comment une guerre israélienne totale pour détruire le Liban peut commencer. Mais je peux dire que si c'est le cas, ce sera le début de la fin pour l'État d'Israël. Les représailles par missiles du Hezbollah seraient totalement dévastatrices - et malgré tout ce que nous avons vu, le Hezbollah n'a utilisé à ce jour qu'une partie minime de son arsenal.
Auteur : Abdel Bari Atwan