Robin Delobel
La mobilisation se poursuit contre le gala organisé à Paris ce 13 novembre par l'association « Israël Is Forever ». Selon les dernières informations, la participation de l'invité d'honneur, le ministre israélien des finances Bezalel Smotrich, se limiterait finalement à une vidéo à distance. Quel est l'objectif de ce gala et pourquoi s'y opposer? Nous interrogeons Nicolas Shahshahani, vice-président de l'association EuroPalestine qui a défendu l'interdiction de ce gala, rejetée par le tribunal administratif de Paris le 8 novembre.
Quel est l'objectif de ce gala et qui y sera?
Ce gala est annoncé par l'association Israël is for ever, une association ultra, présidée par Nili Kupfer-Naouri (1). Elle se présente comme ultra sioniste, revendiquant l'entièreté de ce qu'elle appelle la terre d'Israël, du Nil à l'Euphrate. Sur le terrain, ils se distinguent par des actions de militants qui se filment en train d'assiéger les camions d'aides humanitaires qui tentent d'entrer dans Gaza. Ils participent à ce qu'ils appellent la "recolonisation de la bande de Gaza". Leur objectif est énoncé très clairement: Gaza doit être vidé de toute sa population palestinienne, quelque soient les moyens. Ils font ouvertement l'aveu de pratiques génocidaires.
Israël is for ever est une association autorisée ?
C'est une association loi 1901 qui a son siège à Paris, qui s'adresse exclusivement à un public juif ou reconnu comme tel, son mot d'ordre est que la place d'un Juif est sur la terre d'Israël. Ses actions promeuvent tout ce qui est israélien à commencer par les actions militaires d'Israël. Ce gala doit se tenir à Paris, avec la présence annoncée du plus radical du gouvernement fasciste de Netanyaouh, Bezalel Smotrich, ministre des finances et de la colonisation. Il est ouvertement raciste et favorable à l'expulsion des Palestiniens, morts ou vifs. Ses déclarations au cours des derniers mois et des dernières années ne laissent aucun doute sur ses opinions et ses intentions. Il a par exemple déclaré que ce n'est « pas forcément immoral si les 2 millions de Palestiniens vivant dans la bande de Gaza meurent de faim », chose qui se produit en partie actuellement.
Smotrich détient le ministère des finances et de la colonisation ?
Les deux factions les plus ouvertement fascistes sont dirigées par deux partis se réclamant d'un sionisme religieux qui ont obtenu un certaine nombre de sièges aux dernières élections législatives. Netanayouh n'a pas eu à se forcer pour donner des postes importants aux forces ouvertement éradicatrices. Il y a Forces Juives, de Ben Gvir, qui détient le ministère de la sécurité et dont la gestion est très élargie, il a notamment la compétences des prisons où les violences contre les Palestiniens se sont multipliés. Ben Gvir a obtenu la création d'une police supplémentaire, mais aussi de pouvoir distribuer des armes à tous les colons de Cisjordanie occupée. Et l'autre parti du sionisme religieux, dirigé par Bezalel Smotrich, a obtenu malgré un petit nombre de députés, l'important ministère des finances et il est intégré également au ministère de la défense en charge des territoires colonisés en Cisjordanie. Il ne faut pas trop s'interroger sur le jeu de chaises tournantes dans le gouvernement israélien. Dans la vie politique israélienne, les postes sont distribués en fonction des rivalités des uns et des autres mais il y a un même socle qui est l'extermination des Palestiniens.
Le rôle de la France est particulier vis-à-vis d'Israël...
La France, historiquement, a porté Israël sur les fonds baptismaux. Elle a apporté une aide décisive dans le développement du programme israélien de l'arme nucléaire. C'était il y a quelques décennies. Il y a eu des hauts et des bas mais dans les faits la complicité du gouvernement français avec Israël est totale à tous les niveaux. Il y a plus de 4 000 hommes et femmes ayant la double nationalité française et israélienne qui sont autorisés par la France à aller combattre, pour servir avec l'armée génocidaire et revenir en France tranquillement sans sanctions.
Il y a une législation française de répression des critiques des agissements de l'État israélien, qui s'est fortement développé au fil des ans. Avec un instrument récent dont la justice française fait grand usage qui est l'apologie du terrorisme. Jusqu'à une date récente, c'était un délit qui ressortissait du droit de la presse, l'injure, la diffamation,... Ce droit de la presse offre plus de garanties à la personne incriminée que le droit commun dans lequel l'apologie du terrorisme a été reversé il y a quelques années.
Sur commande des autorités politiques françaises, police et justice ont procédé depuis octobre 2023 à une très forte accélération de l'utilisation de cet outil répressif. Des centaines de gens ont été mis en cause pour avoir dit par exemple que l'attaque de 7 octobre 2023 était une action de résistance, nonobstant le fait qu'elle ait pu être assortie d'exactions, menée par des gens pour qui tout n'a pas commencé le 7 octobre, par des populations qui subissent la dépossession de leurs propre patrie depuis 76 ans. Ce discours donne lieu à des procès au nom de l'apologie de terrorisme avec des condamnations parfois extrêmement élevées. On a appris la condamnation d'une Niçoise à trois ans de prison dont un an ferme pour un délit de la parole.
Notes:
- Le 3 mai, la Ligue des droits de l'homme (LDH) a porté plainte contre Nili Kupfer-Naouri pour apologie de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, en raison de ses déclarations répétées sur de nombreux sites prônant l'expulsion totale de la population gazaouie et la destruction « très rapidement » de toute la bande de Gaza.
Source : investig'Action