12/03/2025 reseauinternational.net  5min #271483

La crise des relations entre l’europe occidentale et l’administration Trump : une perspective moyen-orientale

par Yuriy Zinin

L'espace de communication du Moyen-Orient tente de comprendre les motifs politico-économiques et autres qui sous-tendent les relations actuelles entre l'Europe occidentale et l'hôte de la Maison-Blanche aux États-Unis.

«L'Europe et l'Amérique : le moment de la séparation et le monde en mutation».

«Le début de l'effondrement de l'architecture de sécurité occidentale».

Ces titres et d'autres similaires abondent dans les médias du Moyen-Orient qui commentent la crise des relations entre l'Europe occidentale et l'administration Trump à la lumière du conflit ukrainien.

Les observateurs considèrent l'appel du président américain à coopérer avec le dirigeant russe sur cet agenda comme un symptôme de l'échec du consensus européen à pousser la Russie dans ses retranchements économiques et militaires, note le journal saoudien Al-Sharq Al-Awsat.

L'ancien monde vit un moment fatidique

Les médias du Moyen-Orient nous rappellent que les relations entre les États-Unis et l'Europe représentent le cœur de l'alliance occidentale qui a combattu le bloc de l'Est dirigé par l'Union soviétique pendant près d'un demi-siècle, jusqu'à son effondrement.

La confusion règne dans le monde politique et médiatique européen autour des déclarations de Trump, résume la publication algérienne. Les Européens tentent de «réveiller» le dirigeant américain, de le détourner des erreurs dangereuses et de le mettre en garde contre les «plans diaboliques et dangereux» de Poutine.

L'un après l'autre, les dirigeants de l'ancien monde  viennent à Washington, chacun avec un logiciel obsolète répétant la même histoire élaborée il y a trois ans...

Dans l'espace de communication du Moyen-Orient, ils tentent de comprendre les motifs politico-économiques et autres qui sous-tendent les relations actuelles entre l'Europe occidentale et l'hôte de la Maison-Blanche aux États-Unis.

Elles s'expliquent par la différence entre la vision de D. Trump et la vision européenne des sources de menaces pour la sécurité de l'alliance occidentale. Le chef de la Maison-Blanche ne voit pas le dossier ukrainien à travers le prisme des intérêts stratégiques américains, estime l'analyste politique de la chaîne Al-Jazeera.

Sa vision est plutôt en phase avec les tenants d'une telle ligne au sein de l'establishment américain, qui considèrent que c'est une erreur pour les États-Unis de s'engager dans ce qu'ils appellent le «bourbier ukrainien».

Ils  encouragent Washington à se concentrer sur la confrontation avec son principal adversaire, la Chine, plutôt que de rechercher les bénéfices éphémères de l'expansion de l'OTAN dans la sphère d'influence géopolitique vitale de Moscou.

Pour reprendre les termes de plusieurs auteurs locaux, D. Trump a remué les eaux stagnantes dans des dossiers que l'administration Biden n'a pas pu ou voulu traiter, car il les a lui-même créés. En ce qui concerne le dossier ukrainien, il est devenu clair que les États-Unis veulent sortir de ce bourbier.

Un certain nombre de déclarations et de démarches faites par l'administration concernant son approche et son travail avec la Russie sont perçues par les experts arabes comme un retour en arrière par rapport au message de repousser la Russie, qui a été proclamé sous l'ère Clinton et a atteint son apogée sous l'administration Biden.

Dans les médias, la thèse est qu'une telle orientation est en grande partie une réalisation des changements qui ont eu lieu dans les structures politiques et économiques des États-Unis, à la suite desquels ils ont perdu les avantages acquis après la Seconde Guerre mondiale et pendant la guerre froide avec l'Union soviétique.

Les guerres étrangères menées par les administrations successives ont contribué à une dette nationale qui a atteint plus de 36 000 milliards de dollars et continue de croître.

Et l'Europe, autrefois premier violon du monde, qui a colonisé les continents asiatique, américain et africain et a été la première de la planète dans de nombreux domaines, n'est plus la même, elle cherche aujourd'hui des solutions à ses problèmes politiques, économiques et de défense. C'est ce qui ressort de plusieurs interventions de politologues arabes. Ils cherchent également à comprendre l'impact de la pression temporelle entre l'Europe occidentale et l'administration Trump au Moyen-Orient.

Les États du Golfe comprennent que le déclin de l'intérêt des États-Unis pour l'Ukraine pourrait également se traduire par une moindre attention portée au Moyen-Orient. Cela les pousse à renforcer leur indépendance stratégique, soit en élargissant les partenariats avec la Chine et la Russie, soit en renforçant leur rôle de médiateur dans les conflits internationaux, indique la publication émiratie.

L'Égypte, pour sa part, observe l'évolution de la position de Washington, car elle se rend compte que tout changement radical de sa politique pourrait affecter le montant du soutien militaire et économique qu'elle reçoit.

La rencontre (ou plutôt l'accrochage) entre D. Trump et V. Zelensky le 28 février dernier n'était pas seulement une réunion politique, mais un tournant qui a ouvert la voie à la formation d'un nouvel ordre mondial, estime l'observateur émirati. Washington n'est plus prêt à jouer le rôle de défenseur absolu de ses alliés et le monde s'adapte à cette nouvelle réalité.

La grande question qui se pose aujourd'hui est la suivante : les alliés, que ce soit en Europe ou au Moyen-Orient, seront-ils en mesure de s'adapter à ce changement ? Ou bien ce changement créera-t-il un vide géopolitique qui sera exploité par d'autres puissances telles que la Russie et la Chine ? L'avenir nous le dira,  conclut le journal émirati.

source :  New Eastern Outlook

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