31/03/2025 mondialisation.ca  6min #273457

 Les «États arabes» otages de leur «Ligue» : entre l'immobilisme, la subordination et l'attrape-nigaud

Les dirigeants arabes dans l'habit du serviteur volontaire

Par  Mohamed El Bachir

«Elle s'est ceinte d'explosifs et elle éclate ! Va-t-elle mourir ? S'est-elle suicidée ? Non, non. C'est la manière de Gaza d'annoncer son imprescriptible droit à la Vie.» (1)Mahmoud Darwich

Qui sont les instigateurs des manifestations à Gaza contre le Hamas ?

Le 10 février 2025, l'Autorité palestinienne avait décrété la fin des allocations aux familles des prisonniers et tués par l'Etat d'Israël. Il va de soi qu' une telle mesure vise à affaiblir la résistance en Cisjordanie. Il n'est pas inutile de souligner que ce décret répond à une demande de longue date faite par les Etats-Unis.

La nomination en 2024 d'un nouveau premier ministre par Mahmoud Abbas sous la pression des pays occidentaux fut accueillie par une forte opposition du Hamas, du Jihad islamique palestinien et du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP, marxiste), en des termes sans équivoque: «former un nouveau gouvernement sans consensus national va aggraver les divisions.» (2)

Dans un communiqué conjoint, ces organisations ont souligné «la profonde crise au sein de l'Autorité palestinienne et sa déconnexion de la réalité»  tout en mettant en exergue le «fossé entre l'Autorité et le peuple.» (2)

Le vendredi 15 mars 2025, le Fatah de Mahmoud Abbas, a accusé le Hamas «d'avoir causé le retour de l'occupation israélienne de Gaza» en «entreprenant l'aventure du 7 octobre 2023» qui a mené à une «catastrophe [nakba, en arabe] encore plus horrible et cruelle que celle de 1948». (2)

Mahmoud Abbas passe sous silence la colonisation sioniste qui continue son œuvre d'expropriation de terre et d'assassinat avec la complicité tacite de l'Autorité palestinienne en Cisjordanie. Sous la pression des Etats arabes et des puissances occidentales, un nouveau premier ministre, en la personne de M. Mustapha, est nommé par M. Abbas, toujours, «accroché à une branche pourrie» (3), afin qu'il soit plus crédible pour administrer un futur Etat palestinien à Gaza et en Cisjordanie. Un Etat sous tutelle arabe sur le plan financier et sous contrôle politique israélien.

Il va de soi qu'un tel objectif présuppose l'éradication de la résistance palestinienne et à Gaza et en Cisjordanie.

Mais pour préparer et faire accepter par le peuple palestinien l'avènement d'une telle situation, il faut au préalable créer l'atmosphère politique adéquate. Le porte-parole, Mounther al-Hayek du parti du président palestinien Mahmoud Abbas a abondé dans ce sens en déclarant que «le Hamas doit faire preuve de compassion pour Gaza, ses enfants, ses femmes et ses hommes. Nous mettons en garde contre des jours difficiles, rudes et pénibles pour les habitants de la bande de Gaza.» (4)

Quant à l'Etat Jordanien, il propose dans la première étape, l'exil des membres du Hamas et de désarmer la Résistance et l'expulsion de 3 000 membres du Hamas, y compris des dirigeants militaires et civils, de la bande de Gaza. Cette position jordanienne a été suivie d'une multiplication des frappes aériennes d'Israël à Gaza et d'interventions militaires terrestres.

Aussi ce n'est nullement anodin de souligner que le plan de paix proposé par la Ligue arabe a au moins un point de convergence avec celui de D. Trump soutenu par l'Etat sioniste: le désarmement de la résistance.

Reste à légitimer aux yeux du monde et des peuples arabes cette première étape pour pouvoir mettre en place la deuxième étape, à savoir l'effacement politique du peuple palestinien et réduire la question palestinienne à une simple question humanitaire dans un premier temps, suivie de la mise en place d'une administration palestinienne pour gérer le quotidien des Palestiniens, demeurant encore en Cisjordanie et à Gaza…. Dans tous les cas, les manifestations à Gaza contre le Hamas servent à disqualifier cette organisation. Aussi, des différentes déclarations et du porte-parole de M. Abbas et de l'Etat jordanien, citées ci-dessus, on ne peut qu'émettre l'hypothèse suivante: l'Autorité palestinienne et les Etats jordanien et égyptien tentent de mettre en place les conditions favorables à la réalisation de la première étape, en organisant des manifestations palestiniennes à Gaza contre le Hamas.

Hypothèse non dénuée de sens puisque le 30 mars 2025, un responsable du Hamas a tracé la ligne rouge : un non catégorique au désarmement de la résistance (5)… Ce qui rend toute tentative diplomatique pour un cessez-le-feu à Gaza un vœu pieux, laissant ainsi à la puissance occupante les mains libres pour continuer son objectif stratégique, à savoir la colonisation de la Cisjordanie et la destruction de Gaza sans oublier le génocide. Et au delà, mettre en place les conditions du morcellement du Liban et de la Syrie ou, du moins, les soumettre dans le cadre d'une normalisation…Une normalisation que la résistance libanaise considère comme la ligne rouge à ne pas franchir.

La stratégie arabe: posture de la servitude volontaire

Concernant la Somalie, la Lybie et le Soudan, Irak, la stratégie de morcellement a déjà mis ces pays sous l'autorité d'Etats virtuels ou, du moins, affaiblis. Quant à la Syrie, son président A. El Chareh, l'intégriste devenu « démocrate », en prenant la décision de désarmer les organisations palestiniennes existantes dans les camps de réfugiés en Syrie tout en ne réagissant pas à l'expansion de l'Etat d'Israël dans le Golan et aux bombardements réguliers de la Syrie, ne dissuadera pas pour autant l'Etat d'Israël de participer directement ou indirectement au morcellement de son pays. Dans tous les cas de figure, la bienveillance politique occidentale concernant son autorité aura comme prix la »normalisation » avec l'Etat d'Israël.

Bref, pendant que les dirigeants du mouvement sioniste rêve du Royaume d'Israël, du Nil à l'Euphrate, les dirigeants arabes font penser à cette anecdote populaire du Maghreb :un homme dépouillé de son couffin rempli de grappes de raisins supplie les passants pour qu'on lui rende au moins le couffin vide… Les dirigeants arabes donnent l'impression de quémander leurs propres existences à leurs maîtres. Une attitude qui tranche avec celle de la résistance palestinienne, irakienne, yéménite et libanaise dont le Hezbollah est le fer de lance.

Mohamed El Bachir

Image en vedette : Capture d'écran. Des manifestants palestiniens se sont réunis contre le Hamas à Beit Lahia, dans la bande de Gaza, le 26 mars.
(20) 25 Anadolu

Notes :

(1) Mahmoud Darwich Chronique de la tristesse ordinaire publié à Beyrouth en 1974. Les éditions du Cerf, 2009.

(1) , lemonde.fr

(2)  mondialisation.ca

(3)  lorientlejour.com

(5) ttps

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