Bref aperçu de la révolte palestinienne de 1936 et de l'Inde.
Par Vijay Prashad, le 20 mars 2025
En 1936, les paysans et les ouvriers se sont révoltés en Palestine contre la domination britannique, la vente des terres aux colons juifs et les zu'ama (chefs politiques) de Palestine. Ce soulèvement majeur, qui a duré trois ans, fut réprimé par les Britanniques. Le plus fidèle récit de cette révolte a été écrit par notre camarade Ghassan Kanafani (et récemment publié dans une nouvelle traduction par 1804 Books).
Les Palestiniens se sont tournés vers l'Inde pour trouver l'inspiration. Comme l'écrivait le grand poète palestinien Ibrahim Abd al-Fattah Tuqan en 1929 :
"Si seulement l'un de nos dirigeants jeûnait comme Gandhi, peut-être que ce jeûne aurait un effet positif. Il n'est pas nécessaire qu'il s'abstienne de manger : en Palestine, sans nourriture, un dirigeant ne survivrait pas. Qu'il s'abstienne plutôt de vendre des terres, et qu'il conserve un lopin de terre où rendre son dernier souffle".
Pendant la révolte en Palestine, le Congrès national indien a suivi de près les événements en Asie occidentale. La sympathie pour les Arabes était instinctive, car ceux-ci étaient sous domination coloniale britannique et contraints de céder leurs terres aux colons juifs. Le 31 octobre 1937, le Congrès national indien prit fermement position contre "le règne de la terreur" des impérialistes britanniques et des terroristes juifs - tels que ceux de la Haganah - et offrit le soutien des Indiens aux Palestiniens "dans leur lutte pour l'indépendance nationale".
Gandhi a clairement expliqué le raisonnement qui sous-tendait cette attitude l'année suivante. "Ma sympathie va aux Juifs", écrivait-il le 26 novembre 1938. "Mais ma sympathie ne me contraint pas à renoncer à la justice". Pour Gandhi,
"la Palestine appartient aux Arabes" et "c'est certainement un crime contre l'humanité que de réduire les fiers Arabes à néant afin que la Palestine soit livrée aux Juifs, en partie ou en totalité, pour qu'ils en fassent leur foyer national".
Les principaux concepts en jeu étaient l'impérialisme, le nationalisme anticolonial et l'antiracisme. Pas plus d'antisémitisme que de préceptes menant à l'Holocauste. Ces idées, qui couvaient en Allemagne et dans d'autres régions d'Europe, allaient trouver refuge en Inde dans les égouts de l'Hindutva, mouvement politique semblable au nationalisme européen dans son étroitesse d'esprit. Elle a produit des personnes comme le leader du Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS), M. S. Golwalkar, qui a écrit en 1939 que l'Allemagne hitlérienne, à juste titre selon lui,
"purgeait le pays des races sémitiques, les Juifs. L'orgueil national s'est manifesté ici à son plus haut niveau. L'Allemagne a prouvé qu'il est pratiquement impossible pour les races et les cultures, aux différences profondes, de fusionner en un tout uni, dont nous, en Inde, devrions tirer un enseignement précieux".
Mais ce n'est pas la leçon qu'a tirée le courant dominant du mouvement national, qui comprenait le Congrès national indien, les socialistes et les communistes. Ils n'ont accepté ni le fascisme de l'Hindutva ni celui des nazis allemands. Ils ont adopté une politique inspirée de leur nationalisme anticolonial et de leur véritable politique antifasciste. Il va de soi que cette forme d'anticolonialisme explique la décision prise en 2017 par les 16 millions de membres de l'All-India Kisan Sabha (le syndicat des agriculteurs) de soutenir le BDS (boycott, désinvestissement et sanctions).
C'était une chose de prendre cette position dans les années 1930, mais c'en était une autre de passer à l'action. L'Inde n'était pas en mesure d'apporter un soutien tangible aux Palestiniens à cette époque. La domination coloniale empêchait toute aide directe. Les choses allaient changer avec le soutien que le mouvement de libération indien a pu apporter aux républicains espagnols (comme je le raconterai dans un autre article).
Le mouvement de libération a toutefois mené des actions pour rallier l'opinion publique indienne à la cause palestinienne. Le Congrès a déclaré que le 27 septembre 1936 serait célébré comme la Journée de la Palestine. Nehru a organisé des rassemblements de masse en faveur de la Palestine. À Allahabad, sa ville natale, Nehru a déclaré devant une foule compacte :
"En ces temps difficiles, nos pensées et nos prières vont au peuple palestinien. La répression de leur combat est un coup porté à la lutte nationale indienne comme à la leur. Nous sommes solidaires dans ce combat mondial pour la liberté".
Une fois de plus, la brutalité de la réponse britannique a révolté Nehru.
"Le monde arabe tout entier brûle d'indignation et l'Orient, musulmans et non-musulmans, est profondément ébranlé par cette tentative brutale de réprimer un peuple qui lutte pour sa liberté".
La Journée de la Palestine a de nouveau été célébrée le 26 août 1938, le Congrès et la gauche soutenant pleinement les Palestiniens et s'opposant à la partition de leur pays.
Les Indiens ne pouvaient pas faire plus. Les Britanniques interdisaient tout approvisionnement de la Palestine. Ils ont dressé un mur contre la solidarité manifestée par les nationalistes indiens envers la lutte des Palestiniens contre le fascisme colonial.
Traduit par Spirit of Free Speech
'Palestine Belongs to the Arabs', said Gandhi.
In 1936, peasants and workers revolted in Palestine against British rule as well as the sale of land to Jewish settlers and the zu'ama (political bosses) of Palestine. It was a major uprising that lingered for three years, before being crushed by the British. The best account of this revolt was written by our comrade Ghassan Kanafani (and recently publi...
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