Par Story Ember leGaïe, le 5 mai 2025
Comment dors-tu la nuit --- Avec ta langue fourchue encore collante des mensonges que tu tètes ? Enfonces-tu ta tête dans un oreiller garni de phosphore blanc, attendri par le silence de 68 000 enfants ? Fredonnes-tu tes berceuses au passé ? "Les deux camps", "regrettable", "tragique nécessité" --- Tes hymnes d'horreur aseptisée chantés en dialecte des distances. Comptes-tu les captifs comme on compte les moutons, chaque nombre justifiant une nurserie incendiée, un membre déchiqueté, la cage thoracique d'un enfant ouverte comme une grenade -- douce, rouge et détruite ? Je ne dors pas. Je rationne mon repos comme le dernier bout de pain passé en contrebande au checkpoint. Deux heures, peut-être trois, avant que les fantômes ne se lovent sous mes côtes et me rappellent que je n'en fais pas assez. Ma culpabilité ne murmure pas -- elle m'étrangle. Elle s'enroule autour de ma trachée comme du fil barbelé travesti en échec moral. Le sommeil paradoxal m'a quittée en 2023, expulsé avec les déplacés, aspiré de mes synapses comme les calories de la bouche d'un nourrisson palestinien. Chaque fois que je ferme les yeux, je vois les gros titres blanchir le sang de la vérité, j'entends les analystes débattre débattre de la question de savoir si la famine est tactique ou fortuite, et je me réveille les poings serrés sur rien d'autre que la certitude que mes mots ne suffisent pas et que mon corps est loin de pouvoir protéger les leurs. Mais toi ? Tu dors. Tu dors dans les bras de l'empire, apaisé par les murs étanches de la "neutralité", rêvant de civisme alors que les chars broient la chair des hommes. Tu dors parce que les morts ne parlent pas ta langue, et que les vivants hurlent à une fréquence que tu as appris à faire taire. Dis-moi -- quand tes petits-enfants te demanderont où tu étais quand la Palestine s'effaçait pixel par pixel, corps par corps, vérité par vérité -- leur montreras-tu ta boîte de réception ? Tes fils de discussion pleins de silences inquiets ? Tes "likes" sur les crimes de guerre bipartites ? Ou bien leur diras-tu que tu dormais tranquillement alors que le monde partait en fumée ?
Traduit par Spirit of Free Speech
Marginalia Subversiva
Lullabies for the Unconscious
How are you sleeping at night- with your forked tongue still slick from the lies you suckle? Do you press your head into a pillow stuffed with white phosphorus, softened by the silence of 68,000 chil...