25/06/2025 arretsurinfo.ch  8min #282237

Requiem pour les Palestiniens

Par  Marc Jean

Le plan Oded Yinon, théorisé dans article paru en 1982 dans Kivunim (Orientations), le journal de la division de l'information de l'Organisation sioniste mondiale, est en passe d'être achevé. Rappelons qu'Oded Ynom était un journaliste et fonctionnaire israélien, auteur d'une note publié à l'automne 1981, soit juste un peu avant la deuxième grande confrontation entre Israël et le Liban de juin 1982 et l'Opération Paix en Galilée. Celle-ci succédait à l'Opération Litani de mars 1978. Le plan Yinon avait pour objectif de créer des mini-États antagonistes au sein du monde arabe. Ce plan fut présenté dans un article intitulé « Stratégie pour Israël dans les années 80 » par Oded Yinon, fonctionnaire du ministère israélien des Affaires étrangères -quelques mois après la première guerre israélo-libanaise. Il s'agit d'une théorie géopolitique visant à modifier l'équilibre des forces au Moyen-Orient en faveur d'Israël. Théorie reprise et développée par Richard Perle et le groupe néoconservateur de l'Institute for Advanced Strategic and Political Studies dans un mémorandum destiné au Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, datant de 2006. C'est Israël Shahak qui avait traduit et commenté ce document rédigé en hébreu. Il est disponible en librairie. (1)Bien entendu, cette information fut à l'époque qualifiée de « complotiste ». Aujourd'hui elle est devenue une triste réalité

Balkanisation et affaiblissement des Etats arabes de la région

L'Égypte et la Jordanie sont vassalisés et réduits à l'impuissance depuis longtemps et ne représentent plus aucun danger pour Israël. Bien au contraire, leurs dirigeants sont les alliés de facto de l'État juif. Leur passivité pendant les 20 mois de guerre engagée contre le peuple palestinien à Gaza et en Cisjordanie, pratiquement sous leurs terrasses, en est la preuve éclatante. La Jordanie a même assisté militairement Israël lors des frappes iraniennes en représailles en avril 2024. Au grand dam de sa population pro-palestinienne,(2) le royaume hachémite a en effet participé à l'interception des drones et des missiles iraniens visant Israël, attaque déjouée en partie grâce à la coopération de pays arabes alliés des États-Unis et méfiants à l'égard de l'Iran. Cette attitude n'est pas nouvelle lorsque l'on sait que le roi Hussein, le père de l'actuel roi, était un agent de la CIA et espion pour le compte d'Israël(3)

L'invasion de l'Irak par les États-Unis en 2003, appelée opération Liberté irakienne par les États-Unis, est une opération militaire(4) déclenchée le 20 mars 2003, sur ordre du président américain Georges W. Bush,au prétexte mensonger que l'Irak détenait des Armes de Dissuasion Massive (ADM).(5) Les conséquences en ont été catastrophiques pour ses habitants et la région.(6)

Le bombardement massif de la Libye(7), sous le faux prétexte d'un génocide, et en violation de la résolution du conseil de sécurité a abouti à la chute de Mouamar Khadafi suivi de son assassinat dans des conditions atroces. Le chaos s'en est suivi et, depuis lors, le pays est morcelé entre deux entités en conflit permanent.

Le Liban a été l'objet de guerres successives et d'intenses bombardements. L'assassinat du dirigeant emblématique du Hezbollah, et l'élimination ciblée de cadres de l'organisation, au moyen d'attaques aux bipeurs et talkies walkies piégés perpétrées le 17 et 18 septembre 2024(8) ont affaibli le mouvement de résistance. Pour éliminer Hassan Nasrallah, le secrétaire général du Hezbollah, lors d'une frappe à Beyrouth, vendredi 27 septembre 2024, il a fallu à l'armée israélienne quatre-vingts bombes et près de vingt années de préparation.

La Syrie, le pays le plus engagé aux côtés du peuple palestinien, a payé cher son refus de plier devant Israël. Il s'est retrouvé complètement détruit après 10 ans d'un guerre féroce menée par des groupes d'islamistes radicaux et étranglé économiquement par les sanctions impitoyables. La prise de pouvoir par un groupe islamiste a été possible par l'état d'épuisement et de démoralisation de l'armée. Le nouvel homme fort, un ancien chef terroriste, magiquement transformé en un dirigeant responsable, et adoubé par les dirigeants occidentaux, a tout de suite compris qu'il fallait plutôt faire profil bas et ne pas chercher querelle à Israël. C'est ce que n'avait pas compris Bachar El Assad qui avait refusé de céder aux menaces du secrétaire d'État américain, Colin Powell, lui intimant, lors d'une visite à Damas le 2 mai 2003, de rompre ses liens avec le Hezbollah libanais, l'Iran et le Hamas sous peine de représailles(9).

Et enfin le tour de l'Iran

Les vieilles recettes étant toujours les meilleurs, Israël a agité la menace de la fabrication imminente par l'Iran d'une bombe atomique pour justifier son attaque préventive, ciblant, le 13 juin 2025, les sites nucléaires iraniens ainsi que plusieurs responsables militaires et scientifiques de haut niveau. La riposte de l'Iran a conduit les États-Unis à venir en aide à leur allié et à frapper également les sites iraniens. La suite de ce conflit est incertaine, mais l'Iran n'a pas les capacités de résister à l'assaut conjoint américano-israélien et sans doute, devra accepter sinon une capitulation, tout au moins une reddition honorable. C'est l'issue la plus favorable à ses dirigeants s'ils veulent éviter un scénario de révolution orange.

Quant au Hamas et au Hezbollah, ils sont affaiblis par la disparition de leurs dirigeants charismatiques et également militairement. Les combattants survivants du Hamas, terrés dans les ruines de la ville de Gaza, ne constituent plus un danger grave pour Israël. La disparition de leurs bases arrière en Syrie et en Iran va les priver de leurs approvisionnements et conduire à leur étouffement progressif.

Et la Palestine

Aujourd'hui Israël règne en maître absolu sur la région. Il a abattu tous ses ennemis et revendique haut et fort sa politique d'assassinats ciblés des dirigeants et responsables de pays hostiles. Fort de l'appui intangible des États Unis, du silence, sinon du soutien tacite, des dirigeants occidentaux, Israël sait qu'il peut TOUT SE PERMETTRE. Depuis le massacre de Qibya (10) le 14 octobre 1953, les dirigeants américains ont compris qu'Israël est intouchable. Revenons brièvement sur les faits. A la suite de l'assassinat par des terroristes palestiniens d'une Israélienne et de ses deux enfants, l'armée israélienne avait organisé en Cisjordanie une opération de représailles dans le village de Qibya, massacrant 70 civils, sans aucune perte israélienne. L'affaire avait suscité un tollé international et le Président Eisenhower avait décidé de suspendre une aide de 60 millions de dollars destinée à Israël. Que n'avait-il osé ! Soumis à une pression intenable, il fut obligé de faire marche arrière. La leçon ne fut jamais oubliée à Washington !

On pourrait espérer qu'Israël, vainqueur incontesté, adopte une attitude généreuse en tendant aux vaincus, les Palestiniens, le rameau de la justice et de la paix. Ce fut l'attitude des vainqueurs de la seconde guerre mondiale envers les nations vaincues. Mais c'est un souhait utopique. Il ne faut espérer aucune pitié d'Israël ni justice d'aucune sorte de sa part. Désormais, la colonisation de la Cisjordanie va bien au contraire s'accélérer. Et c'est en toute bonne foi, convaincus que leur dieu leur a donné le droit divin d'occuper ce pays, qu'ils vont poursuivre, méthodiquement, le nettoyage ethnique de la Cisjordanie. N'oublions jamais que Benjamin Netanayahou a invoqué la « sainte Bible » dans un ordre à l'armée leur rappelant le 28 octobre 2023, alors que les forces israéliennes préparaient leur invasion terrestre de Gaza, le récit biblique de la destruction totale d'Amalek.(assimilé aux arabes dans l'inconscient juif) déclarant : « vous devez vous souvenir de ce qu'Amalek vous a fait, dit notre « Sainte Bible ». Et nous nous en souvenons ». Le Premier ministre a, de nouveau, fait référence à Amalek dans la lettre envoyée le 3 novembre 2023 (11) aux soldats et officiers israéliens : « Le passage biblique pertinent se lit comme suit :  » Maintenant, allez attaquer Amalek et proscrivez tout ce qui appartient à lui. N'épargnez personne, mais tuez hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et moutons, chameaux et ânes ». »

C'est pourquoi j'ai titré, avec beaucoup de tristesse, cette contribution Requiem pour les Palestiniens. Aucun dirigeant des pays occidentaux ne lèvera le petit doigt pour leur venir en aide. Même les responsables religieux de toute confession garderont un silence prudent, se bornant à quelques prières plaintives (peut-être). Il ne restera plus d'autre choix aux Palestiniens qu'entre le cercueil ou la valise.

Par  Marc Jean

(1) Le plan sioniste pour le Moyen-Orient - Yinon, Oded...

(2)La Jordanie aide à déjouer l'attaque iranienne

(3)  madaniya.info

(4) fr.wikipedia.org

(5) youtube

(6) ledevoir.com

(7) fr.wikipedia.org

(8) Sept choses à savoir sur les attaques aux bipeurs et talkies...

(9)Syrie - Powell attend des actes de Damas

(10) fr.wikipedia.org

(11) 192-20231228-app-01-00-en.pdf
Ce passage est extrait de la requête déposée en date de 28 décembre 2023 auprès de la Cour Internationale de Justice par l'Afrique du Sud. Ces déclarations se trouvent en page 142 (texte en anglais)

 Arretsurinfo.ch, 25 juin 2025

Lire aussi:

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