Aux États-Unis, qu'on soit Démocrate ou Républicain au pouvoir, le moteur de la politique étrangère de Washington reste invariable : endiguer les puissances orientales et contrôler l'Eurasie.
Dans cette perspective, le président russe Vladimir Poutine énonce une vérité que personne n'ose dire : « Le véritable pouvoir aux États-Unis ne repose pas entre les mains des présidents, mais entre celles des hommes en costumes sombres qui travaillent dans l'ombre et leur dictent la marche à suivre. C'est pourquoi chaque dirigeant finit toujours par adopter les mêmes politiques, tout en les présentant différemment ». D'où l'émergence du Trumpisme, en rébellion contre l'establishment institutionnel. Cet article, rédigé dans un langage sociométrique, analyse de manière diachronique et synchronique les dynamiques au Proche et Moyen-Orient, où le renouveau du printemps arabe, associé aux manœuvres subversives de l'Etat profond, représente une épine dans le pied de Trump.
Stratégies d'endiguement et guerres hybrides
La politique étrangère de Donald Trump, synthèse entre la doctrine Truman d'endiguement et la vision géostratégique de Brzezinski, utilise des conflits hybrides pour contrer les puissances orientales. En Ukraine, le soutien militaire américain à un régime ultranationaliste controversé vise à affaiblir la Russie dans un conflit d'attrition. Parallèlement, l'affrontement entre Israël et l'Iran, initié par des frappes israéliennes sur des installations nucléaires iraniennes et suivi de représailles sur Tel Aviv, s'inscrit dans une stratégie d'endiguement de l'Iran par un partenariat stratégique avec les États-Unis. Ce conflit, marqué par des cyberattaques et des échanges de drones et de missiles, s'insère dans une logique de guerre hybride. Concomitamment, l'administration de Washington promeut activement un programme de pourparlers visant à interdire à l'Iran l'acquisition d'armements nucléaires, tandis que son rival, Israël, détient et exhibe cet arsenal en gage de sa supposée prééminence militaire coercitive au sein de la sphère régionale. En Indopacifique, les sanctions américaines contre les semi-conducteurs chinois et les manœuvres militaires autour de Taïwan exacerbent la rivalité sino-américaine, avec le risque d'une escalade dans un contexte interconnecté aux conflits régionaux. L'Inde et le Pakistan se déchirent, les guerres oubliées d'Afrique en Amérique Latine dont l'Occident en débande jette de l'huile sur la braise, ravagent.
Tensions internes et fragilité stratégique
Le trumpisme, oscillant entre isolationnisme et interventionnisme, est fragilisé par des contradictions internes et une polarisation exacerbée. La lutte contre l'« Etat profond », une entité bureaucratique antagoniste, coïncide avec des manifestations pro-palestiniennes et des contestations de la politique migratoire américaine sous la nouvelle administration Trump. L'alliance russo-chinoise, renforcée par des initiatives bilatérales et multilatérales, défie l'hégémonie américaine, tandis que les pressions du G7 pour une désescalade placent Trump dans une position délicate. L'édition 2025 du sommet de ce groupe des sept grandes puissances économiques occidentales (qui se déroule du 15 au 17 juin à Kananaskis, en Alberta au Canada) est marquée par des tensions internationales, notamment le conflit entre Israël et l'Iran, ayant conduit le président américain à quitter prématurément la réunion. Cette géopolitique tendue, où chaque décision peut entraîner une réaction en chaîne mondiale, souligne les limites du trumpisme dans un contexte de multipolarité.
Le parallèle existe bien avec l'attaque des infrastructures aéronautiques russes par l'OTAN, camouflée dans la peau de l'Ukraine, visant à imputer à Poutine la responsabilité d'un conflit nucléaire susceptible de précipiter le monde dans une guerre mondiale 3.0, n'a pas trouvé écho chez le président russe, expérimenté et réfractaire à ces provocations.
On peut dire qu'entre stratégies d'endiguement et divisions internes, Trump se trouve au seuil d'une potentielle crise systémique face à l'escalade du conflit Israël-Iran et à l'intensification des rivalités mondiales.
Mohamed Lamine KABA, Expert en géopolitique de la gouvernance et de l'intégration régionale, Institut de la gouvernance, des sciences humaines et sociales, Université panafricaine