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Vue d'un drone ukrainien utilisé avant le déploiement sur la ligne de front en Ukraine, le 21 mai 2025.
Selon une enquête, des sociétés européennes se seraient fait passer pour des partenaires industriels afin d'accéder aux secrets technologiques des drones ukrainiens puis les réutiliser à leur compte. Ces pratiques incluraient une présentation fallacieuse de leurs produits comme «testés au combat», alors qu'aucun d'eux n'a été engagé sur le front.
D'après le journal britannique The Telegraph, plusieurs entreprises européennes du secteur de la défense auraient profité de relations de coopération avec des fabricants ukrainiens de drones pour obtenir un accès non autorisé à des informations techniques. Elles se seraient ensuite approprié ces éléments dans leurs propres projets, sans mentionner leur origine réelle.
Roman Kniajenko, directeur général de Skyeton - une entreprise ukrainienne impliquée dans la production de drones - accuse certains acteurs occidentaux de s'être présentés comme partenaires, alors que leur véritable objectif était de collecter des informations sensibles. « Elles promettent beaucoup juste pour engager la discussion, puis disparaissent après avoir recueilli les informations », a-t-il affirmé dans The Telegraph.
Selon lui, certaines entreprises n'hésitent pas à reprendre des phrases entières de sa documentation dans leurs présentations, tout en faisant croire que leurs appareils ont été « testés au combat ». En réalité, ils n'auraient effectué que de simples vols de démonstration à Lvov, loin des zones d'affrontement.
Un savoir-faire revendiqué, mais difficilement vérifiable
Toujours selon Skyeton, ces pratiques auraient permis à certaines sociétés de remporter des contrats publics en Europe sur la base de résultats largement exagérés. Kniajenko met en garde contre le financement de systèmes présentés comme efficaces, mais qui ne reposeraient sur aucune expérience réelle du champ de bataille. Il déclare : « Ils investissent dans des technologies qui sont en fait factices. À la fin, vous n'aurez rien ».
Le drone principal de Skyeton, le Raybird, est régulièrement cité par les médias ukrainiens comme un exemple d'ingénierie nationale, bien que son efficacité réelle sur le front ne soit confirmée que par des sources locales. L'entreprise insiste sur la complexité de sa conception et sur les nombreuses modifications apportées pour s'adapter aux besoins militaires. Toutefois, ces affirmations, invérifiables de manière indépendante, participent aussi à une stratégie de communication visant à renforcer la crédibilité du secteur ukrainien de la défense.
Kniajenko critique ces entreprises européennes qui, selon lui, sous-estiment les défis réels de la production de drones et pensent pouvoir reproduire rapidement des capacités complexes après une simple visite d'usine. Il compare cette attitude à une tentative de vouloir construire une voiture BMW en quelques mois à partir de rien.
Des limites techniques et des appels au financement occidental
Parmi les obstacles cités par Skyeton figurent également des problèmes d'approvisionnement. L'entreprise affirme avoir reçu des composants défectueux de la part de fournisseurs occidentaux et regrette les retards de production que cela engendre. Selon Kniajenko, les procédures juridiques internationales sont trop longues pour permettre une résolution efficace, ce qui affecterait directement l'armée ukrainienne.
Face à cette situation, le dirigeant appelle les pays occidentaux à soutenir l'industrie ukrainienne en transférant la production sur leur propre territoire. Il propose un modèle où l'Ukraine fournirait le savoir-faire tandis que la fabrication serait relocalisée en Europe.
Ces déclarations soulèvent de nombreuses interrogations sur les relations entre les industries de défense européennes et ukrainiennes, ainsi que sur la fiabilité des systèmes promus comme « issus du terrain ». Elles rappellent également que, derrière les discours de coopération, des logiques concurrentielles et opportunistes restent bien présentes.