Par Ana Vračar, le 14 juillet 2025
Après l'enlèvement de l'équipage du Madleen par l'armée israélienne dans les eaux internationales, le Handala reprend la mer.
Quelques semaines seulement après l'interception et l'enlèvement de l'équipage du navire Madleen par les forces d'occupation israéliennes dans les eaux internationales, la Flottille de la Liberté se prépare à reprendre la mer. Le Handala, qui transporte des biens de première nécessité, notamment vivres et médicaments, partira d'Italie le 13 juillet avec 18 membres d'équipage, dont des syndicalistes et des parlementaires tels que le syndicaliste américain Christian Smalls, la députée européenne française Emma Fourreau et la députée Gabrielle Cathala.
Briser le blocus pour les enfants de Gaza
Michele Borgia, porte-parole de Freedom Flotilla Italy, a déclaré à Peoples Dispatch que, si le message de solidarité avec le peuple palestinien assiégé reste constant, cette mission a un objectif supplémentaire : les enfants de Gaza. Des milliers d'enfants palestiniens, y compris des bébés, ont en effet été tués lors des attaques incessantes d'Israël, a-t-il averti. Le navire transporte notamment du lait en poudre.
Le nom du navire, Handala, fait référence au personnage de bande dessinée qui tourne le dos au monde en signe de protestation jusqu'à ce que la Palestine soit libre.
Depuis qu'Israël a violé le cessez-le-feu en mars et imposé un blocus à tout l'aide humanitaire à Gaza, les enfants meurent de faim, car ils n'ont pas accès au lait maternisé et à la nourriture, poursuit Borgia.
"On rapporte également que de nombreux enfants et parents sont pris pour cible alors qu'ils font la queue pour recevoir de l'aide, notamment du lait maternisé".
L'organisation Freedom Flotilla a écrit en annonçant la mission :
"Les enfants de Gaza, qui représentent plus de la moitié de la population, vivent depuis toujours sous un blocus et un siège barbares. Depuis octobre 2023, plus de 50 000 ont été tués ou blessés, des dizaines de milliers sont orphelins et près d'un million d'entre eux ont été déplacés de force et vivent désormais dans la rue. Tous sont désormais confrontés à la famine, aux maladies et à de terribles traumatismes. Cette mission leur est dédiée".
Le lien spécifique avec les enfants de Gaza a également suscité un appel à l'action dans le sud de l'Italie. Les Pouilles sont la première région d'Italie à avoir officiellement soutenu la rupture des relations avec Israël, souligne Borgia. Aujourd'hui, les enfants des Pouilles sont invités à envoyer des dessins aux enfants de Gaza. Ces dessins seront transportés à bord du Handala, en guise de message symbolique d'entraide.
Le message politique de Handala
D'après Borgia, les provisions à bord des navires de la flottille sont loin d'être suffisantes pour répondre aux besoins de la population de Gaza, soumise à un blocus depuis des mois.
"Les détracteurs, y compris Israël, ne manquent jamais une occasion de souligner le peu que nous transportons et de dénigre notre action", dit-il. "Mais ils oublient de mentionner que, l'année dernière par exemple, lorsque nous avons organisé la livraison de milliers de tonnes de denrées essentielles, ces cargaisons ont également été interceptées".
Selon lui, la mission du Handala, à l'instar de celle du Madleen et des voyages précédents, va au-delà de la simple livraison d'aide matérielle : il s'agit d'une déclaration politique à part entière.
"Pendant des années, Israël a empêché les Palestiniens de pêcher ou de cultiver", a déclaré Borgia. "Ces restrictions ont contraint les Palestiniens de Gaza à une dépendance totale de l'aide, avec des conséquences dévastatrices pour leur dignité et leur autonomie".
Dans ce contexte, alors que les gouvernements se taisent face au génocide, à l'occupation continue et aux autres crimes commis par Israël, la Freedom Flotilla vise à briser ce silence.
"Là où les gouvernements échouent, nous, le peuple, sommes là pour agir", souligne Borgia.
Freedom Flotilla Italy a joué un rôle important dans l'organisation du départ du Handala, en coordonnant les questions techniques et logistiques. L'organisation a tissé des liens avec les initiatives de solidarité avec la Palestine qui ont émergé au début des années 2000, notamment le travail du journaliste et militant Vittorio Arrigoni, qui a participé à une mission ayant réussi à atteindre Gaza. "Depuis, Israël a bloqué les missions similaires", a noté Borgia, faisant référence à l'obstruction, parfois musclée, des départs récents, notamment celui du Madleen.
De nombreux membres de l'équipage de la Freedom Flotilla sont originaires d'Europe et d'Amérique du Nord. "Israël hésite à attaquer des militants internationaux", a déclaré Borgia. Mais, comme le monde l'a récemment vu avec le Madleen, cela n'empêche pas Israël d'enlever des membres d'équipage dans les eaux internationales et de les maltraiter. Les gouvernements dont sont originaires les militants gardent le silence, y compris l'Italie, selon Borgia.
"Nos ministres serrent la main de Benjamin Netanyahu, accusé par la CPI, mais ils ne s'expriment pas sur la Palestine".
Des syndicalistes à bord
Il a également souligné que des entreprises italiennes, telles que le géant de la défense Leonardo, exportent toujours des armes vers Israël, en violation des interdictions constitutionnelles en vigueur. D'autres participants à la mission abondent dans ce sens. Le dirigeant syndical américain Christian Smalls a annoncé sa participation à la mission Handala et a appelé à la fin du soutien américain à Israël.
"Il ne s'agit pas seulement du gouvernement", a-t-il écrit. "Nos propres organisations syndicales américaines, pourtant censées lutter pour la justice, sont également complices".
Il a dénoncé le silence de certains grands syndicats américains sur le génocide à Gaza et les a appelés à consulter leurs membres.
"Le meurtre d'innocents ne relève pas de la sphère du travail", a-t-il déclaré sur les réseaux sociaux. "J'appelle les travailleurs américains à prendre position : arrêtez toutes les livraisons d'armes à Israël, adoptez immédiatement des résolutions en faveur d'un cessez-le-feu et positionnez-vous du bon côté de l'histoire. Nous ne nous laisserons pas intimider. Nous ne nous tairons pas".
Partout en Europe, les syndicats appuient de plus en plus les résolutions en faveur de la Palestine sous la pression de leurs membres. À bien des égards, cette situation fait écho à "l'expérience de la Flottille de la liberté" décrite par Borgia : un fort soutien populaire et un engagement croissant des communautés, confrontés à l'indifférence ou à l'hostilité de la classe politique.
"Mais cela ne nous arrêtera pas" a-t-il déclaré. "La plupart de nos principaux organisateurs sont palestiniens, et les Palestiniens nous incitent toujours à continuer à faire entendre nos voix".
Alors que le Handala prend la mer, son équipage est déterminé à focaliser l'attention sur Gaza. Et d'autres navires se préparent à suivre son exemple.
Traduit par Spirit of Free Speech